Les Gardiens de la Galaxie
Volume 3

Titre original :
Guardians of the Galaxy - Volume 3
Production :
Marvel Studios
Date de sortie USA :
Le 05 mai 2023
Genre :
Science-fiction
IMAX
3-D
Réalisation :
James Gunn
Musique :
John Murphy
Durée :
150 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Il y a quelques années, Rocket s'est attiré les foudres d'Ayesha, la Grande Prêtresse Dorée des Souverains, après avoir volé des batteries avec l'intention de les revendre. L'arrogante altesse a alors juré de se venger une bonne fois pour toutes du rongeur et de ses compagnons. Sur Knowhere, les Gardiens n'ont aucune idée de ce qu'il se trame. Après avoir voyagé avec Thor et rencontré Kevin Bacon, ils s'efforcent désormais de protéger les opprimés tout en veillant sur Peter Quill, toujours très affecté par la disparition de Gamora. Quand ils s'y attendent le moins, les Gardiens sont attaqués par un dieu doré à la puissance sans limites. Adam Warlock, la création d'Ayesha, vient réclamer vengeance. Les trublions de Knowhere réchappent de peu au massacre, mais Rocket est sérieusement blessé dans la bataille. Les Gardiens vont devoir sillonner les étoiles pour sauver l'un des leurs, mais le temps presse....

La critique

rédigée par
Publiée le 14 mai 2023

Les Gardiens de la Galaxie n'ont pas chômé depuis leur dernière grande aventure solo ; les héros de l'espace (et leurs Variants multiversels) sont apparus dans pas moins de six projets différents depuis 2017, de quoi ravir les spectateurs attachés à ces losers au grand cœur. En réalité, la troisième épopée des Gardiens aurait dû débarquer beaucoup plus tôt sur les écrans. Pressenti pour intégrer – voire même ouvrir – la Phase 4 du MCU, Les Gardiens de la Galaxie - Volume 3 s'est fait attendre, la faute à une gestion de crise calamiteuse de la part de Disney qui s'en mordra les doigts plus tard. Il aura donc fallu patienter six ans pour découvrir cette nouvelle aventure de la famille cosmique, mais l'attente en valait la peine. Plus mature, plus grand, plus sombre aussi ; avec Les Gardiens de la Galaxie - Volume 3, James Gunn rend hommage pour la dernière fois à ces personnages qu'il aime d'un amour sincère.

Tout va toujours très vite chez Marvel. En 2016 déjà, Kevin Feige, le grand manitou de Marvel Studios, laisse entendre que l'avenir des Gardiens de la Galaxie est tout tracé. L'année suivante, c'est James Gunn, scénariste et réalisateur des (Les) Gardiens de la Galaxie premier du nom et de sa suite, qui rassure à son tour les fans : « Sauf si les choses tournent horriblement mal – ce qui est toujours possible, on ne sait jamais – je pense que Marvel voudrait faire un troisième film » (Yahoo!Entertainment). Et les choses vont effectivement très mal se passer pour le réalisateur ébouriffé ; Gunn ne le sait pas encore, mais Disney va bientôt le licencier sans autre forme de procès, en mettant du même coup un sérieux coup de frein au développement du projet.
Mais pour l'heure, tout va bien chez Marvel Studios. Après avoir hésité un moment, James Gunn annonce qu'il sera bel et bien le réalisateur du troisième volet et qu'il compte se lancer à corps perdu dans le projet prochainement, juste après avoir terminé son travail de consultant sur Avengers : Infinity War. Animé d'un profond respect pour ses personnages décalés, Gunn semblait même destiné à œuvrer sur le développement du pan cosmique du MCU. Début 2018, la première version du scénario est achevée, tandis que le film trouve, en interne, une date de sortie : le 1er mai 2020. C'était sans compter sur le piège dans lequel Disney s'apprête à sauter à pieds joints.

Durant l'été 2018, Mike Cernovich, un commentateur politique et complotiste à ses heures perdues, va précipiter la chute de James Gunn. Après s'être forgé une petite réputation sur internet grâce à la rédaction de pamphlets anti-féministes et des attaques répétées contre les Démocrates américains, Cernovich s'en prend désormais aux grandes corporations qu'il juge trop « wokes », bien que le terme n'ait, à l'époque, pas encore été récupéré politiquement. Le 19 juillet 2018, Cernovich a exhumé de vieux tweets de James Gunn, lesquels sont, il faut l'avouer, de très mauvais goût. Pour ne rien arranger, Gunn s'est montré très critique envers Donald Trump, lequel était alors farouchement défendu par Cernovich et une large partie de la droite ultra-conservatrice. Il n'en fallait pas plus ; les tweets ont commencé à circuler sur les réseaux sociaux dans les cercles républicains. Dans la foulée, Disney décide du licenciement immédiat du réalisateur, malgré des excuses publiques. Les grands pontes de Disney, et tout particulièrement Alan Horn, jugent inacceptable les vieux messages du réalisateur, arguant que ceux-ci ne correspondent en rien aux valeurs que la société entend défendre. Disney, parfois engoncé dans ses propres carcans – il suffit de voir avec quelle facilité la société a censuré le mythique Picsou de Don Rosa –, a fait le jeu de l'extrême-droite sur ce coup, laquelle se régale d'avoir mis dans l'embarras le plus gros monstre progressiste d'Hollywood.

Coup de théâtre en mars 2019, James Gunn est invité à rentrer au bercail. Le réalisateur a su montrer patte blanche, mais la grogne grandissante des principaux acteurs de la saga et l'obstination des fans Marvel sur les réseaux sociaux ne sont pas étrangères au retour en grâce du bonhomme. À cela, il faut aussi ajouter des histoires de gros sous, l'appui de Kevin Feige et les remords probables de Disney qui a chassé l'un de ses réalisateurs phares, lequel s'est entre-temps laissé courtiser par le rival de Marvel : DC Studios. Après s'être vu offert la chance d'écrire et de réaliser The Suicide Squad, James Gunn retourne chez Disney et reprend ses projets là où il les avait laissés, dans une période fortement chamboulée par la pandémie de COVID-19. Mais la Distinguée Concurrence ne compte pas laisser filer le réalisateur ; en 2022, DC Studios engage Gunn en qualité de co-PDG avec Peter Safran. Le divorce est définitivement consommé entre James Gunn et Disney, Mickey ayant perdu dans la bataille l'un de ses meilleurs auteurs.

L'histoire des (Les) Gardiens de la Galaxie - Volume 3 offre une pause bienvenue aux spectateurs en plein cœur de la Saga du Multivers. Après le désagréable Ant-Man et la Guêpe : Quantumania, qui avait tout juste le mérite de présenter avec succès le nouveau grand méchant des prochaines phases, Marvel revient à une histoire beaucoup plus simple et contenue. Pas question de se perdre inutilement en parlant de la menace imminente, d'arpenter le Multivers ou de se noyer sous le baratin science-fictionnesque que le film précédent a régurgité péniblement pendant deux heures ; l'important ici, ce sont les héros et leur ultime réunion de famille.
Après avoir participé à sauver l'univers dans Avengers : Endgame et traversé les étoiles en compagnie du clown divin de Thor : Love and Thunder, les Gardiens se sont établis sur Knowhere, qu'ils ont racheté au Collectionneur. Là, les trublions de l'espace ont accueilli dans leur équipe la chienne Cosmo avant de faire un crochet par la Terre pour capturer Kevin Bacon en vue de l'offrir à Quill pour Noël dans Les Gardiens de la Galaxie : Joyeuses Fêtes. La star de Footloose est bien rentrée au bercail après ses petites vacances extra-terrestres, mais Peter Quill n'arrive toujours pas à se sortir de la dépression dans laquelle il s'est enfoncé depuis la mort de Gamora. Il ne se rend donc pas compte – pas plus que son équipage, d'ailleurs –, qu'une menace dorée s'apprête à détruire tout ce qu'ils se sont efforcés de bâtir...

Son prénom était susurré par la Grande Prêtresse des Souverains devant l'emblématique cocon à la fin des (Les) Gardiens de la Galaxie Vol. 2, et le voici enfin en chair et en or dans le MCU ! Adam Warlock, l'un des personnages cosmiques les plus importants de l'écurie Marvel, a une histoire éditoriale pour le moins alambiquée. Apparu en 1967 dans Fantastic Four #66-67 sous l'impulsion des légendaires Jack Kirby et Stan Lee, le personnage va créer des tensions entre les deux génies des comics. En vérité, Jack Kirby désirait glisser dans son comic book un pied de nez à la doctrine Objectiviste, une philosophie qui a marqué Steve Ditko, l'un des pères fondateurs de Spider-Man, et qui prône entre autres un certain égoïsme rationnel. Kirby commence donc à imaginer ce qu'il se passerait si un groupe de scientifiques bien intentionnés donnait naissance à un homme parfait selon les principes de l'Objectivisme. Sitôt sorti de son cocon, le personnage, qui est simplement appelé « Lui », assassine ses pères pétris d'imperfection. Refroidi par l'histoire, Stan Lee n'a aucune envie de la publier en l'état et s'arrange donc avec les dialogues. Pour lui, un récit doit avoir des méchants clairs et établis ; sous sa plume, les pères d'Adam se métamorphosent donc en scientifiques cruels dont l'ambition est de dominer le monde, donnant une explication rationnelle (mais plus simpliste) au geste d'Adam. Kurt Busiek, une autre légende des comics, résume finalement la situation en quelques mots : « Le "Lui" de Kirby était un monstre ; celui de Lee était un saint ».

Cette notion de sainteté qu'évoque si justement Kurt Busiek va coller à la peau du personnage. À ce titre, sa rencontre avec le Maître de l'Évolution, une autre création de Stan Lee et Jack Kirby (The Mighty Thor #134, 1966), est déterminante. Inspiré par les travaux de Nathaniel Essex, que les fans des Mutants connaissent sous le nom de Mr Sinistre, le jeune Herbert Wyndham est à l'origine un scientifique spécialisé dans la génétique. Après s'être installé au Mont Wundagore, un lieu hautement symbolique pour les jumeaux Maximoff, Wyndham adopte le surnom du Maître de l'Évolution et se lance à corps perdu dans son art, sans vraiment se soucier des questions éthiques. Expérimentant sans relâche sur les animaux, le scientifique fou dote ses créations de caractéristiques humanoïdes ; une nouvelle race est née avec, parmi eux, le perfide Homme-Bête qui va donner du fil à retordre à son créateur et surtout à Adam Warlock dont il devient le premier ennemi-juré.

Sous la coupe de Roy Thomas et Gil Kane en 1972, le Maître de l'Évolution et Adam Warlock vont nouer une profonde relation. Grâce au duo d'artistes, les deux personnages évoluent beaucoup, au point de devenir d'évidentes allégories religieuses. Écœuré par la corruption des Hommes, le Maître de l'Évolution a vogué à travers les étoiles pour accomplir son ultime dessein : créer de toute pièce une planète gouvernée par la paix, une Terre où la violence n'empêchera pas ses habitants d'accéder au prochain stade de l'évolution. Adam Warlock, toujours connu sous le nom de « Lui », assiste à ce miracle. À partir d'un petit morceau de la planète originelle, le Maître de l'Évolution donne naissance à la Contre-Terre de l'autre côté du soleil. Fier de son Jardin d'Éden, le vilain tombe de fatigue, mais il n'a pas anticipé l'arrivée de l'Homme-Bête, son mortel ennemi qui profite de l'occasion pour semer la corruption dans le cœur des habitants de la Contre-Terre. À deux doigts d'annihiler sa création, le Maître de l'Évolution est stoppé par Adam Warlock qui lui offre une alternative : il sera le Messie envoyé sur la Contre-Terre pour libérer les Hommes du joug de la violence et de la haine. Avant de laisser partir celui qu'il appelle désormais son fils sauver ce monde en décrépitude, le dieu de la science confie au héros doré la Gemme de l'Âme et lui octroie un nom, le Warlock. À son arrivée sur la Contre-Terre, Warlock fait la connaissance d'un groupe d'adolescents qui lui trouvent un prénom, Adam, au cas où la métaphore religieuse n'était pas assez claire. Ce Jésus de l'espace – qui mourra d'une crucifixion avant de renaître –, connaîtra ensuite quelques aventures, mais c'est sous la plume de Jim Starlin qu'Adam Warlock exprimera enfin tout son potentiel, devenant le héros que les lecteurs connaissent aujourd'hui. Le créateur de Thanos conservera bien la métaphore religieuse, mais il le fera de façon beaucoup plus nuancée et intéressante.

Pour James Gunn, pas question de faire du Maître de l'Évolution un personnage torturé, un scientifique dont le jugement est aveuglé par l'amour de son art et ses idéaux comme il a parfois pu être dépeint dans les comics. Non, le réalisateur veut faire du grand méchant un tortionnaire, un être cruel et sadique sans aucune qualité rédemptrice. C'est à Chukwudi Iwuji (Designated Survivor, Peacemaker) que revient la tâche d'incarner ce personnage assez différent des vilains présentés dans le MCU auparavant. Contrairement à un Namor, un Killmonger ou même un Thanos, dont les motivations pouvaient parfois être comprises des spectateurs, le Maître de l'Évolution à la sauce Gunn est un vilain détestable d'un bout à l'autre du film. Et cela fait un bien fou, car bien rares sont les méchants Marvel capables de provoquer une réaction aussi épidermique chez le spectateur. Le traitement de ce nouveau vilain est d'autant plus important que, comme James Gunn l'a promis, Les Gardiens de la Galaxie - Volume 3 est pour les spectateurs la toute dernière occasion de voir en action cette itération précise de l'équipe. Il fallait donc offrir au gang de bras cassés un vilain mémorable, surtout après le menaçant Ego. Le pari est réussi, mais le jeu de Chukwudi Iwuji y est pour beaucoup : l'acteur est charismatique à souhait et rend son personnage souvent charmant, mais son sourire et sa voix douce s'étiolent progressivement pour laisser entrevoir un être terrifiant.

Adam Warlock est, de son côté, peut-être un peu moins chanceux. Plutôt que de se baser sur une version moderne du héros doré, James Gunn a préféré revenir à la source, à la toute fin des années 60, quand le Warlock de Stan Lee et Jack Kirby était encore un canevas vierge. Dame Sif, qui le rencontre peu après sa naissance, laisse à l'époque échapper un commentaire lourd de sens : « Il agit comme un enfant » (The Mighty Thor #165). James Gunn trouve donc ici l'occasion idéale d'étaler son humour absurde, en dotant un être très enfantin de pouvoirs phénoménaux. Néanmoins, la toute-puissance du personnage force le réalisateur à utiliser Warlock avec beaucoup de parcimonie, les Gardiens n'étant pas en mesure de survivre à des assauts répétés. Fatalement, Adam est relégué au second plan durant une large partie du film et apparaît sous-utilisé, Quill et sa bande ayant déjà fort à faire ailleurs. Le potentiel d'Adam n'est pas pour autant gâché ; forcé de se débrouiller seul pour développer sa boussole morale, le personnage est mieux introduit dans le MCU que certains des derniers arrivants qui se sont pour l'instant révélés insipides. Will Poulter (Le Monde de Narnia : L'Odyssée du Passeur d'Aurore, Dopesick) incarne le personnage tel qu'imaginé par Gunn avec un excellent sens de la comédie.

À l'évidence, James Gunn ne pouvait pas passer à côté des allégories religieuses, philosophiques et scientifiques qui exsudent des comics de ces deux personnages depuis plus de cinquante ans. Le mégalomane Maître de l'Évolution, le représentant de la sacro-sainte science comme seul moyen de répondre à la défaillance des hommes, se meut donc en une figure divine à même d'annihiler ses créations quand bon lui semble. La perfection ou rien, effacer puis tout recommencer. Les formes de vies qu'il juge inférieures n'ont qu'un seul but pour le vilain : servir le progrès et l'ascension vers l'excellence. Forcément, le sujet des "freaks", des gueules cassées et des personnages en miettes tient une place à part dans le cinéma de Gunn, qui fait de son film un pamphlet en faveur de la différence et de l'acceptation de soi. Ces thèmes de l'imperfection et de la valeur d'une vie jalonnent le film à travers le parcours de Rocket, l'une des créations du Maître de l'Évolution. Et il convient d'avoir le cœur bien accroché tant James Gunn ne fait aucune concession lorsqu'il aborde les dérives de la science et de la maltraitance animale. Lui-même amoureux des bêtes à poils et à plumes, le réalisateur embarque les spectateurs dans une aventure constellée de flashback dont l'intensité monte toujours crescendo. Rien n'est épargné aux voyageurs, si bien qu'il est très difficile de ne pas verser quelques larmes face à l'abominable cruauté que déploie le Maître de l'Évolution pour servir son art, lequel résonne comme un douloureux écho à la manière dont les humains traitent encore aujourd'hui les animaux en laboratoire ou à des fins de divertissement.

Rocket est donc le moteur de l'action dans Les Gardiens de la Galaxie - Volume 3, mais aussi plus largement de la saga dans son entièreté comme l'a dévoilé James Gunn juste avant la sortie du film ; pour le réalisateur, le raton laveur est le personnage principal de la franchise cosmique, celui auquel il s'identifie le plus. Toujours incarné vocalement par Bradley Cooper, avec le renfort de Sean Gunn et Noah Raskin, Rocket est sublimé par l'écriture de Gunn dans ce troisième opus. Rarement un personnage chez Marvel n'aura réussi à faire passer le spectateur par une telle gamme d'émotions, et encore moins dans un seul et même film. L'histoire de Rocket n'a pourtant pas toujours été si sombre ; lorsque son origine est racontée par Bill Mantlo dans les années 80, l'univers de Rocket est coloré et fun, presque cartoonesque – exception faite des clowns tueurs. Avec les années, les auteurs se sont succédés sur le personnage pour assombrir progressivement son histoire et ses relations avec les autres animaux, comme son amoureuse Lylla la loutre, son ami Wal Rus le morse et son rival, le lapin Blackjack O'Hare. James Gunn, grand fan de comics, va piocher minutieusement dans toutes ces différentes versions pour redéfinir Rocket et les personnages qui l'ont accompagné, jusqu'à livrer ce qui s'apparente à la version définitive du raton laveur grincheux, celle qui ne saurait être surpassée. Le scénariste et réalisateur lie d'ailleurs de manière très élégante les personnages de Rocket et du Maître de l'Évolution, lesquels n'ont à peu près rien en commun dans le matériau d'origine.

Les autres membres des Gardiens ne sont pas en reste. Chris Pratt, qui semblait un peu sur la retenue dans Les Gardiens de la Galaxie : Joyeuses Fêtes, retrouve des couleurs dans ce troisième opus sous les traits de Peter Quill, flirtant entre les scènes lourdes qu'il dirige très bien et les francs moments de déconnade qui l'accompagnent depuis neuf ans. Brisé après la mort de Gamora, le ranger de la galaxie n'a jamais dépassé sa peine et se noie aujourd'hui dans l'alcool pour apaiser la douleur, inconscient du danger qui menace sa famille d'adoption.
Si James Gunn a songé un temps à tuer Gamora dans Les Gardiens de la Galaxie Vol. 2 avant de se raviser, les scénaristes Christopher Markus et Stephen McFeely, eux, n'ont pas hésité à la sacrifier aux mains de Thanos dans Avengers : Infinity War. Ramenée dans Avengers : Endgame – sous la forme d'une Variante débarquée de l'année 2014 –, cette « nouvelle » Gamora, toujours campée par l'excellente Zoe Saldaña, réussit très bien à se démarquer, aidée en cela de l'écriture de James Gunn. Hors de question de faire oublier aux spectateurs qu'il s'agit ici d'une version différente du personnage qui n'a aucune envie de papillonner avec Peter. Plus agressive et impitoyable que jamais, la jeune femme, qui s'est forgée une famille chez les Ravageurs, se retrouve donc bien malgré elle embarquée dans cette nouvelle aventure avec des compagnons d'infortune certes exaspérants, mais chez qui elle trouve un écho de ses propres fêlures.

Drax (Dave Bautista) et Mantis (Pom Klementieff) reprennent eux aussi du service après leur petit voyage sur Terre à la rencontre de Kevin Bacon. Engagés dans une éternelle rivalité, les deux amis viennent ponctuer de petites touches d'humour un film autrement très sombre, mais James Gunn ne néglige pas de leur offrir un peu plus de profondeur ; Pom Klementieff se montre d'ailleurs bouleversante durant les grandes scènes d'émotion. Il en va de même pour l'autrefois impassible Nebula (Karen Gillan). Pleinement intégrée dans sa nouvelle famille d'adoption, la fille de Thanos a l'occasion de prouver à de multiples reprises sa loyauté et son héroïsme même dans les situations désespérées. Les améliorations de ses pièces cybernétiques apportées par Rocket permettent en plus de cela d'apporter des choses très intéressantes à l'écran. Groot (Vin Diesel) se rapproche quant à lui de plus en plus d'un Kaiju japonais même s'il reste, comme Kraglin (Sean Gunn) et Cosmo (Maria Bakalova), un peu en retrait, histoire de ne pas surcharger un film qui grouille déjà de personnages. Cela n'empêche pas chacun des héros de trouver sa place au sein des quelque deux heures trente que dure le film, et tous sans exception ont l'occasion de briller.
En réalité, Les Gardiens de la Galaxie - Volume 3 réussit là où Thor : Love and Thunder s'est magistralement planté ; le film du clown du Tonnerre savait proposer lui aussi quelques belles séquences d'émotion, mais elles étaient prises en sandwich entre deux tranches d'humour tellement grasses que le résultat final en devenait indigeste. Tout l'inverse de James Gunn donc, qui maîtrise parfaitement la pluralité de tons au sein de son film, une réussite qui ne peut que donner confiance quant à son futur travail à la tête de l'univers DC.

Techniquement, Les Gardiens de la Galaxie - Volume 3 est le plus joli film du MCU depuis Les Éternels, lequel avait su profiter de sublimes décors naturels sous l'impulsion de Chloé Zhao. Ragaillardi par ses expériences sur les deux précédents volumes ainsi que sur The Suicide Squad, James Gunn a milité pour utiliser au maximum les effets pratiques, les maquillages et les prothèses, et le résultat est sans appel, puisque les personnages aliens sont plus beaux et crédibles que jamais. La réussite du film tient aussi dans la qualité globale de ses effets spéciaux, bien supérieure à quantité de productions précédentes, et surtout l'infâme Ant-Man et la Guêpe : Quantumania et sa bouillie de pixels bruns. En cause, peut-être, l'absence de la technologie StageCraft, développée par Industrial Light and Magic et qui a servi avec brio dans Star Wars : The Mandalorian et The Batman, mais qui a depuis été bien mal utilisée par Marvel dans Thor : Love and Thunder et le troisième volet d'Ant-Man. Cette réussite tient aussi à la vision claire de James Gunn, le réalisateur ayant à cœur de respecter tous les artistes à l'œuvre sur son film, y compris les magiciens des effets visuels. Tout l'inverse de Marvel Studios durant l'ère Bob Chapek, en somme. Reste à voir maintenant si les promesses de Bob Iger sauront tenir dans le temps, et si les artistes disposeront enfin du temps nécessaire pour proposer des univers de plus en plus soignés, à commencer par Secret Invasion et The Marvels. Les Gardiens de la Galaxie - Volume 3 dispose enfin d'une photo de qualité et de folles séquences d'action bien filmées et dynamiques qui se démarquent des productions précédentes ; une scène en faux plan-séquence dans un long corridor permet par exemple de proposer un affrontement qui restera longuement dans la tête des spectateurs.

Et puisqu'un film des Gardiens de la Galaxie ne serait pas complet sans musique, James Gunn ne s'est pas privé de ressortir quelques titres de derrière les fagots pour accompagner l'ultime aventure des héros du cosmos. Après la playlist moins mémorable des (Les) Gardiens de la Galaxie : Joyeuses Fêtes, cet Awesome Mix Vol. 3 tend vers l'excellence, d'autant que le Zune qu'a reçu Quill à la fin du second volet permet au réalisateur de sacrément étendre son répertoire. Une version acoustique de Creep (Radiohead) résonne ainsi dès les premières secondes du film, après un logo entièrement dédié aux Gardiens en guise d'au revoir. L'association des héros et de la chanson coule de source, mais elle donne aussi le ton du long-métrage, plus sombre et moins foutraque, l'accent est mis sur les personnages et leur éternelle quête d'appartenance. Dix-sept chansons accompagnent l'action du long-métrage, avec des titres aussi variés que Since You Been Gone du groupe Rainbow, No Sleep Till Brooklyn des Beastie Boys ou encore Dog Days Are Over par Florence + The Machine.

Les Gardiens de la Galaxie - Volume 3 est un bijou précieux au sein du vaste MCU. Plus mature que ses aînés, plus pudique et intime aussi sans pour autant renier l'humour si caractéristique qui a marqué la saga à travers les années, il est une nouvelle déclaration d'amour de Gunn à ces marginaux qu'il affectionne tant et dont son cinéma est rempli. Après avoir sillonné la galaxie et exploré en détail les rapports de Quill à ses origines dans le précédent volet, les losers magnifiques de Marvel s'embarquent cette fois-ci dans leur plus grande aventure, une virée sans compromis à la recherche de l'acceptation de soi. Une partie de la plus belle des familles dysfonctionnelles tire sa révérence dans ce nouveau film, en même temps que James Gunn, qui part voguer vers de nouveaux horizons en laissant les spectateurs le cœur lourd mais rempli de gratitude à la fin de ce très beau voyage.

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