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Manger à Disneyland Paris
Un Parcours du Combattant !

L'article

Publié le 07 mars 2014

Le concept de Disneyland Paris est à la base et pour paraphraser le créateur de l’hypermarché en France d’avoir « Tout sous le même Toit ». Alors certes pour le pays de Mickey, cette maxime s’entend plutôt « Tout sous le même Ciel Étoilé », magie oblige ! Le resort parisien, première destination touristique d’Europe, partage en effet avec d’autres lieux de visite français (le Mont Saint Michel pour ne citer que lui) la particularité de disposer d’une clientèle captive. Ainsi, cette situation présente des avantages non négligeables pour le tiroir-caisse de l’oncle Picsou. Pour faire court, il n’a pas de concurrence frontale et fixe ses prix en fonction de ses seules études tant le client n’a pas vraiment la capacité de les remettre en cause : difficile, il est vrai, pour ce dernier d’imaginer que la peluche de Mickey du petit dernier sera moins chère dans la boutique suivante.

Mais, revers de la médaille : qui dit « clientèle captive », dit également « opulence de services ». Le visiteur de Disneyland Paris, emprisonné une fois les portes franchies, doit en effet être en capacité de trouver tout ce dont il a besoin, d’un point de vue pratique, pendant sa visite : du parking, aux toilettes, en passant par des magasins de souvenir (Eh oui, une boutique de Disneyland Paris n’est en réalité rien d’autre qu’un bon vieux « magasin de bibelots ») et bien évidemment des restaurants sans oublier l’infirmerie, le bureaux des pleurs (Eh oui, City Hall n’est autre qu’un autre qu’un bon vieux « service de réclamation ») et autres à côtés fonctionnels (la consigne, la location de poussette, le magasin de vente de pellicules – ha ben, non, ça c’est terminé depuis l’avènement du numérique).

Parmi tout cela, il est un service qui marque les esprits dans le mesure où il est incontournable dans une journée et plus encore pour la clientèle française qui le place parmi ses priorités ; à savoir : la restauration. Pour un visiteur gaulois, déjeuner dans de bonnes conditions (à table, avec des plats gouteux et chauds), sous les coups de midi ou de dix-neuf/vingt heure pour le diner est un impératif... Et là, force est de constater que la dernière réorganisation de la restauration à Disneyland Paris a transformé l’expérience du visiteur en galère permanente.

C’est simple. Il n’est plus possible de manger sereinement dans les parcs de Disneyland Paris ! Alors, hors de question pour Chronique Disney de remettre en cause la qualité des menus, la thématisation des restaurants ou même les gammes de prix. Le resort parisien offre, en effet, une large gamme d’établissements qui permet à tous les budgets de trouver leur bonheur, qu’il s’agisse de manger sur le pouce, d’apprécier un fast-food (non ce n’est pas un contre-sens !), de déguster un buffet ou d’accéder à un service à table à la française (avec ou non la visite de princes et princesses du cru). Certes, les esprits chagrins constateront que les prix sont plus élevés que dans leur ville : mais quel lieu touristique ne pratique-t-il pas des tarifs différents de la normale. Quitte à comparer les prix de Disneyland Paris, autant le faire avec des lieux du même acabit ; et il est impossible de nier qu’à service équivalent, Mickey n’est pas plus cher que les autres. Il serait d’ailleurs grand temps d’en prendre conscience... De même, les menus et la qualité des produits ne souffrent pas de réelles critiques : quel que soit la gamme des restaurants choisis, les chefs « font le job » et assurent la plupart du temps des menus originaux,  savoureux et servis chauds.

Non, le vrai problème de la restauration dans le Parc Disneyland et le Parc Walt Disney Studios se situe au niveau de l’organisation de l’offre. L’effort de rationalisation des couts menés par la Direction de la Restauration s’est traduit par la pire des solutions : la fermeture des restaurants érigée en variable d’ajustement. Malheureusement, le remède est pire que le mal et, s’il devait perdurer, risque tout bonnement de tuer le malade.

Comment en est-elle arrivée là ?
Pour faire d’une histoire longue, une histoire courte, la Direction de Disneyland Paris, en recherche d’amélioration des coûts du resort, s’est bien évidemment penchée sur ceux de la restauration. Et les financiers sont tombés dans leurs travers habituels sans connaitre forcément le fonctionnement d’un restaurant. Regardant simplement le pied de ligne du compte d’exploitation, ils se sont dits : « si des restaurants ne font pas le plein et donc voient leur marge plombée par leurs frais fixes, fermons-en certains pour réduire les coûts, et rentabiliser l’ensemble grâce au report de la clientèle sur les autres ». Ainsi, par exemple, si Colonel Hathi's Pizza Outpost Restaurant et Restaurant Hakuna Matata sont à moitié plein les jours de semaine, il est décidé de fermer le premier pour que le second tourne à plein régime. Sur le papier, cette politique du sabre ne présente que des avantages ! Elle est censée mécaniquement réduire les frais fixes, en permettant par exemple aux équipes de solder les congés par rotation quand il ne s’agit pas tout simplement de réduire le staff, aux matériels de se reposer, aux équipes techniques d’intervenir en site fermé, de moins consommer d’électricité etc. La solution idéale, en somme.

Mais voilà : elle ne marche pas parce que son postulat de départ est tout simplement faux ! Déjà, soutenir l’idée qu’un restaurant de Disneyland Paris peut en remplacer un autre, c’est nier le concept même d’un parc Disney. Alors certes, deux restaurants de type fastfood sont similaires dans leur organisation mais ce qui est vrai pour les équipes de restauration ne l’est pas pour les visiteurs car les restaurants sont censés tous avoir un thème différent, un menu adapté au lieu pour justement enrichir l’expérience vécue, celle-là même que le visiteur est venu chercher.
Ensuite, penser que le report de clientèle est automatique, total et tranquille est une hérésie sans nom. Il faut d’abord que le visiteur, qui s’est cassé le nez sur les portes fermées du restaurant qu’il visait en premier, sache retrouver un établissement similaire à la gamme qu’il souhaitait, tout en faisant son deuil du menu alors envisagé. Et ce ne sont pas les affiches de plans erronés (sans doute oubliés de la veille) collés à la va-vite sur les portes des établissements clos qui l’aideront à se retrouver. Ainsi, espérer manger au Fuente del Oro Restaurante et finir Au Chalet de la Marionnette après un périple dans le parc n’est pas un report réussi car il a suscité une première frustration, celle du restaurant fermé ; puis une seconde, celle du temps perdu pour trouver l’autre. Et quand, en plus, l’expérience se fait avec des mômes qui braillent qu’ils ont faim, le drame familial est à portée de congélateur... Mais, c’est aller un peu vite en besogne car il manque la plus grande des frustrations ; le vécu du repas !
Eh oui, tout content d’être parvenu à décrocher le Graal (à savoir le restaurant de sa gamme de prix avec le menu qui plaira à tous ses accompagnants), le visiteur n’en est pas pour autant au bout de ses peines ! Car le restaurant maintenu ouvert par des financiers, autant en mal de marge que de compétence, déborde de clients qui, eux-aussi, se sont retrouvés « invités » à venir sur ce seul point de restauration resté ouvert dans le coin. Commence alors le parcours du combattant : « vite les enfants, allez bloquer une table avec maman ; papa fait la queue et vous appelle une fois au comptoir. » Sauf que, tout le monde fait pareil et la foire d’empoigne est assurée... Plus question d’apprécier le cadre, il s’agit désormais de survie ! Et patatras, après trois quarts d’heure d’attente, le gentil cast-member qui enregistre la commande annonce au client que le menu « enfant » n’est plus disponible ou que tel ou tel élément est en rupture ! Les pleurs du gamin auquel il a été promis une glace Mickey et qui se retrouve avec un yaourt à l'abricot rajouteront à l’ambiance générale du restaurant...


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Que faire après un constat aussi implacable ? Il n’en reste, en effet, pas moins qu’il est nécessaire à Disneyland Paris de dégager de la marge pour parvenir à l’équilibre et le centre de profit qu’est la restauration doit également faire sa part du chemin. Si ce n’est pas en fermant des restaurants pour adapter l’offre à la fréquentation, quelle est l’autre solution ?
En réalité, le moindre restaurateur la connait. Et il ne s’agira jamais de fermer son établissement. Jamais ! Il s’agira en revanche de l’adapter à la fréquentation. Il convient pour bien comprendre la nuance de revenir aux bases de la gestion d’un établissement de restauration. Pour envisager la rentabilité d’un restaurant, il faut calculer son ratio nombre de couverts / équilibre et il faut admettre  et faire admettre que, certains jours dans l’année, il ne produira pas de richesses. Ainsi, par exemple, un établissement qui est en capacité de faire 1000 couverts (en tournant à plein) est en aussi capacité avec seulement 100 couverts sur une journée de couvrir ses frais, sans produire de richesse mais sans creuser de dette (chose importante). Pour réaliser ses 100 couverts, il lui faut par exemple une brigade en cuisine de 3 personnes et l’équivalent en salle alors qu’elle serait quadruplée pour 1000 couverts. Dès lors que cet élément est su, il suffit les jours de moindre affluence (après 22 ans, Disneyland Paris dispose de l’expérience nécessaire pour prévoir le nombre de visiteurs très finement) de retomber sur ce minimum. Résultat, dans le maillage des restaurants de Disneyland Paris, certains jours, certains établissements se trouveraient limités à leurs configurations minimales mais resteraient ouverts. L’avantage est d’offrir alors une réponse à la hauteur de l’attente des clients (qui ne se casseront plus le nez sur une porte fermée) tout en ne perdant pas d’argent. L’expérience du visiteur est préservée et le bouche-à-oreille redevient vertueux. Du « manger chez Disney fut l’horreur », elle passerait à «  nous avons pu trouver une place facilement pour manger au chaud ». Et si d’aventure, un restaurant en configuration minimale se trouvait à devoir faire face à une affluence trop grande pour lui, le report sur d’autres restaurants se ferait plus facilement puisque tous ses autres confrères seraient eux également ouverts. Là encore, rien à voir avec le parcours du combattant actuellement imposé aux visiteurs et qui consiste à devoir aller chercher à l’autre bout du land le seul établissement ouvert de la journée et croulant sous le monde.

Il ne faut néanmoins pas se leurrer. Des efforts sont également à mener dans la gestion de l’affluence. Il est aussi effarant de voir à quel point les équipes de terrain sont démunies d’outils ou de procédures pour gérer les files d’attente qui se forment aux restaurants. N’importe quel Mac Do digne de ce nom est par exemple équipé de « preneur de commande » doté d’un terminal portable qui remonte les files et permet ainsi aux cuisines de savoir très en amont ce qui est sur le point d’être commandé et donc de produire en nombre, sans casse ; le client n’ayant plus qu’à payer en caisse une fois parvenu à elle. N’importe quel hypermarché de France et de Navarre est également équipé en caisse d’un système qui oblige l’hôte ou l’hôtesse, avant de passer au client suivant,  d’indiquer le nombre de personnes patientant après lui : cet outil permet de connaitre précisément la composition de l’affluence de la journée et, en vue de prévoir l’année suivante, d’obtenir des statistiques de fréquentation très précises. Enfin, il faut absolument renforcer la signalétique des restaurants de sorte qu’il soit aisé d’en trouver un autre lorsque cela s’avère nécessaire. Si les visiteurs se présentant à Pizzeria Bella Notte disposaient immédiatement d’une information en temps réel les informant que Toad Hall Restaurant est fluide, le report de client ne se ferait que mieux...

En restauration, comme partout et plus encore s’agissant d’un environnement de clientèle captive, c’est d’abord l’offre qui crée la demande ! Et il faut un minimum d’investissements et d’audaces pour en récolter les fruits : maintenir les restaurants ouverts, investir dans de vrais outils statistiques, revoir les procédures de gestion d’affluence, repenser la signalétique du maillage des restaurants en ne négligeant pas l’information en temps réel...

La situation actuelle de la restauration à Disneyland Paris n’est pas satisfaisante : en fermant de manière systématique et en nombre les restaurants des parcs, le resort mène une politique inadaptée qui, si elle a produit des effets immédiats sur les résultats et la marge, contient le poison insidieux de la désaffection durable. Viendra alors vite le constat d’une baisse générale des volumes de vente que ne saura pas masquer l’inflation des additions... Il est regrettable de constater que tout le travail sur les menus et les recettes est littéralement plombé par l’expérience infernale que le Parc Disneyland et le Parc Walt Disney Studios font vivre à leurs visiteurs quand il s’agit pour eux de simplement vouloir déjeuner ou diner...

A quelques mois de l’ouverture de Ratatouille, L’Aventure Totalement Toquée de Rémy (que Chronique Disney désigne par l’acronyme RATToR), il serait impensable de laisser penser que la France ne sait gérer ses restaurants ailleurs que dans une attraction...

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