Titre original :
The Night House
Production :
Anton
Phantom Four Films
TSG Entertainment
Date de sortie USA :
Le 20 août 2021
Le 24 janvier 2020 (Festival de Sundance)
Distribution :
Searchlight Pictures
Genre :
Horreur
Réalisation :
David Bruckner
Musique :
Ben Lovett
Durée :
110 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Professeur de littérature dans un lycée de la région de New York, Beth voit sa vie totalement bouleversée après le suicide inexpliqué de son mari adoré, Owen. Désormais seule dans la maison que ce dernier avait bâtie spécialement pour eux sur le bord d’un lac, elle tente alors de retrouver au plus vite une vie normale avec l’aide de sa collègue et meilleure amie Claire. Mais bientôt, des phénomènes étranges surviennent durant la nuit...

La critique

rédigée par
Publiée le 25 septembre 2021

Quelques notes de piano... Une barque flotte sur l’eau ondoyante d’un lac... Sur le rivage, une superbe demeure nichée au cœur d’une forêt calme... À l’intérieur, des photos révèlent une vie de couple radieuse... Deux ombres se présentent à la porte... L’une d’elles est celle de Beth, vêtue de noire. La vie de rêve est en réalité devenue un cauchemar depuis qu’Owen s’est tiré une balle dans la bouche. Tout de suite, le spectateur, sans rien savoir des tenants et aboutissants du film, est plongé dans l’ambiance mystérieuse de La Proie d'une Ombre.

Aux manettes de ce thriller d’épouvante, le réalisateur, producteur et scénariste David Bruckner n’en est pas à son premier coup d’essai. Né à la fin des années 1970, celui qui a grandi à Atlanta s’est fait une spécialité des films d’horreur. Sur les bancs de l’université de Géorgie, il livre ainsi dès 2007 The Signal, une fiction meurtrière produite par Studio Canal écrite avec deux camarades de classe, A. J. Bowen et Jacob Gentry, et le concours de Dan Bush. Suit le film à sketches horrifiques V/H/S dans lequel réalisateur dirige la séquence Amateur Night (2012). Chargé par Paramount de relancer la franchise Vendredi 13 avec un reboot qui ne verra finalement pas le jour, il écrit et réalise ensuite The Accident, l’un des cinq segments d’un second film à sketches d’horreur, Southbound, présenté lors du festival international du film de Toronto en 2015. Deux ans plus tard, David Bruckner met en scène son premier long-métrage en solo, Le Rituel, l’adaptation d’un roman d’Adam Nevill avec Rafe Spall, Arsher Ali et Rob James-Collier acquise et diffusée par la plate-forme Netflix. La Proie d'une Ombre est alors son premier long-métrage diffusé mondialement au cinéma après une présentation au festival de Sundance en 2020.

Distribué par Searchlight Pictures, une filiale de 20th Century Studios acquise par The Walt Disney Company en mars 2019, La Proie d'une Ombre est signé par le duo de scénariste Ben Collins et Luke Piotrowski. Tous les deux s’intéressent alors à la mort, au deuil et à la reconstruction de soi, des thèmes souvent exploités au cinéma, notamment au cours des dernières décennies dans des films comme Ghost (1990), Au-Delà de Nos Rêves (1998), Sixième Sens (1999), Lovely Bones (2009) ou bien encore A Ghost Story (2017). Réalisé par David Bruckner, épaulé par le directeur artistique Joshua Dobkin et le directeur de la photographie Elisha Christian, La Proie d'une Ombre peut ainsi passer auprès du spectateur pour un énième opus sur l’au-delà avec des séquences fantomatiques déjà vues et revues sur grand écran...

Filmé au cours du mois de mai 2019 à Syracuse, dans l’État de New York, avec un budget de douze millions de dollars, La Proie d'une Ombre offre cependant beaucoup d’attraits. Le premier, et pas des moindres, est l’interprétation sans faille de son actrice principale, Rebecca Hall, qui livre une prestation remarquable. Fille du réalisateur Peter Hall née le 3 mai 1982 à Londres, la comédienne débute à la télévision dès 1992 puis sur les planches de l’université de Cambridge. Lançant sa carrière professionnelle en 2002, elle fait notamment sensation dans Mrs Warren’s Profession puis dans Comme il Vous Plaira, deux productions de son père montées au Strand Theatre de Londres. Membre de la Peter Hall Company, elle joue au cinéma dès 2006 dans Starter for 10 puis dans Le Prestige et Vicky Cristina Barcelona qui lui vaut une nomination au Golden Globe de la Meilleure actrice. Elle enrichit ensuite sa filmographie avec des longs-métrages comme Frost/Nixon, l’Heure de Vérité, Le Portrait de Dorian Gray, La Beauté du Geste, The Town, Iron Man 3, The Gift, Le BGG - Le Bon Gros Géant et Un Jour de Pluie à New York. Elle réalise son premier film, Passing, en 2020.

À n’en pas douter, Rebecca Hall est le principal point fort de La Proie d'une Ombre. Veuve effondrée par la mort soudaine de son mari adoré, elle offre en effet à son personnage une composition saisissante alternant entre tristesse, désespoir, ironie, courage et une force de caractère notable. Le spectateur se prendra dès lors rapidement d’affection pour celle qui pensait jusqu’ici vivre une vie ordinaire avec son mari et qui, à force de remuer le passé, se retrouve face à ses terribles secrets laissés derrière lui. La performance de Rebecca Hall est d’ailleurs d’autant plus à saluer que tous les autres personnages du film, de la meilleure amie (Sarah Golberg) au voisin amical (Vondie Curtis-Hall), en passant par l’employée de librairie suspecte (Stacy Martin), semblent plus cantonnés à de la simple figuration qu’à un rôle vraiment marquant. À noter également la participation au casting du comédien Evan Jonigkeit qui, dans la peau du mari, ne fait lui-même pas plus d’ombre à l’actrice principale.

La seconde qualité de La Proie d'une Ombre est sa mise en scène particulièrement élégante. Bien qu’il s’agisse d’un film alternant entre thriller et horreur, le réalisateur David Bruckner évite en effet de sombrer dans les poncifs du genre. Le sang ne coule pas à flot. La terreur n’est pas montrée crument. Quelques « jump scares » permettent aux spectateurs de sursauter à deux ou trois reprises, mais guère plus pour ne pas abuser du procédé. Appuyées par la musique de Ben Lovett et le montage de David Marks, les visions de Beth sont quant à elles habilement disséminées çà et là. La temporalité des événements est astucieusement brouillée, à tel point qu’entre le jour et la nuit, le beau temps et la pluie, et des saisons peu définies, le spectateur aura, comme le personnage principal, du mal à savoir où il en est. L’enfumage est d’ailleurs d’autant plus renforcé que Beth se laisse tenter par quelques verres de brandy. Dès lors, la question se pose de savoir si ses visions sont réelles ou bien si elles découlent tout simplement de quelques abus d’alcool. Au final, entre parquets qui grincent, portes qui s’ouvrent toutes seules et ombres menaçantes intelligemment placées dans les décors conçus par Kathrin Eder, David Bruckner offre une belle vision de la maison hantée, elle aussi tant de fois montrée au cinéma.

Là où La Proie d'une Ombre risque cependant d’en laisser plus d’un sceptique, c’est sur son message. Qu’il soit habitué ou non aux films du genre, le spectateur risque en effet de sortir de la salle en se demandant tout simplement à quoi tout cela rime... Car si le long-métrage commence fort, le script s’essouffle rapidement. Rythmé et plein de suspense, le récit devient dans sa seconde moitié bavard et surtout très lent avant un dénouement trop vite expédié et une morale absolument inexpliquée. Bien sûr, beaucoup seront contents de pouvoir se faire leur propre interprétation et de se forger leur propre avis sur cette histoire de mort et de deuil. Mais d’autres sortiront frustrés dès lors que les tenants et les aboutissants sont difficilement perceptibles.

Les secrets laissés derrière le mari, tous emprunts de mysticisme, demeurent en particulier pour certains totalement inexpliqués. À quoi peut bien servir, notamment, la mention du caerdroia, un motif de labyrinthe évoqué dans l’histoire ? La maison inversée, pourtant bien mise en avant dans la bande-annonce, semble elle-même finalement très anecdotique. Bien que des réponses soient données, certaines énigmes et certaines révélations retombent malheureusement comme un soufflé. La fin manque cruellement de panache et nombreux sont les spectateurs qui auront du mal à apprécier l’intérêt de l’intrigue et à comprendre le but de l’ensemble.

Projeté le 24 janvier 2020 au festival de Sundance avant une sortie aux États-Unis repoussée le 20 août 2021 à cause de la pandémie de Covid-19, La Proie d'une Ombre sort en France le 15 septembre 2021. Affublé d’un titre francisé totalement inconsistant destiné à remplacer l’original, The Night House, déjà plus cohérent, le long-métrage reçoit des critiques globalement positives outre-Atlantique, les journalistes encensant en particulier le jeu de Rebecca Hall. La presse, notamment The Hollywood Reporter, regrette toutefois une intrigue parfois « trop embrouillée ». En France, où le film est présenté au Festival de Deauville, la presse est elle aussi partagée. Le Nouvel Observateur résume bien l’avis général en parlant d’un « thriller élégant [...] gâché par le dernier quart d’heure grand-guignolesque ». Le Parisien regrette un « dénouement pas à la hauteur des attentes » et une conclusion « bizarre et expédiée »...

Bien que porté par le jeu sans faille de Rebecca Hall et la mise en scène élégante de David Bruckner, La Proie d'une Ombre est au final un thriller horrifique bancal dont la conclusion, maladroite, laissera plus d’un spectateur perplexe. Dommage...

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