Titre USA :
Once Upon a Forest
Production :
Bonne Pioche
Date de sortie France :
Le 13 novembre 2013
Distribution :
The Walt Disney Company France
Genre :
Documentaire
Réalisation :
Luc Jacquet
Musique :
Éric Neveux
Durée :
75 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

De la première pousse de la forêt pionnière au développement des liens entre plantes et animaux, pas moins de sept siècles s’écoulent sous les yeux des spectateurs...

La critique

rédigée par

Il Était une Forêt est le troisième long-métrage de Luc Jacquet. Trois films, trois styles différents ! Le premier, La Marche de l'Empereur, est ainsi un documentaire animalier scénarisé absolument superbe. Le second, Le Renard et l'Enfant, est un docu-fiction où la partie humaine plombe le rythme et la beauté. Il Était une Forêt est assurément le plus didactique des trois. Moins ennuyeux que Le Renard et l'Enfant, grâce à une narration soignée, Il Était une Forêt subjugue par une poésie insoupçonnée. Malgré des images moins époustouflantes que la promesse initiale du film, l'émotion joue à plein via des artifices de réalisation habilement utilisés pour traiter d'un sujet somme tout difficile d'accès : suivre la croissance d'un arbre sur 700 ans ! Le propos devient alors limpide et digeste, offrant au spectateur un divertissement intelligent.

La production et distribution française de La Marche de l'Empereur, réalisé par Luc Jacquet, marque, en 2005, la venue de Walt Disney Studios Motion Pictures - France sur le marché, déserté jusqu'à lors, du documentaire à destination des salles obscures. Le succès rencontré par le film animalier tourne alors bien vite au coup de maître. A travers le monde, le public se rue, il est vrai, dans les salles et sur les DVDs tandis que les professionnels décernent à l'œuvre l'Oscar du Meilleur Documentaire. Luc Jacquet tente d'ailleurs, en décembre 2007, de renouveler son exploit en présentant, toujours sous la coupe de la filiale française de distribution de The Walt Disney Company, un nouveau long-métrage, Le Renard et l'Enfant. Entre temps, et bien décidé à surfer sur ses premiers succès, Walt Disney Studios Motion Pictures - France propose le documentaire, Le Premier Cri avant de revenir à un style plus accessible avec le long-métrage, tiré de l'émission télé de France 5, J'irai Dormir à Hollywood. Plus étonnant, le label enchaine alors en investissant - sans grand succès - le genre de la comédie avec King Guillaume. Trois autres tentatives sont ensuite menées, l'une en 2011 dans le genre du docu-fiction avec La Clé des Champs, l'autre au début de l'année 2013 avec la comédie avec Une Chanson pour ma Mère et la troisième à la rentrée 2013 avec le documentaire avec Sur le Chemin de l'École. Les deux premiers films seront accueillis fraichement par la Critique et passeront complètement inaperçus en salles... Le troisième, quant à lui, salué pour ses qualités signe en plus un joli succès public.

Pour la troisième fois, Luc Jacquet est donc distribué par Walt Disney Studios Motion Pictures - France. Pourquoi, en effet, changer une association qui fonctionne ?
Né en 1967 à Bourg-en-Bresse, le réalisateur passe sa jeunesse dans la partie jurassienne de l'Ain. C'est dans cet environnement que naît progressivement sa passion pour la Nature. C'est aussi dans ce cadre qu'il s'habitue au froid et à la neige. Écologue de formation, Luc Jacquet étudie à l'Université Lyon I, où il obtient une maîtrise de biologie animale en 1991, puis à l'université de Grenoble où il passe, en 1993, un DEA en gestion des milieux naturels montagnards. Il se destine alors à un avenir de chercheur en comportement animal. Au cours de ses études lyonnaises, il répond ansi, en 1992, à une annonce cherchant quelqu'un pour aller en Antarctique étudier des manchots empereurs. Ce sont alors ses premiers contacts avec ce continent et ces animaux. C'est aussi pour lui l'occasion de faire une formation sur le 35 mm alors qu'il n'avait jamais utilisé une caméra avant cela. Il lui est confié dans la foulée le rôle de cadreur auprès du réalisateur suisse Hans-Ulrich Schlumpf pour le film documentaire Le Congrès des Pingouins. Cette expérience est décisive : Luc Jacquet décide de se consacrer aux films documentaires, se rendant compte que cela l'intéresse plus que la recherche. Il réalise ensuite ses propres documentaires, dont Le Léopard de Mer : La Part de l'Ogre en 1999 et Des Manchots et des Hommes en 2004, tous deux primés dans plusieurs festivals. Au début des années 2000, il commence à développer son projet de long-métrage cinématographique qui deviendra réalité lors de la sortie en 2005 de La Marche de l'Empereur. En 2007, il sort son deuxième film au cinéma, Le Renard et l'Enfant puis vient 2010 où il fonde l'association Wild-Touch, avec la volonté de donner une utilité concrète à sa notoriété internationale.

Luc Jacquet rencontre le botaniste Francis Hallé, quelques jours seulement après la création de Wild-Touch. Ce dernier essaie depuis 20 ans de faire un film sur les forêts primaires. Dès août 2010, tous deux font donc un voyage en Guyane, dans la réserve naturelle des Nouragues, pour faire les premiers repérages d'un éventuel projet commun. Ils en reviennent avec un film court, C'Était la Forêt des Pluies, qui impulse un projet d'un film de plus grande ampleur, initialement intitulé La Forêt des Pluies pour se voir nommé finalement Il Était une Forêt, un documentaire sur les forêts primaires. L'écriture et le tournage se fondent ainsi sur la belle complémentarité de Luc Jacquet et Francis Hallé : le botaniste se consacre au contenu scientifique alors que le réalisateur s'emploie à mettre en images ce que le premier lui suggère.

Premier constat étonnant, Il Était une Forêt est un film personnel : celui de Francis Hallé. A tel point qu'il est le personnage central de l'opus, le fil rouge du récit, apparaissant régulièrement ici et là, chaque fois en dessinant, de façon minutieuse, les arbres qu'il étudie. La présence du botaniste insiste de la sorte sur sa relation avec la forêt. Mais voilà : si elle apporte une touche humaine au propos, elle peut tout de même grandement gêner le spectateur. Malgré le côté touchant de ce parti pris, destiné à porté ce cri du cœur pour la protection de l'habitat naturel, l'apparition régulière de Francis Hallé enlève, paradoxalement, une certaine la force à la présence végétale. Le spectateur peut, en effet, penser légitimement que s'il vient voir un film sur une forêt, ce n'est pas forcément pour y trouver une apparition humaine par trop régulière au milieu de la Nature flamboyante. Pourtant, et étonnamment, ce sont bien les scènes avec le botaniste qui apportent la plus grande originalité à l'opus tant elles sont parfaitement réussies et supportent presque à elle-seule la poésie de l'ensemble. Son discours, scientifique dans le ton mais artiste dans l'âme, est ainsi passionnant. Il est d'autant plus agréable à entendre qu'il est doublé par Michel Papineschi, connu pour être la voix de Robin Williams ou de Tim Allen, donnant au texte, une chaleur et fluidité bluffante et reposante. Le documentaire sort alors de son registre strict et apporte un apaisement bienvenu, véritable séquence de Yoga.

Même si Francis Hallé aborde le sujet de la déforestation, Il Était une Forêt n'est vraiment pas un film militant écologiste. C'est simplement une formidable déclaration d'amour à la forêt ! Certes les méfaits de l'homme sur la faune et la flore sont pointés du doigt mais l'exposé sur le cycle de vie d'une forêt tropicale (la façon dont elle se créait, prospère et se régénère ainsi que sa relation étroite avec la faune du plus petit insecte au grand prédateur) prend le pas sur tout le reste. Dans ce cadre, même si le discours se veut optimiste, une pointe de pessimisme, ou plutôt de résignation, se ressent. Comme si Il Était une Forêt était en réalité, un film-testament, un film pour la mémoire. Le botaniste semble craindre à l'échelle de sa vie, la disparition de ce qui lui tient à cœur. Il Était une Forêt est ainsi empli de mélancolie et curieusement d'espoir : et si la disparition de la forêt, portant en elle celle de l'homme, n'était pas le moyen pour la Nature de reprendre le dessus ?

L'autre grande trouvaille du documentaire est l'utilisation de l'imagerie par ordinateur afin de créer des animations destinées à soutenir et illustrer les différentes démonstrations scientifiques avancées tout au long du film pour expliquer la sève, la photosynthèse, la croissance des arbres ou l'attaque des chenilles. L'animation est, en effet, un moyen idéal de mettre en mouvement la pousse des arbres. Comment, sinon, montrer des arbres qui vivent plus de sept siècles et ne grandissent de quelques centimètres par an. Le moyen trouvé est non seulement terriblement efficace mais aussi absolument poétique. Les studios Disney l'ont d'ailleurs parfaitement compris depuis longtemps comme en témoignent le cartoon À la Gloire d'un Arbre ou la séquence de L'Oiseau de Feu dans Fantasia 2000. Il Était une Forêt démontre alors que si le monde des animaux est maître de l'espace, le mondes arbres est, lui, maître du temps ! Et quoi de mieux que de l'accélérer pour prendre la mesure d'une croissance hors du temps.

Le dernier point qui finit de véhiculer l'émotion est assurément la superbe musique d'Éric Neveux. Par l'envolée de certains passages, le spectateur est alors pris de frissons tellement les airs joués amènent un côté épique ; notamment quand la caméra fait un zoom arrière partant d'un détail d'un arbre pour reculer et en offrir une vision d'ensemble. Le compositeur insuffle clairement de l'énergie au long-métrage : le mélange de la musique et de la narration formant un bel atout.

Pour autant, malgré d'indéniables qualités, Il Était une Forêt pêche là où il est attendu. La promesse du film n'est pas tenue et le spectateur est déçu par le peu de force des images proposées. Certes, elles sont belles mais bizarrement elles ne restent pas en tête à la fin de la séance. Pour un documentaire censé vanter la magnificence de la forêt, c'est un peu dommage. En fait, l'opus souffre beaucoup d'offrir des images certes sympathiques mais jamais extraordinaires d'un point de vue de la réalisation. La restitution de la forêt tropicale dans Chimpanzés ou l'étude des insectes dans Pollen, tous deux des Disneynature, sont bien plus ambitieuses par leurs capacités à couper le souffle du spectateur. Des images qui se suffisaient à elles-mêmes ! Sans les superbes artifices décrits plus haut, Il Était une Forêt ne serait plus qu'ainsi un film plat et ennuyeux. Mais peut-être est-ce là un parti pris assumé tant un arbre reste par définition immobile et statique : tous les zooms du monde ne pouvant dès lors pas donner des images de mouvement et de vie. Conscient de la difficulté, Luc Jacquet choisit alors de s'en sortir par des chemins de traverse pour donner à son documentaire, plus un rythme narratif qu'un rendu visuel, cherchant de la sorte à porter son sujet au niveau de la conscience du spectateur. Il s'agit dès lors de placer un arbre septuple centenaire, statique aux yeux des humains, au centre d'un film vivant et mouvant sur 75 minutes.

Autre regret, mais niveau marketing cette fois-ci : Il Était une Forêt annoncé un temps comme un Disneynature sort finalement sans label, simplement distribué par Walt Disney Studios Motion Pictures - France. La décision est d'autant plus surprenante que La Marche de l'Empereur est à l'origine de la création du label et qu'il a rejoint, depuis, la collection vidéo de Disneynature. Pourquoi se priver de la puissance d'une marque dont la présence attire automatiquement à elle des spectateurs ? Peut-être Disneynature ne distribue-t'il en France que des films produits par lui ? Les Etats-Unis, eux, ne s'embarrassent pas de ces questions et supportent sous ses couleurs boréales les deux films, Un Jour sur Terre et Océans, non produits par Disneynature à la base. Peut-être est-ce la présence d'humains de façon par trop prononcée qui a empêché l'intégration dans la collection ? Argument difficile à tenir : Océans et Pollen sont dans ce cas-là. Ou est-ce, tout simplement, une question de contrat avec tous les producteurs et autres sociétés ayant participé au financement. Difficile de trancher. Le fan de Disneynature se contentera donc des remerciements exprimés à la fin du film à Jean-François Camilleri, le créateur du label, mais aussi à Xavier Albert, le responsable cinéma de The Walt Disney Company - France.

Au final, Il Était une Forêt ne vaut pas pour ses images qui, si elles sont belles, ne sont jamais époustouflantes : non, le film vaut surtout pour son intelligente, apaisante et passionnante narration, sa musique épique et son utilisation vraiment bien sentie de l'imagerie numérique. La mission n'est donc, certes, pas tout à fait remplie mais elle est tout de même réussie !

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