Miroir, Miroir
L'Histoire de la Méchante Reine

Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine
La couverture
Titre original :
Fairest of All : A Tale of the Wicked Queen
Éditeur :
Hachette Romans
Date de publication France :
Le 24 août 2016
Genre :
Disney Villains
Auteur(s) :
Serena Valentino
Autre(s) Date(s) de Publication :
Disney Press (US) : Le 18 août 2009
Nombre de pages :
240

Le synopsis

Alors qu'il se rend au village, le roi fait la rencontre de la fille du miroitier, occupée à tirer l'eau d'un vieux puits. Le monarque tombe immédiatement amoureux de cette ravissante paysanne et ne désire qu'une seule chose, la revoir. Ses visites se font de plus en plus fréquentes, jusqu’au jour où le souverain demande la main de la jeune femme. L'union est immédiatement célébrée et la paysanne devenue reine s’occupe de Blanche Neige, la fille du roi, comme si elle était sa propre enfant.
Pourtant, et alors que la famille royale coule des jours heureux, l'ombre de la guerre, la beauté grandissante de Blanche Neige et la rencontre d'un diabolique trio de sorcières viendront peu à peu obscurcir le cœur de la reine, jusqu'à la pousser à commettre l'irréparable...

La critique

rédigée par
Publiée le 18 octobre 2019

Depuis sa sortie au cinéma en 1937, Blanche Neige et les Sept Nains continue d'enchanter les nouvelles générations. Les facéties des nains font ainsi rire aux éclats petits et grands, les merveilleuses chansons du long-métrage se fredonnent allègrement, quant à l'effroyable Reine Grimhilde, dont la beauté glaciale dissimule une cruauté sans égale, elle siège aujourd'hui encore sur son trône au panthéon des plus grands méchants du cinéma. Personnage iconique dont les actions ne semblent motivées que par ses désirs narcissiques, ce qui la rend d'ailleurs d'autant plus terrifiante, de nombreux mystères entourent le passé et l'histoire de la reine. Ne déteste-t-elle Blanche Neige qu'en raison de sa beauté ? Comment, d'ailleurs, est-elle entrée dans la vie de la jeune princesse ? A-t-elle toujours été une sorcière, maîtresse dans l'art des potions et des poudres ?
Si la série Once Upon a Time – Il Était une Fois, diffusée à partir de 2011 sur ABC, a tenté à sa manière de répondre à ses questions, c'est bien l'auteure Serena Valentino qui, avec son roman Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine, s'interroge la première sur les motivations réelles de la cruelle reine, en proposant à son lectorat une plongée vertigineuse dans la psyché du personnage.

Serena Valentino est née le 7 avril 1970 à San Jose, dans l'État de Californie aux États-Unis. Élève appliquée, l’auteure développe très tôt un talent certain pour l'écriture, impressionnant d'ailleurs ses professeurs qui l'invitent à développer ses qualités littéraires. Serena Valentino n'en a pourtant cure ; elle lorgne en effet bien davantage sur une carrière théâtrale. La jeune femme entreprend d'ailleurs des études dans cette direction, désireuse d'enseigner l’art du théâtre. Pour autant, la jeune artiste n'a jamais abandonné complètement l'écriture. La vingtaine bien consommée, elle fait découvrir à son ami, Ted Naifeh, une historiette qu’elle a écrite, empreinte d’une ambiance gothique et mettant en scène des personnages de contes de fées modernes. Ted Naifeh, charmé par le récit de la jeune auteure, entreprend aussitôt de l’illustrer, persuadé que le genre du comics est parfait pour raconter l’histoire de Valentino. De cette collaboration entre les deux artistes naît alors le premier des 28 numéros de la série de comics GloomCookie, éditée à partir de 1999 par Slave Labor Graphics.
En 2002, toujours chez le même éditeur, Serena Valentino signe une nouvelle série de comics, intitulée Nightmares & Fairy Tales, dont le personnage principal, Annabelle, est une poupée de chiffon racontant les histoires plus ou moins tragiques des personnes l'ayant possédée. Serena Valentino, au cours des 23 numéros que comporte la série, fait se côtoyer tour à tour des créatures mystiques issues du folklore et des personnages emblématiques de contes de fées, dans des histoires macabres teintées d'humour noir.

Impressionnés par les talents de conteuse de Serena Valentino après avoir lu la série de comics Nightmares & Fairy Tales, les éditeurs de Disney Press contactent l’auteure pour lui soumettre un projet de roman. Lui proposant d'écrire une histoire centrée autour d'un ou de plusieurs personnages issus des films de Walt Disney Animation Studios, l'auteure jette immédiatement son dévolu sur les méchants Disney, et plus particulièrement sur le personnage de la Reine Grimhilde.
Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine sort alors dans les librairies étasuniennes le 18 août 2009. Prévu au départ comme un roman unique, son succès convaincra néanmoins rapidement Disney Press de poursuivre sa collaboration avec Serena Valentino, en lui proposant d'écrire un nouveau roman explorant le passé d'un nouveau méchant. C'est alors la Bête qui, curieusement, est choisie par l'auteure pour figurer dans son deuxième livre, L'Histoire de la Bête, qui sort le 22 juillet 2014. Lié au roman précédent grâce à la présence de personnages inédits et récurrents, il faudra toutefois attendre le troisième tome, Pauvre Âme en Perdition : L'Histoire de la Sorcière des Mers, édité le 26 juillet 2016, pour que la série trouve une véritable unité au sein de ce qui devient alors la collection Disney Villains. C'est d'ailleurs depuis ce roman, présentant le passé de la terrible Ursula, que les histoires sont non seulement bien davantage connectées entre elles mais, surtout, que la publication des livres devient annuelle.
Le 3 octobre 2017, Maléfique fait une entrée fracassante dans la collection, avec Maîtresse de Tous les Maux : L'Histoire de la Fée Noire, précédant Mère Gothel qui, le 7 août 2018, voit à son tour son passé exploré dans N'Écoute que Moi : L'Histoire de la Vieille Sorcière. Le 2 juillet 2019, enfin, le sixième tome, Les Étranges Soeurs, se concentre pour la première fois non pas sur un méchant emblématique de Disney, mais plutôt sur les personnages inédits imaginés par Serena Valentino et présents depuis le premier tome de la collection. Face au succès tant critique que public de la série Disney Villains, trois nouveaux romans sont prévus dès l'été 2019, dont le premier, centré sur le personnage de Cruella d'Enfer, est annoncé pour sortir au mois de juillet 2020 aux États-Unis.

Depuis quelques années maintenant, le matériel promotionnel accompagnant la sortie des romans de Serena Valentino arbore une phrase qui n'est pas sans rappeler la philosophie présentée dans la série Once Upon a Time – Il Était une Fois : « Evil is made, not born ». Rappelant que personne ne naît foncièrement mauvais, mais que la cruauté est bien davantage le fait d'un passé tortueux et d'expériences traumatisantes, cette maxime sied alors à merveille au personnage principal de Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine.
Le roman s'ouvre en effet sur le mariage d'une magnifique paysanne, en passe de devenir reine. Douce avec sa future belle-fille, Blanche Neige, qu'elle aime déjà comme si elle était sa propre enfant, et accompagnée par sa plus fidèle dame de compagnie, Verona, la future reine apparaît immédiatement sympathique au lecteur. Fille d'un miroitier dont le travail d'orfèvrerie est reconnu par delà les frontières du royaume, la jeune reine ne semble, en fait, pas consciente de sa propre beauté. Pire, ayant subi quotidiennement les quolibets de son propre père, la jeune femme a même fini par se considérer comme une moins que rien, aussi est-elle franchement incrédule que le roi ait seulement posé les yeux sur elle.
À travers les souvenirs de la reine, que Serena Valentino égrène durant le premier chapitre de son récit, le lecteur découvre peu à peu à quel point l’ancienne paysanne et Blanche Neige se ressemblent. Toutes deux filles uniques, nées d'une mère qu'elles n'ont pas connue, les deux femmes partagent en outre une beauté aussi resplendissante qu'indéniable. Loin de jalouser la beauté de la toute jeune princesse, âgée d'à peine quatre ans, la reine se plaît tout à l'inverse à rappeler chaque jour à la petite héritière combien elle est ravissante. Difficile donc, pour le lecteur, d'imaginer que la bienveillante souveraine dépeinte dès les premières pages de Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine puisse laisser place, avec le temps, à un personnage terrible au cœur de glace. À ce titre, Serena Valentino réalise un véritable tour de force, en dépeignant admirablement la déchéance psychologique de la reine, sombrant peu à peu dans une implacable folie meurtrière.

L'une des excellentes idées de Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine, et qui participe allègrement à mettre en lumière la fracture psychologique de la reine, est d'accorder un symbolisme fort aux différents objets et lieux aperçus dans Blanche Neige et les Sept Nains. C'est ainsi que le lecteur, au fil des pages, apprendra de nombreux détails sur la provenance de l'écrin dans lequel la reine souhaite voir enfermer le cœur de Blanche Neige par le Chasseur Humbert, sur la portée symbolique des pommes dans l'histoire et, bien entendu, sur la provenance du miroir magique ainsi que l’histoire de l'esclave qui y est emprisonné. Le puits, qui est présent durant la scène d'exposition de Blanche Neige et les Sept Nains et autour duquel Blanche Neige et le Prince entonnent Je Souhaite/Un Chant, est lui aussi hautement chargé d’histoire, puisque c'est précisément à proximité de celui-ci que s'est articulée la rencontre entre le roi et la reine. En établissant la provenance de ces objets qui viennent tour à tour servir les sombres desseins de la reine et en faisant de nombreux lieux aperçus dans le long-métrage le théâtre de scènes sordides, Serena Valentino dépeint admirablement la chute progressive de la reine dans une effroyable cruauté perverse.

C'est donc dire qu'avec un sujet aussi délicat que celui de l'histoire de la Reine Grimhilde, qui figure indéniablement au rang des plus grands méchants Disney, Serena Valentino risquait de manquer sa cible, ou pire encore, de malmener l'histoire de la souveraine iconique. Il n'en est fort heureusement rien, le premier roman de l'auteure se lisant avec un plaisir croissant au fil des pages, la narration se faisant de plus en plus sombre à mesure que les charmantes scènes de bonheur familial cèdent la place aux chapitres dépeignant la froideur de la reine, aliénée au miroir magique reflétant son image.
L'auteure a ainsi bénéficié d'une confiance totale de la part de Disney, qui n'a refusé aucune de ses idées, et cela même quand il s'agissait de dépeindre des scènes violentes et sanglantes. La seule condition à l'écriture de Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine était alors que l'auteure respecte à la lettre l'histoire présentée dans le long-métrage d'animation. À ce titre, plusieurs scènes sont retranscrites tout à fait fidèlement, avec les dialogues originels, dont la scène glaçante dans laquelle la reine ordonne au chasseur de tuer la princesse. En revanche, Serena Valentino a pu tout à loisir imaginer le passé et le futur des personnages, mais aussi de nombreux événements qu'elle a choisi d'intercaler entre les scènes reprises du chef-d'oeuvre d'animation de 1937.

Pourtant, et malgré ses nombreuses qualités, il est un point sur lequel Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine pèche grandement : le développement de ses personnages secondaires. Alors que l’histoire et la psychologie de la reine sont brillamment développées et suscitent immédiatement l'empathie du lectorat, les personnages inédits sont eux, tout à l'inverse, franchement oubliables. La dame de compagnie Verona, que la reine considère comme une sœur, est alors un personnage générique qui, malgré quelques fulgurances, ne sert bien vite que de levier scénaristique, quand les Étranges Sœurs, Lucinda, Ruby et Martha, sont au mieux insipides, au pire franchement irritantes. Cousines du roi versées dans les arts occultes, les sorcières prennent un malin plaisir à terroriser la pauvre Blanche Neige tout en précipitant, de par leur actions, la chute de la reine dans les abîmes de la folie. À la croisée des Moires grecques et des sorcières shakespeariennes de Macbeth, les Étranges Sœurs ont un potentiel immense qui se trouve tout bonnement gâché par des scènes dans lesquelles elles s'amusent à terminer les phrases les unes des autres en ricanant malicieusement. Ces ersatz de sorcières, vues et revues des centaines de fois dans d'innombrables œuvres auparavant, qu'elles soient littéraires, cinématographiques ou télévisées d'ailleurs, sentent définitivement la naphtaline et tiennent plus du ridicule que de la véritable menace. Quel dommage.

Le personnage du roi est lui aussi très classique, mais fort heureusement bien mieux traité et nettement plus intéressant. Bon vivant qui n'hésite pas à partir combattre au front durant les guerres qui menacent son royaume, c'est notamment par le truchement de ses souvenirs que le lecteur apprend à connaître Rose, la mère de Blanche Neige, morte quand celle-ci était encore un bébé. Il est à ce titre curieux que ce personnage trouve un prénom quand le roi, lui, n'est jamais nommé autrement que par son titre de souverain. La reine, malgré son statut de personnage principal du roman, demeure également anonyme.
Interrogée par nombre de ses lecteurs à ce sujet, Serena Valentino a indiqué qu'elle n'avait pu donner à la reine le prénom de Grimhilde, le personnage n'étant jamais nommé dans le film d'animation de 1937. Pourtant, lorsqu'il est fait mention du personnage dans le sixième roman de la série, Les Étranges Soeurs, c'est bien sous le prénom Grimhilde que la reine est connue. Un choix regrettable, rendu encore plus incompréhensible par le roman de la série Twisted Tales écrit par Jen Calonita, Mirror, Mirror. Sorti aux États-Unis le 2 avril 2019 et s'inspirant lui aussi de Blanche Neige et les Sept Nains, au point d’en reprendre mot pour mot certains dialogues, le personnage de la reine y est alors appelé Ingrid…
Avec ce roman, Disney avait pourtant l’occasion d’offrir au personnage une continuité en officialisant le prénom de Grimhilde, qui avait auparavant été mentionné dans l’adaptation du film en bande dessinée sous la plume de Merrill de Marris, parue avant la sortie du long-métrage chez King Features Syndicate.

Sorti le 18 août 2009 en librairie aux États-Unis, Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine bénéficie d'une très jolie édition de qualité, à la fois sobre et élégante. Sur la jaquette de papier majoritairement noire recouvrant l'ouvrage, la moitié du visage de la reine, d'une beauté glaciale, invite le lecteur à ouvrir le roman, s'il l'ose. Une fois la jaquette de l'ouvrage ôtée, le visage de la reine cède la place à celui de la sorcière, fixant le lecteur de son œil torve, la bouche déformée par un ricanement menaçant. Chaque nouveau chapitre du livre s'ouvre également par une illustration placée en en-tête, représentant un objet ou un lieu clé de l’histoire, dessinée par les équipes de Disney Storybook Art Team.
Il faut attendre le 24 août 2016 pour qu’Hachette Romans publie enfin le livre dans l'Hexagone, avec une excellente traduction de Caroline Minic, mais dépourvu toutefois des illustrations de l'édition originale, celles-ci participant pourtant pleinement de l'expérience littéraire ! Hachette Romans a, en revanche, eu l'excellente idée d'apposer, de part et d'autre de la tranche du roman, les deux illustrations de couverture de l'édition originale. Ouvert, le roman reconstitue ainsi le visage complet du personnage principal avec ses deux facettes, celle de la reine sublime, et son pendant hideux de sorcière.
Il est à noter, enfin, qu'aucune mention n'est faite sur la couverture des rééditions étasuniennes, pas plus que sur celle de l'édition française d’ailleurs, qu'il convient de lire ce roman avant les autres de la série Disney Villains pour saisir toute la teneur de l'histoire et de l'univers créés par Serena Valentino.

Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine est au final un excellent roman. Sous la plume de Serena Valentino, la Reine Grimhilde révèle une superbe richesse psychologique, et là où elle suscitait majoritairement la terreur dans Blanche Neige et les Sept Nains, elle fera ici sourire et pleurer même, parfois, le lecteur impliqué dans l'histoire. Au fil des pages, la douceur qui émane du roman cède néanmoins peu à peu sa place à l'effroi, la déchéance de la reine étant magistralement racontée par l'auteure. Le récit est alors seulement plombé par les personnages inédits introduits, ceux des Étranges Soeurs en tête ; celles-ci effectuant là un bien mauvais départ dans la série Disney Villains qui, pourtant, leur attribue une place de choix dans la mythologie des plus grands méchants Disney. Il n'empêche ! Miroir, Miroir : L'Histoire de la Méchante Reine sait parfaitement captiver son lecteur qui, comme ensorcelé, ne peut s'empêcher d'en tourner les pages jusqu'à l'épilogue, qui réserve d'ailleurs un dénouement aussi inattendu qu'intriguant.

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