Deadpool

Titre original :
Deadpool
Production :
Marvel
20th Century Fox
Date de sortie USA :
Le 12 février 2016
Genre :
Fantastique
IMAX
Réalisation :
Tim Miller
Musique :
Tom Holkenborg (Junkie XL)
Durée :
109 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Wade Wilson voit sa vie et son couple menacés par un cancer incurable pour la médecine traditionnelle. Aussi, quand une mystérieuse organisation lui propose une solution pouvant le sauver et faire de lui, en prime, un super-héros, il n’hésite pas vraiment à donner son accord. Mais voilà, de trop nombreuses souffrances sont au bout du chemin. Deadpool, le mercenaire déjanté, naît finalement de ces différences expériences dont il est bien décidé à se venger.

La critique

rédigée par
Publiée le 08 février 2016

S'il y a bien un personnage qui a une place à part au sein des comics Marvel : c'est Deadpool. Mercenaire clownesque, il est un concentré de la violence tant à la mode dans les années 90 au sein de la culture populaire. Et pourtant, il apparait aujourd'hui presque comme une mascotte pour Marvel et se voit souvent placé au cœur de ses campagnes de communication pour ses publications papiers ; quand il n'est pas, en plus, en balade dans différents cross-overs avec les autres héros en plus de sa propre série. Ses papas, Rob Liefeld et Fabian Nicieza, sont donc les dignes représentants du comics des années 90 : du muscle partout, des femmes aux formes avantageusement disproportionnées, des dessins prenant une ou deux pages entières pour développer ici, une scène d'action ou là, une pose extravagante souvent au mépris de tout respect de l'anatomie humaine ou plus loin encore, un décor un tant soit peu travaillé ou original.

Wade Wilson, alias Deadpool, existe ainsi comme une mauvaise blague. Au point que même son design et son nom de famille soient empruntés au célèbre tueur à gage (beaucoup moins déjanté) Slade Wilson alias Deathstroke de la Distinguée Concurrence, DC Comics ! Le personnage n'en finit pas en réalité de surprendre son monde. Il continue à développer son incroyable popularité alors même qu'il ne colle pas à la politique éditoriale contemporaine de Marvel Comics qui s'inscrit toujours plus dans la recherche de complexité narrative et de comics d'auteur, aux récits toujours plus cérébraux et triturés. Brut de décoffrage, Deadpool est dès lors totalement en décalage avec le reste de l'univers. Il est même cet incroyable personnage conscient d'être le héros d'un comics, brisant le quatrième mur à la moindre excuse et pouvant aller jusqu'à voyager dans le monde réel pour y abattre ses propres auteurs du moment ! Ce qui n'est qu'une marque de folie pour le reste des héros de l'univers Marvel est, pour lui, une proximité entre le personnage et le lecteur. Il est le recul dont a besoin l'univers Marvel qui se prend trop souvent au sérieux : il est la claque dans le dos qui rappelle que toutes ces planches ne sont que du divertissement, sans toutefois immiscer cela de force puisque la démarche se limite aux séries où il apparaît. Deadpool est ainsi à prendre pour ce qu'il est : un défouloir fun et jouissif aussi bien pour les lecteurs que les artistes à l'œuvre sur lui.

Deadpool, c'est littéralement le Pool de la Mort : soit un pari sur qui va mourir dans les douze prochains mois (autant dire bien sûr que la côte est plus grande si la cible est jeune et en bonne santé !). C'est un mercenaire ni méchant, ni gentil qui a tendance à choisir ses cibles aussi bien pour obtenir un gain matériel que pour suivre sa schizophrénie ; cette voix à qui il parle et répond tout au long des histoires. Capable de séquestrer contre sa volonté une vieille aveugle afin de disserter sur ses théories folles, il se permet tout ! Evidemment, quelquesfois, il se retrouve dans le camp des gentils mais rarement par bonté d'âme. Assassin fou, il est quasiment invincible depuis sa participation au programme Arme X, le même qui a recouvert d'adamantium le squelette de Wolverine. Manque de chance, Deadpool, lui, est complètement défiguré par l'opération, là où Wolverine reste le séducteur de ces dames...

Au cinéma, la carrière du mercenaire est marquée par son apparition dans X-Men Origins : Wolverine, déjà incarné par Ryan Reynolds. Une prestation assez critiquée et pour cause : l'anti-héros hyper bavard s'y retrouve sans bouche suite aux expériences de l'Arme X et n'est plus qu'un simple pantin téléguidé destiné à abattre Wolverine. Il est à se demander si le moindre responsable derrière ce film connaissait vraiment le personnage original avant de l'intégrer à l'histoire, qui ne restera de toute façon définitivement pas comme un bon souvenir. Mais voilà, il signe, mine de rien, un petit succès au box-office, suffisant même pour que la Fox n'abandonne pas l'idée de continuer les films X-Men indépendants de la saga principale.
Tant mieux en fait, car Ryan Reynolds non plus n'est pas prêt à abandonner le personnage ! Déjà, au début des années 2000, un film sur Deadpool devait être réalisé par David Goyer chez New Line Cinema ; l'acteur étant lui aussi dans les starting-blocks pour le rôle-titre. L'homme est, il est vrai, attaché au mercenaire et affirme même après la sortie de X-Men Origins : Wolverine en 2009 sa volonté de l'incarner dans un film plus proche de l'irrévérence des comics. Sa présence dans un autre navet chez la Warner, Green Lantern, qui devait lancer l'univers partagé DC Comics et sera, au final, effacé de toute continuité officielle warneriène tout comme X-Men Origins : Wolverine n'est plus canonique avec grand-chose chez la Fox, ne semble d'ailleurs pas avoir raison de sa détermination…

Dès 2011, la major confie donc le projet à Tim Miller, connu pour avoir déjà travaillé sur les effets spéciaux d'X-Men, d'X-Men 2 ou Daredevil. Son rôle est alors de réaliser une courte vidéo-test sur le héros pour donner un avant-gout du futur film aux responsables du studio. Deadpool y saute dans une voiture en marche, transperce la moitié de ses passagers et fait des blagues : c'est grosso modo l'idée ! La Fox ne sort pas convaincue de l'essai si bien que le projet n'avance plus. Il est possible d'imaginer que le créneau d'ultra-violence tiré des comics et le second degré incarné par les adaptations de Mark Millar comme Kick Ass a effrayé le label. Mais c'est sans compter sur la détermination du public et des fans qui reçoivent la scène sur le net avec, eux, beaucoup d'engouement. Tim Miller réalisateur de Deadpool annonce ainsi que le scénario, débuté en 2011 par Rhett Reese et Paul Wernick (Bienvenue à Zombieland), est terminé. Un peu de retard supplémentaire, le temps de permettre à X-Men : Days of Future Past et Les Fant4stiques de débarquer au cinéma, et voici arrivé le film Deadpool enfin officiellement prévu pour une sortie en février 2016 ! La communication faite autour est d'ailleurs un cas d'école : déclarant l'opus comme un petit budget dans le monde des adaptations de comics, elle joue totalement sur la connivence avec les fans dont un Ryan Reynolds défendant bec et ongles le positionnement violent du récit ainsi que la loufoquerie bouffonne du personnage.

Violent : le film l'est et c'est une véritable victoire pour Tim Miller. Ni Marvel, ni la Fox ne semblent avoir entravé la vision cartoonesque morbide qui régit Deadpool. Il peut dès lors et sans peine être classifié comme un film mature si seulement le propos n'était pas autant basé sous la ceinture. Aucun problème : c'est le personnage de Deadpool qui veut ça et la Fox a visiblement accepté le postulat de livrer l'une des plus fidèles adaptations de comics sur écran avec le mercenaire déjanté. Le quatrième mur explose aux bons moments sans abus, les morts violentes s'enchainent, les jurons sont légions... Deadpool n'est clairement pas le film où il faut emmener son petit neveu qui trouve que le héros sur l'affiche est cool et coloré, comme il est possible de le faire avec Spider-Man. Le deuxième essai est donc transformé pour l'incarnation de Ryan Reynolds : Deadpool au ciné est Deadpool ! Le vrai. L'unique. Le long-métrage n'appelle d'ailleurs pas à une suite. Il est complet et apparaît comme un réservoir d'inspirations de fans du personnage qui tentent le tout pour le tout.

Fait notable : le film est fauché au point qu'il n'hésite pas à en rigoler lui-même ! Constitué de finalement peu de scènes d'actions, peu de décors différents avec peu de personnages, il reste esthétiquement réussi dans ses séquences de baston où Deadpool saute d'ennemis en ennemis pour tous les dézinguer comme une grenouille cabotine de nénufar en nénuphar. Les scènes d'actions sont, en outre, génialement chorégraphiées : pleines d'idées, leur rythme est ciselé à la perfection, mêlant pirouettes au ralenti et autres morts gores. Autant dire que les vannes fusent et qu'il peut être regretté de voir les bandes-annonces en dévoiler beaucoup trop.
Finalement, le budget réduit à la portion congrue est contourné par la maitrise de la réalisation au prix d'une construction associant scènes d'actions et flashbacks au service d'une histoire somme toute simpliste. Un avantage à cela : réussir à éviter l'impression de linéarité pour un mix de scènes d'actions et une "origin story" étonnamment sérieuse et pourtant totalement bien sentie. À l'image d'un Spider-Man très sombre, l'alter ego de Wade Wilson naît dans un drame on ne peut plus humain. Tortures au programme de Deadpool : le séjour de Wolverine au sein de l'Arme X passe dorénavant pour un weekend thalasso. Aussi, et d'un coup, la souffrance et les joies que ce personnage hors norme ressent tout au long des flashbacks détonnent au côté du super-héros sublimement cartoonesque dans une tentative désespérée de le rendre finalement très attachant. Deadpool n'est plus une simple figure de style, un simple Bugs Bunny trash pour Marvel, mais bel et bien un personnage fantastique de plus avec une fissure au casque. Seul vrai bémol, les scènes de flashbacks sont décidément trop longues pour ne pas se voir accusées de ne chercher qu'à rallonger artificiellement le film. Pour autant, elles réussissent l'exercice délicat de rendre le personnage addictif et de donner à la pellicule, l'aura d'un film Marvel à part entière et non pas d'une simple blague potache mal assumée.

Difficile cependant d'imaginer l'opus trouver une place au sein du Marvel Cinematic Universe chez Disney. Bien que les séries diffusées sur Netflix se soient révélées matures, Deadpool est, en effet, trop cartoonesque pour évoluer sous les codes rigides des plans sur la comète de la firme de Mickey. Il semble de fait bien plus à sa place dans l'univers branlant des X-Men de la Fox que dans le grand plan de conquête de l'univers de Marvel Studios. Le personnage est d'ailleurs le meilleur interlocuteur aux X-Men (au prix d'un pitch génial de Colossus sur leur rôle) qu'aux Avengers qui se cantonnent plus, eux, dans une posture de force d'intervention.

Cette classification “mature” se distingue aussi par la présence de sexe, parlé ou imagé. Peu courant dans les films Marvel au cinéma et bien que restant très souvent potaches, son recours offre à la relation entre Wade Wilson et sa moitié, Vanessa, l'opportunité d'être une histoire d'amour en évitant de trop nombreux clichés, dans quelque chose qui s'avère finalement très tactile à la manière de Jessica Jones version Netflix. Pas sûr que cela plaise à tout le monde, mais le langage très crû entre les deux protagonistes leur sied à merveille et rajoute une teinte organique assez adorable à leurs différentes scènes. Aussi, c'est dans un endroit très inhabituel qu'un certain caméo aura lieu...

Deadpool n'est pas un blockbuster Marvel au même titre que Marvel's Avengers ou X-Men et se situe très loin des introspections de séries sur Netflix. Le film est plutôt un cocktail déconnant et très réussi d'un personnage à part dans l'univers des comics. Pour un public averti, il mérite le ticket de cinéma et se révèle assez équipé pour déclencher plusieurs rires. Et comme un bonus, la partie dramatique n'est pas de trop et permet au récit de ne pas se résumer à une blague graveleuse de sales gosses, ni de sombrer dans les scènes superficielles dignes d'un téléfilm pour adolescents gâtés. Seuls quelques longueurs et un manque de budget flagrant sont vraiment à déplorer. Cependant, pour le deuxième grief, faute avouée est à moitié pardonnée…

Deadpool est une réussite : il est la dimension potache de l'univers Marvel et vaut pour cela, respect et admiration.

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