Production :
Lambart Productions
Date de sortie France :
Le 17 décembre 2014
Distribution :
The Walt Disney Company France
Genre :
Comédie
Réalisation :
Manuel Pradal
Musique :
Maxime Desprez
Michael Tordjman
Durée :
77 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Benoît Brisefer, âgé de 10 ans, est un petit garçon qui cache sous une apparence très ordinaire de super pouvoirs. Son seul point faible réside dans le fait qu'il perd toute sa force quand il s'enrhume...

La critique

rédigée par
Publiée le 23 décembre 2014

Si Disney France est surtout connue pour la diffusion des productions américaines de sa maison-mère, il lui arrive de temps à autres de donner dans la distribution purement locale. Ainsi, elle dispose d'un catalogue majoritairement axé sur les documentaires mais s'est essayée également à la comédie franco-française, jamais avec bonheur faut-il reconnaitre. Les derniers films en date, King Guillaume avec Florence Foresti en 2009 et Une Chanson pour ma Mère avec Dave en 2013, sont, en effet, passés complètement inaperçus... Benoît Brisefer - Les Taxis Rouges fait pire encore et peut être qualifié, en plus, d'accident industriel. Rêvant de reproduire le succès commercial rencontré par l'adaptation de Boule & Bill au cinéma, Disney France s'est pris les pieds dans le tapis en tentant d'amener à l'écran une bande dessinée de Peyo.

Pierre Culliford, alias Peyo, est né à Bruxelles le 25 juin 1928. Il fait partie de cette génération d'auteurs qui a engendré plusieurs des grands personnages de la BD franco-belge. Obligé de subvenir à ses besoins dès son adolescence, il commence ainsi sa carrière en qualité de projectionniste dans un cinéma, puis travaille brièvement au sein d'un petit studio de dessins animés. Il y fait la rencontre de Franquin (Spirou et Fantasio), Morris (Lucky Luke) et Paape (Jean Valhardi) qui vont être à l'origine de sa carrière d'auteur-dessinateur. Lorsque le studio ferme ses portes, il décide en effet de se lancer dans le 9eme art en plaçant notamment des planches comme celles de Poussy qui paraissent alors dans le grand quotidien belge Le Soir. Au début des années 1950, Peyo entre au mythique journal Spirou avec le personnage de Johan tandis que l'ajout du trublion Pirlouit dans la BD, vite renommée Johan et Pirlouit, va faire de lui l'un des piliers de l'hebdomadaire. En 1958, il crée au sein de leurs aventures des petits êtres bleus qu'il nomme les Schtroumpfs et qui lui vaudront le succès planétaire.

En 1960, Peyo imagine Benoît Brisefer, un petit garçon doté d'une force extraordinaire. Initialement conçu pour le journal Le Soir, le personnage va tellement plaire à l'éditeur Charles Dupuis qu'il l'intègre tout de suite au sein même de Spirou ; la première histoire à être publiée étant Les Taxis Rouges. Débordé par le travail, Peyo recrute d'ailleurs, spécialement pour elle, Will, dessinateur de Tif et Tondu, comme assistant et le met en charge d'en dessiner les décors. La série fait ainsi son apparition dans le journal de Spirou n°1183 du 15 décembre 1960 ; elle connaît rapidement un grand succès qui autorise Les Taxis Rouges à accéder à une sortie en album dès 1962.

Si la BD est une pépite, son adaptation en film est une véritable catastrophe doublée d'une réelle injustice. Car, au contraire de Alexandre Charlot et Franck Magnier qui ont porté à l'écran, en 2013, l'hérétique Boule & Bill, le réalisateur Manuel Pradal a, lui, choisi pour son film de rester collé à l'album. Trop sans doute. Peyo était, il est vrai, un formidable conteur : sa BD, Les Taxis Rouges, est en ce sens une petite merveille de charme désuet ancrée dans son époque, le début des années 60. Mais voilà, il s'agit là d'une période naïve et bienveillante pour tout ce qui concernait les publications "jeunesse". Or, le problème non vu par le réalisateur et ses producteurs, c'est qu'à la différence des Schtroumpfs que les jeunes d'aujourd'hui lisent encore et de Johan et Pirlouit qui reste son chef d'œuvre aux yeux des adultes, Benoît Brisefer est une BD datée et nostalgique d'un autre temps. En voulant sans doute trop bien faire en respectant littéralement le matériel de Peyo, le réalisateur sert un film d'une niaiserie incroyable qui, au final, dessert l'œuvre qu'il est censé soutenir.

Pire, tout fait ici bon marché, à commencer par l'interminable générique de début sur fond noir, mais aussi les effets spéciaux mal maitrisés sans oublier le choix d'aller tourner au Portugal en ne restituant pas du tout l'atmosphère d'une ville française. Et que dire de la pauvreté des dialogues et du rythme narratif des scènes, qui, toutes copiées / collées de la bande dessinée, sonnent à l'écran creuses, téléphonées et bêtifiantes alors qu'elles sont charmantes, nostalgiques et bienveillantes dans l'album. Il faut dire que le casting n'aide pas à infléchir le sentiment de naufrage complet. Leopold Huet qui campe Benoît est d'abord tout bonnement insupportable tant il surjoue toutes ses scènes avec, en plus, de temps en temps, un rire qui tape immédiatement sur les nerfs. Gérard Jugnot, qui endosse le personnage de Jules Dussiflard, en fait lui aussi des tonnes dans le côté « bon citoyen » et n'est finalement jamais vraiment sympathique. Thierry Lhermitte, quant à lui, fait de la figuration inutile quand Evelyne Buyle, décidément peu inspirée, assume une Madame Adolphine dont la présence est le seul écart par rapport à la BD originelle, elle qui n'apparait que dans le deuxième album et qui n'est, dans tous les cas, aucunement la tutrice du petit Benoît ! Autour d'eux, pas un personnage secondaire adulte ne parvient à sortir du lot : tous livrent un numéro inepte comme s'ils s'adressaient à des gamins de moins de 5 ans. En fait, le seul acteur qui tire véritablement son épingle du jeu en ne rendant pas son rôle trop enfantin est peut-être Jean Reno dans une interprétation de Poilonez qui donne au méchant une belle présence.

Sentant le ratage industriel, Disney France a préféré limiter les frais en n'accordant aucune promotion au film et ne le montrant ni à la presse et ni aux sites comme Chronique Disney avant sa sortie. Le résultat est à la hauteur du naufrage pressenti : Benoît Brisefer - Les Taxis Rouges passe totalement inaperçu en salles avec à peine 7 000 entrées en France le premier jour de sa sortie, un score que fait un gros blockbuster sur la seule séance de 14h à Paris.

Paradoxe suprême, Benoît Brisefer - Les Taxis Rouges se plante lamentablement en voulant bien faire et rester fidèle à la case près à la bande dessinée originelle. Mais voilà, l'enfer est pavé de bonnes intentions : l'idée même d'adapter Benoît Brisefer au cinéma est une grossière erreur. Tous les indicateurs étaient pourtant au rouge pour les vrais connaisseurs de l'œuvre de Peyo : le personnage est inconnu du grand public, il évolue dans un monde désuet et sa profonde nature candide peut vite se transformer en une niaiserie incommensurable. Qu'il reste où il peut vivre : en bande dessinée et uniquement là !

Benoît Brisefer - Les Taxis Rouges est un navet de plus au catalogue tricolore de Disney France mais doublé celui-là d'un accident industriel : un bien triste statut que celui-là.

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