Titre original :
Stargirl
Production :
Walt Disney Pictures
Date de mise en ligne USA :
Le 13 mars 2020 (Disney+)
Genre :
Comédie romantique
Réalisation :
Julia Hart
Musique :
Rob Simonsen
Durée :
107 minutes

Le synopsis

Leo Borlock est un lycéen timide qui, traumatisé par le harcèlement scolaire, a choisi comme ligne de conduite de toujours passer inaperçu dans sa petite ville de Mica dans l'Arizona. Mais ses certitudes se voient bousculées au contact de Stargirl Caraway, une nouvelle élève qui ne s'embarrasse pas des convenances.

La critique

rédigée par
Publiée le 24 mars 2020

Stargirl est ce genre de film qui donne du baume au cœur grace à la belle morale et la poésie qui s'en dégagent. Prônant la différence et l'originalité, sa jolie histoire est aussi touchante que charmante en suivant une jeune fille qui, par sa joie de vivre, sa gentillesse et son non conformisme, va changer le quotidien des habitants d'une ville et surtout d'un jeune garçon dont elle va bouleverser l'existence.

Le film est en fait une adaptation du roman éponyme de Jerry Spinelli. Né le 1er février 1941 en Pennsylvanie, il trouve sa vocation d'écrivain à seize ans quand ce passionné de sport écrit un poème de football américain que son père arrive à faire publier à son insu dans le journal local. Après des études au Gettysburg College, il devient ainsi écrivain et rédacteur en chef pour un magazine de grand magasin. Pendant vingt ans, il assume ce travail alimentaire et écrit ses romans sur son temps libre, que cela soit en pause déjeuner, le soir ou les week-ends. Ses premiers romans, tous à destination des adultes, se voient rejetés par les éditeurs. C'est seulement à partir du cinquième, Space Station Seventh Grade, où il décide de viser plutôt les adolescents et les jeunes adultes, qu'il est enfin publié en 1982. À partir de là, il va signer une trentaine de romans dont les plus populaires Maniac Magee (1990) et Wringer (1997) gagneront des prix mais aussi Stargirl (2000) qui connaîtra une suite intitulée Love, Stargirl (2007).

L'ouverture historique le 12 novembre 2019 de Disney+, une plateforme de service de vidéo à la demande par abonnement créée par The Walt Disney Company, est un tournant aussi stratégique qu'historique pour le studio aux grandes oreilles. Actant le nouveau comportement des (télé)spectateurs qui délaissent la télévision linéaire pour un nouveau type de consommation de flux audiovisuel, Disney+ a alors deux objectifs. D'une part, elle remplacera à terme les sorties en vidéo des films cinéma sur support physique dont le grand public s'est détourné, préférant en majorité l'achat en digitalisé. D'autre part, elle permettra à Disney de revenir sur des genres de films qu'il avait déserté en salles faute de succès ou d'appétit suffisant des spectateurs.

Les films à petit budget, qui étaient proposés il y a encore quelques années sur grand écran, sont donc désormais réorientés pour une sortie directement sur la plateforme. Le choix est compréhensible car le public préfère malheureusement se déplacer en salles de plus en plus pour des franchises qu'il connaît bien. Les studios Disney se contentent alors de lancer au cinéma uniquement des films à gros budgets, certes aux risques plus importants mais aux retours sur investissement conséquents. Le problème de cette politique est que le label Disney s'est concentré sur un seul type de films, délaissant des genres qui faisaient la part belle de son catalogue au cinéma les décennies précédentes : la comédie, les films d'adolescents, les films sportifs ou les aventures humaines. Disney+ permet donc au label de Mickey de proposer de nouveau des longs-métrages moins ambitieux mais plus variés. Stargirl rentre parfaitement bien dans cette cette définition. Par contre, malgré ce qu'il pourrait laisser penser, l'opus n'a pas du tout le ton d'un Disney Channel Original Movie. Il s'agit certes d'un film adolescent mais réalisé avec poésie et une ambition narrative poussée. Il se rapproche un peu de certains longs-métrages cinéma Disney dans le genre adolescent comme Princesse Malgré Elle, Hannah Montana - Le Film ou encore Le Grand Soir.

Les studios Disney s'intéressent à une adaptation du roman de Jerry Spinelli dès juillet 2015. À l'origine, le film est prévu d'être réalisé par Catherine Hardwicke (Twilight) mais sa préproduction est finalement décalée à la moitié de 2018. Après plusieurs réécritures du script ainsi qu'un changement de metteur en scène, le tournage a lieu entre septembre et novembre 2018.
Pour mettre en image Stargirl, les studios Disney décident ainsi de faire appel à Julia Hart. La réalisatrice a commencé sa carrière en tant qu'enseignante avant de se lancer dans le métier de scénariste. Elle réalise son premier film Miss Stevens en 2016, suivi par Fast Color en 2018 ; Stargirl constituant son troisième et aussi premier pour Disney.

Stargirl est un superbe film qui prône la différence, le non-conformisme et la gentillesse. À travers les personnages de Stargirl et de Leo, ce sont en effet deux conceptions de la vie qui sont mises en avant. La première, celle de Leo, est celle du petit nouveau qui arrive dans une nouvelle ville avec toute sa candeur, sa naïveté... et son originalité, notamment celle de toujours porter, y compris le premier jour d'école, la cravate de son père défunt. Malheureusement, cette particularité ne plait pas à ses nouveaux camarades qui l'agressent. À partir de cette triste expérience, il décide de se fondre dans la masse, de se comporter comme tout le monde pour se faire oublier afin de ne plus se faire embêter. Des années plus tard, il est resté ce garçon timide qui a peur du regard des autres, mis à part de ses amis proches, mais qui rêverait d'avoir plus de conviction et de force de caractère. Le début du film montre ainsi une certaine vision, certes atténuée, du harcèlement scolaire et comment le petit garçon s'est créé des protections pour sortir des radars des autres, ce qui a impacté sa personnalité. Ce que vit Leo est donc somme tout assez commun, surtout au collège où les enfants sont particulièrement cruels entre eux : de nombreux élèves timides ayant du mal à ne pas être la tête de turcs de leurs camarades. L'ignorance et la transparence sociale sont alors le seul moyen d'être tranquilles pour ces victimes, quitte à perdre une part de leur identité en chemin.

L'arrivée de Stargirl va alors changer les choses. Cette jeune fille, sortie de nulle part, n'a en effet pas peur d'être originale, de faire bouger les lignes et d'entraîner les autres vers plus d'optimisme. Elle va titiller les habitudes du lycée où elle arrive et faire comprendre aux élèves, qui sont persuadés qu'il ne se passe jamais rien dans leur patelin, que tout dépend d'eux en réalité. Elle va ainsi, par de petits gestes, faire évoluer les mentalités fermées et bloquées de la communauté. Des situations d'échec ou d'isolement vont se transformer en succès et en ouverture. Dans cet aspect, le film rappelle d'ailleurs un autre long-métrage Disney, Pollyanna, où la petite fille transforme tous les habitants d'une ville grâce à sa joie et son optimisme. Ici, la jeune Stargirl produit le même effet sauf qu'elle n'est pas forcément optimiste mais veut plutôt faire le bien autour d'elle, même à l'insu des gens pour qui elle le fait, ne cherchant jamais les remerciements. Ces changements heureux sont vus par la majorité comme un vrai miracle, transformant même la jeune fille en symbole magique et porte-bonheur. Malheureusement, toute situation n'est jamais éternelle et surtout l'unanimité n'est jamais possible. Et si la « magicienne » n'était en réalité qu'une fille comme les autres, capable de faire aussi des choix impopulaires ou des erreurs de jugement ?

L'autre thématique émouvante du film est sûrement la belle relation entre Leo et Stargirl. Dans l'adage "les opposés s'attirent", les deux jeunes gens n'ont rien en commun. Pour autant, une attirance mutuelle se fait jour : Leo trouvant que la jeune fille est rayonnante, pleine de vie, d'audace et de joie de vivre ; Stargirl appréciant la timidité et la gentillesse du jeune garçon. De nombreuses scènes sont particulièrement touchantes quand les deux personnages commencent à se découvrir, à flirter puis à sortir ensemble. La scène de leur première rencontre où Leo est ébloui par la jeune fille donne le "la". Il s'ensuit la première "discussion" où le timide jeune homme se retrouve par terre, caché par une voiture, où la malicieuse Stargirl lui répond, en se couchant, de l'autre côté. La balade dans la nature est aussi émouvante avec la jeune fille montrant au jeune homme comment exprimer son énergie mais aussi ressentir le monde qui l'entoure. Mais tout n'est pas à l'eau-de-rose, et le film montre également les erreurs de chacun vis-à-vis de l'autre. Des demandes ou actions bienveillantes deviennent alors sources de souffrance et la fin heureuse n'est pas forcément au bout du chemin. Au final, la comédie romantique se fait à la fois tendre et douce-amère, livrant une réflexion mélancolique de toute beauté sur la vie et les amours de jeunesse.

Pour développer son propos, Stargirl possède un joli casting, notamment les deux héros principaux qui portent remarquablement bien le film sur leurs épaules.
"Stargirl" Caraway est ainsi interprétée par la chanteuse Grace VanderWaal qui signe là son première rôle dans un long-métrage. La toute jeune actrice de 16 ans amène ses talents de chanteuse comme sa voix si particulière ainsi que son ukulélé emblématique. Considérée comme une chanteuse prodige pour la qualité de ses compositions et de ses textes, elle apporte beaucoup de personnalité et de fraîcheur à son personnage. À la fois excentrique et sensible, Stargirl est profondément touchante car elle semble libre et sereine. S'habillant de façon colorée et n'ayant jamais peur du regard des autres, elle cache en réalité une part de fragilité qui la rend encore plus attachante.
Leo Borlock est, quant à lui, joué par Graham Verchere. L'acteur s'est notamment déjà fait remarquer dans la série ABC Studios Good Doctor, où il joue le Dr. Shaun Murphy lors des flashbacks où le futur médecin est adolescent. Il interprète ici un personnage particulièrement attachant de par sa timidité et son envie irrésistible de se cacher dans un trou de souris. De nombreux spectateurs s'identifieront au garçon, car nombreux sont ceux à avoir vécu ses situations durant leurs années lycée : quelqu'un de lambda ne faisant partie ni du groupe des populaires, ni des têtes de turc, et faisant tout pour passer inaperçu. Enfin, comme il est le narrateur du récit, le public voit l'histoire via ses yeux et ses souvenirs presque irréels qui lui restent de ces moments avec la jeune fille.
Le spectateur notera aussi la participation de Karan Brar dans le rôle du meilleur ami de Leo, Kevin. L'acteur est surtout connu pour son rôle de Ravi Ross dans les séries Disney Channel Jessie et Camp Kikiwaka, mais aussi dans le Disney Channel Original Movie, Ma Soeur Est Invisible !.
Enfin, les personnages adultes ne sont pas en reste. Gloria (Darby Stanchfield), la mère de Léo, veuve, essaye ainsi tant bien que mal d'être à l'écoute de son fils, sans le brusquer, mais elle a souvent du mal à communiquer avec lui qui demeure un adolescent très renfermé. Il faut dire que l'absence du père se fait sentir. Le garçon a d'ailleurs trouvé une figure paternelle de substitution auprès d'un vieil archéologue (Giancarlo Esposito) qui lui prodigue de précieux conseils de vie afin de l'aider à faire les meilleurs choix.

L'autre atout de Stargirl repose sur sa musique. Déjà, Rob Simonsen propose une composition instrumentale de toute beauté qui souligne à merveille l'émotion du film. Ensuite, grâce au talent vocal de la jeune Grace VanderWaal, plusieurs titres charmants parsèment l'opus. Be True to Your School des Beach Boys, par exemple, est la chanson qui la fait remarquer par ses camarades tandis que We Got the Beat des Go-Go's est celle qu'elle livre avec les pom-pom girls. La mélancolique Thirteen de Big Star est entendue deux fois dans le film, d'abord l'original de 1972 une première fois, puis via une reprise plus acoustique par les deux acteurs principaux. Ensuite, l'interprétation de Just What I Needed de The Cars est sûrement l'apothéose émotionnelle de Stargirl, apte à réchauffer le cœur des spectateurs. Enfin, il est fortement conseillé de rester jusqu'à la toute fin du générique car, en plus d'entendre deux superbes chansons interprétées par Grace VanderWaal, Give Me Love (Give Me Peace on Earth) de George Harrison et Today and Tomorrow spécialement écrite pour le film, une jolie surprise attend les plus patients.

Stargirl est le genre de film plein de grâce, de charme et avec un zeste de mélancolie, qui emmitoufle le public. Il permet de rentrer dans une bulle bienveillante pendant deux heures et d'oublier tous ses soucis pour en ressortir enchanté. Porté par des personnages attachants et une musique envoûtante, ce Disney+ Original est une petite merveille.

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