Walt Disney Animation Studios » Projets Avortés

Le Fantôme de Morgan
Donald et le Trésor du Pirate

Titre original :
Morgan's Ghost / Donald Duck Finds Pirate Gold
Production :
Walt Disney Animation Studios
Date de publication USA :
Octobre 1942
Projet :
Animation 2D
Auteur :
Dick Creedon (Le Fantôme de Morgan)
Al Perkins (Le Fantôme de Morgan)
Homer Brightman (Le Fantôme de Morgan)
Harry Reeves (Le Fantôme de Morgan)
Roy Williams (Le Fantôme de Morgan)
Bob Karp (Donald et le Trésor du Pirate)
Illustration :
Jack Hannah
Carl Barks
Publication :
Western Publishing

Le synopsis

Le Fantôme de Morgan

Mickey, Donald et Dingo sont les propriétaires d'une modeste taverne dans un petit village de la Nouvelle Angleterre. Lors d'une terrible nuit d'orage, Bec-Jaune, un perroquet grincheux avec une jambe en bois et un chapeau de pirate, se présente et leur demande une boisson à la salsepareille. Il leur confie qu'il tente d'échapper à Pat Hibulaire qui veut mettre la main sur la carte que le volatile a en sa possession et qui indique l'emplacement du trésor du pirate Henry Morgan. En échange de leur aide, Bec-Jaune propose à Mickey et ses amis de partager le butin. En quête d’un navire et de son équipage, tout ce petit monde tombe sur une vieille dame qui leur vend son bateau avec ses marins. Il s’agit en réalité de Pat Hibulaire déguisé qui parvient avec ses comparses,les rats, à se faire engager. Après bien des péripéties, le malfaisant capture Bec-Jaune, s’empare de sa carte et abandonne Mickey et ses amis sur un radeau de fortune. Heureusement, ces derniers échouent sur l'île du trésor où ils dénichent une malle renfermant les fantômes de Morgan et de son équipage. Avec ses nouveaux alliés, Mickey peut délivrer Bec-Jaune et récupérer la carte. La solution est alors à portée de torse : pour trouver l'or, la carte doit, en effet, être placée sur l'un des tatouages du perroquet…

Donald et le Trésor du Pirate

Donald, Riri, Fifi et Loulou sont les propriétaires d'une modeste taverne au bord de la mer se nommant Au Loup des Mers. Lors d'une terrible nuit d'orage, Bec-Jaune, un perroquet grincheux avec une jambe en bois et un chapeau de pirate, se présente et leur demande une bonne pinte de bouillabaisse. Il leur confie alors qu'il tente d'échapper à Pat Hibulaire qui veut lui faire avouer où se trouve la carte indiquant l'emplacement du trésor du pirate Henry Morgan. Or, le précieux parchemin se trouve en réalité dans l’auberge ! En échange de leur aide, Bec-Jaune propose à Donald et ses neveux de partager le butin. En quête d’un navire et de son équipage, tout ce petit monde tombe sur une vieille dame qui leur vend son bateau et ses marins. Il s’agit en réalité de Pat Hibulaire déguisé qui parvient avec ses comparses, les rats, à se faire engager. Après bien des péripéties, le malfaisant réussit à récupérer la carte et abandonne sur un radeau de fortune Bec-Jaune, Donald, Riri, Fifi et Loulou. Heureusement, ces derniers échouent sur l'île du trésor où ils dénichent une malle renfermant le fantôme de Morgan qui leur redonne la carte qu'il a reprise à Pat Hibulaire. Bec-Jaune avoue alors à Donald et à ses neveux que pour trouver l'or, ils doivent placer la carte, où un bout est manquant, sur l'un de ses tatouages sur le torse. Ainsi, la carte sera complète et le trésor à portée de main...

La critique

rédigée par
Publiée le 21 avril 2016

Le Fantôme de Morgan est l'un des nombreux projets avortés de films d'animation des studios Disney. Mais l'intérêt historique de celui-ci n'est pas le film qu'il aurait pu devenir mais plutôt ce qu'il a inspiré par la suite : le comic book Donald et le Trésor du Pirate qui marque la première histoire longue américaine de Donald sur papier ainsi que les débuts en tant que dessinateur de Carl Barks !
Retour donc sur un pan de l'histoire des studios Disney et de la bande dessinée américaine...

Durant la seconde moitié des années 30, les cartoons regroupant les trois compères Mickey, Donald et Dingo étaient légions et populaires. Parmi les plus célèbres, il peut être cité Les Revenants Solitaires, Nettoyeurs de Pendules, La Remorque de Mickey ou Chasseurs de Baleines. Étonnamment, le trio n'est pas apparu dans un long-métrage avant Mickey et le Haricot Magique, une des séquences de Coquin de Printemps sorti en 1947. Pourtant, ce ne sont pas les envies qui manquaient. Malheureusement, l'entrée en guerre des Etats-Unis en 1941 et la réquisition des studios pour des courts-métrages de propagande ont freiné, voire stoppé, la plupart des projets. Certains longs-métrages comme Peter Pan ou Alice au Pays des Merveilles commencés à la fin des années 30, ont ainsi dû attendre les années 50 pour être finalisés. D'autres sont restés définitivement dans les cartons. Parmi les films de Mickey, Donald et Dingo seul Mickey et le Haricot Magique dont l'étude débute en 1940, se verra aboutir, et encore, pas en long-métrage, mais en moyen-métrage inclus dans un film d'anthologie à la sortie de la guerre.

Parmi tous les films imaginés autour de Mickey, Donald et Dingo, un ressort du lot : Le Fantôme de Morgan. La première trace de l’opus remonte au 21 octobre 1939 quand les scénaristes Dick Creedon et Al Perkins proposent un premier aperçu du projet qui se nommait à l'époque Pieces of Eight or the Three Buccaneers. Dick Creedon est connu pour avoir travaillé sur Blanche Neige et les Sept Nains tandis qu'Al Perkins est remarqué sur Le Dragon Récalcitrant. Dans cette première version, tous les stéréotypes possibles sur les pirates et les chasseurs de trésors sont au rendez-vous. L'histoire s'inspire ainsi beaucoup du roman L'Île au Trésor de Robert Louis Stevenson, qui sera d’ailleurs finalement adapté par les studios Disney dans leur premier film à prises de vues réelles en 1950. Dans le récit de 1939, Pluto est aussi présent en plus de Mickey, Donald et Dingo. En outre, l'île de Morgan s'avère être celle où Robinson Crusoé a échoué et où il vit avec Vendredi.

Durant deux ans, plusieurs artistes dont Homer Brightman, Harry Reeves et Roy Williams vont retravailler le synopsis en le portant sur story-board et le renommant en Morgan's Ghost (Le Fantôme de Morgan). Pas moins de 800 dessins seront produits pour la nouvelle version. Elle évolue nettement : les personnages de Pluto, Robinson Crusoé et Vendredi sont éliminés tandis que les fantômes de Morgan et son équipage sont rajoutés. Deux fins sont même envisagées. Dans la première, Pat et Mickey jouent le trésor dans une sorte de pile ou face et le méchant perd, les héros gagnant ainsi le butin. Dans la seconde version, Pat Hibulaire récupère le trésor et le trio repart dans sa taverne. Sauf qu'un peu plus tard, Donald apporte un journal qui raconte que Pat Hibulaire a été arrêté avec un coffre de fausses pièces. Bec-Jaune leur annonce qu'il vient de se rappeler que l'emplacement qu'ils avaient trouvé été celui d'un trésor factice. Le véritable emplacement est tatoué sur son torse. Furieux d'avoir vécu tant de dangers pour rien, les trois amis jettent alors le perroquet hors de chez eux.

Le trésor de Morgan est basé sur une figure historique : Henry Morgan. Ce dernier naît le 24 janvier 1635 au Pays de Galles et meurt le 23 août 1688 en Jamaïque. Il est un flibustier ayant souvent goûté à la piraterie, ou un des plus célèbres pirates boucaniers ayant souvent accepté des missions de corsaire. Homme violent et sans scrupules, il mène une existence de bandit, volant et tuant sans compter, même si ses expéditions audacieuses, dont la plupart se déroulent sur la terre ferme, en font l'un des capitaines les plus respectés des Caraïbes. Chose notable dans le script du Fantôme de Morgan, le fantôme de Morgan dit la phrase "Dead Men Tell No Tales" qui peut se traduire par "Les hommes morts ne parlent pas". Cette citation sera reprise dans l'attraction qui ouvre en 1967 à Disneyland en Californie : Pirates of the Caribbean. Cette même attraction sera ensuite adaptée au cinéma en 2003 dans Pirates des Caraïbes : La Malédiction du Black Pearl. Le cinquième volet cinématographique des aventures de Jack Sparrow sortant en 2017 a même pour titre Pirates of the Caribbean : Dead Men Tell No Tales. La boucle est donc bouclée...

Le Fantôme de Morgan aurait pu finir aux oubliettes, bien caché dans les archives des studios Disney, comme bon nombre de leurs projets avortés. Le destin en décide pourtant autrement en faisant de l'œuvre un pan essentiel de l'histoire Disney : celui du tout premier comic book de Donald et de la première œuvre dessinée par Carl Barks ! Tout remonte ainsi au début de l'année 1942 quand la Western Publishing qui publie les histoires Disney depuis plusieurs années, pour la plupart repris des strips, veut se lancer dans un plan d'expansion. Et il lui faut pour cela des histoires neuves. Le directeur de la rédaction, Oskar Lebeck, se rend donc aux studios Disney pour trouver un récit qui pourrait convenir. Parmi nombres de projets avortés qui dorment dans les coffres de Disney, un attire son attention : Morgan's Ghost, une histoire de pirates avec Mickey, Donald et Dingo. Lebeck demande donc à John Rose, directeur des scénarios pour les cartoons quelles sont pour lui les bonnes personnes capables d'adapter l'histoire pour en faire un comics de 64 pages avec Donald. Il désigne Jack Hannah et Carl Barks pour le dessin tandis que Bob Karp, scénaristes des strips de Donald, se chargera d’adapter le story-board en scénario tapé à la machine.

Jack Hannah est embauché aux studios Disney en 1933 en tant qu'intervalliste d'animation sur les séries Mickey Mouse, Silly Symphonies et Donald Duck puis réalise sa première animation pour Gulliver Mickey en 1934. En 1939, il est promu scénariste et travaille en étroite collaboration avec Carl Barks. C'est en 1943 qu'il devient le réalisateur attitré de Donald Duck. Il va ainsi introduire de nombreux acolytes auprès du canard, rendant ses cartoons tout simplement mémorables. Dans les années cinquante, il se charge de quatorze émissions pour la télévision mettant ainsi en vedette Donald pour le show Disneyland. Il quittera le studio en 1959. Jack Hannah est assurément le réalisateur qui offre au célèbre canard de Disney son plus grand nombre de cartoons incontournables. Pas moins de 65 courts-métrages s'affichent, au total, à son compteur ; huit étant nommés aux Oscars et notamment, Donald et les Fourmis (1948), Donald et son Arbre de Noël (1949), et Chasse Gardée (1955).
Carl Barks commence, lui, sa carrière chez Disney en 1935 comme intervalliste. Il travaille ensuite sur différents cartoons en qualité de scénariste. Notamment, il est en charge du succulent Donald se Camoufle. En 1942, il est missionné pour réaliser la bande-dessinée Donald Duck Finds Pirates Gold. Carl Barks va ainsi faire carrière dans le support B.D. et écrire et dessiner, jusqu'à sa retraite en 1966, des histoires mémorables sur le célèbre canard et sa famille. Il imagine tout un univers autour du palmipède malchanceux, à commencer par Balthazar Picsou en 1947. Suivront le cousin chanceux de Donald : Gontran Bonheur (1948) ; les voleurs frères Rapetou (1951) ; l'inventeur Géo Trouvetou (1952) ; le machiavélique Gripsou (1956) ; la sorcière Miss Tick (1961) ; le milliardaire Crésus Flairsou (1961) et la secrétaire Miss Frappe (1961). Ces personnages sont tellement inscrits dans l'inconscient collectif qu'ils inspirent des grands noms du cinéma, notamment Steven Spielberg, pour la scène de la boule de pierre dans Les Aventuriers de l'Arche Perdue.
Enfin, Robert Louis Karp dit Bob Karp né en 1911, débute chez les studios Disney dans les années 30. De 1938 à 1974, il sera chargé d'écrire les strips quotidiens et dominicaux de Donald, illustré par Al Taliaferro jusqu'à sa mort en 1969 puis par Frank Grundeen. Le scénariste meurt, quant à lui, en 1975.

Pour le comics, les deux dessinateurs ne voient finalement jamais le story-board d'origine. Bob Karp livre donc un scénario remarquablement précis puisque de nombreux points semblent communs entre la BD finale et le film avorté. Des changement notables sont toutefois et bien-sûr apportés. Comme il s’agit d’un comics de Donald, Riri, Fifi et Loulou remplacent Mickey et Dingo. Les fantômes sont supprimés mais remplacés par une idée proche : Pat Hibulaire, déguisé en spectre, s’arrange en effet pour remettre la carte aux héros afin de les faire trouver le trésor à sa place. Bob Karp va rendre en outre le comics aussi très visuel en insistant sur les gags et limitant les dialogues. Jack Hannah et Carl Barks, quant à eux, vont se partager équitablement les planches qu'ils dessineront en dehors de leur heures de bureau consacrées aux dessins animés. Le futur maître des canards signe ainsi les planches 1, 2, 5 et 12 à 40. Il s'agit ici de la toute première histoire que Carl Barks dessinera et qui lancera sa future carrière qui allait le rendre célèbre. Il est d’ailleurs amusant de constater que Carl Barks a pris principalement à sa charge les scènes extérieures laissant à Jack Hannah les intérieures. Ce dernier avait en effet, à l'époque, une meilleure connaissance des perspectives et des ombres : il était donc plus à même de réaliser les dessins se passant par exemple dans la taverne.

Le comic book est finalement publié en octobre 1942 dans Four Color Comics #9 sous le titre officiel de Donald et le Trésor du Pirate. Il est tellement populaire qu'il devient le premier d'une longue série de comic book consacré à Donald et dont Carl Barks serait le principal instigateur. En 1946, une version condensée sans dialogue est proposée sous le titre Donald Duck and Ghost Morgan's Treasure dans la collection Better Little Book. Par la suite, le comics a droit à plusieurs remakes. Le premier dès 1947, par Jack Hannah lui-même, dans l'histoire Donald et les Pirates ! publiée dans Cheerios Premiums (Giveaway) #W1 et constituant alors une simple version réécrite et raccourcie du comics d'origine. Le second, en 1949, dans Les Sept Nains et le Pirate dessiné par Tony Strobl et publié dans Four Color Comics #227 et qui, comme son nom l'indique, remplace Donald par les sept nains de Blanche Neige et les Sept Nains. Le dernier, en 1953, dans Capitaine Crochet Chasse le Trésor illustré par Dick Moores et scénarisé par Del Connell et publié dans Peter Pan Treasure Chest. Le point commun de toutes ces versions reste le personnage de Bec-Jaune !

Du (Le) Fantôme de Morgan à Donald et le Trésor du Pirate, il est intéressant de voir comment un film avorté a tout de même eu une importance historique pour Disney. Peut-être que sans lui l'énorme production de comics Disney n'aurait jamais existé et Carl Barks ne serait jamais devenu un dessinateur de bandes-dessinées. Rien que pour cela, cette histoire est un véritable trésor...

Poursuivre la visite

Le Forum et les Réseaux Sociaux

www.chroniquedisney.fr
Chronique Disney est un site de fans, non officiel, sans lien avec The Walt Disney Company, ni publicité,
utilisant des visuels appartenant à The Walt Disney Company ou des tiers par simple tolérance éditoriale, jamais commerciale.