Pinocchio
La couverture
Titre original :
Pinocchio
Éditeur :
Huginn & Muninn
Date de publication France :
Le 19 octobre 2018
Genre :
Beau livre
Auteur(s) :
Pierre Lambert
Nombre de pages :
240

La critique

rédigée par
Publiée le 09 décembre 2018

En 1995, l’éditeur Démons et Merveilles faisait sensation en offrant à ses lecteurs un sublime ouvrage sur le deuxième long-métrage animé des studios Disney, Pinocchio, le chef-d’œuvre adapté du conte de Collodi sorti en salle en 1940. Écrit par Pierre Lambert, l’une des autorités françaises en matière de cinéma d’animation qui, après avoir travaillé comme attaché de presse pour Walt Disney France, a supervisé de nombreuses ventes aux enchères chez Christie’s et participé à l’organisation de plusieurs expositions dont celle du Grand Palais en 2008, Il Était une Fois… Walt Disney : Aux sources de l’art des studios Disney, le livre était alors un véritable objet de collection qui, avec un contenu et un poids particulièrement imposants, faisait entrer l’animation dans l’univers de ce que les spécialistes appellent les beaux livres, des volumes soignés qui valent autant pour ce qu’ils contiennent dans leurs pages que pour leur beauté intrinsèque. Disney, habitué d’ordinaire à sortir ses écrits via ses propres maisons d’édition, faisait à cette occasion un joli pas vers le public francophone avec ce qui s’apparentait déjà à un objet d’art à part entière.

Toutefois, Pinocchio avait rapidement souffert à l’époque de deux écueils majeurs : un tarif si élevé qu’il laissait sur la touche la plupart des lecteurs… Et surtout une disponibilité finalement si réduite qu’elle impliquait au fil des mois une pénurie inévitable, elle-même à l’origine d’une hausse des prix sur le marché de l’occasion. La rareté provoquait la hausse des prix qui provoquait elle-même la rareté… Le serpent se mordait la queue... Vingt-trois ans plus tard, Pinocchio de Pierre Lambert est aujourd'hui devenu hors de portée de la plupart des fans qui désormais rongent leur frein en observant les prix flamber sur internet en espérant trouver la bonne affaire qui leur permettra de compléter leur bibliothèque… Jusqu’à ce que l’éditeur Huginn & Muninn entre dans la danse.

Dans la veine des éditeurs des années 1990 qui avaient pris l’habitude de traduire les magnifiques ouvrages sur Disney publiés aux États-Unis avant de mettre les uns après les autres la clé sous la porte à l’image du précité Démons et Merveilles qui, malheureusement, rendait son tablier au milieu des années 2000 en ayant toutefois offert au public de superbes ouvrages sur Mickey, Blanche Neige et les Sept Nains et Walt Disney - L'Âge d'Or, la maison Huginn & Muninn basée à New York, San Francisco et Paris reprend en effet le flambeau en proposant aux lecteurs depuis plusieurs années maintenant les traductions en français de nouveaux et beaux ouvrages sur l’œuvre de Disney à l’image de Blanche Neige et les Sept Nains : Toutes les Coulisses d’un Classique de l’Animation, Dans les Coulisses de la Reine des Neiges, Dans les Coulisses de Pixar : 25 Ans d’Art et d’Animation, La Belle et la Bête, dans les Coulisses d’un Classique Disney ou encore Dans les Coulisses de Coco… En parallèle de livres plus généralistes comme Les Pirates Disney, Les Méchants Disney, l’éditeur prend également le pari de remettre en avant d’anciens volumes, à commencer par le Pinocchio de Pierre Lambert.

Abandonnant le fourreau qui, en 1995, renfermait le luxueux ouvrage sur le classique de 1940, l’éditeur aux corbeaux offre ainsi aux lecteurs l'occasion de redécouvrir le livre de Pierre Lambert qui, s’il est cette fois proposé dans une version bien plus accessible, ne perd toutefois rien de ses qualités premières ni de son contenu. Mieux ! Le Pinocchio de 2018, loin d’être une simple réédition de celui de 1995, se voit même enrichi de nouveaux documents inédits qui, à n’en pas douter, raviront tous les fans du petit pantin et tous les fans d’animation en général. Découverts lors de ventes aux enchères, cachés dans les méandres de la Walt Disney Animation Research Library, exposés sur les murs du Walt Disney Family Museum de San Francisco ou bien gardés précieusement par des collectionneurs privés parfois prestigieux comme l’animateur Andreas Deja, les réalisateurs Guillermo Del Toro ou Steven Spielberg ou des historiens comme Didier Ghez, les illustrations s’accompagnent en outre de la présentation écrite par l’auteur pour la première édition et qui présente l’avantage d’apporter toutes les précisions nécessaires pour apprendre qui était Carlo Collodi, l’auteur italien ayant créé le personnage de Pinocchio, mais aussi comprendre le contexte de la réalisation du film et enfin, connaître les artisans ayant œuvré à sa réalisation. Le lecteur en apprend alors notamment un peu plus sur Gustaf Tenggren et Albert Hurter, les deux illustrateurs ayant défini le style au long-métrage, sur Ken Anderson, l’un des responsables du storyboard, sur le décorateur Claude Coats, sur les animateurs Ward Kimball, Art Babbitt, Frank Thomas, Milt Kahl, Fred Moore, Vladimir Tytla, Wolfgang Reitherman et John Lounsbery, ou encore sur Joe Grant, le responsable du Character Model Department décédé en 2005 et à qui l’ouvrage est dédié. En plus d’en savoir plus sur leur vie et leur carrière, ces notes, très intéressantes au demeurant, permettent de rendre à César ce qui est César en citant les noms des créateurs des différentes œuvres disséminées dans le livre et qui, pour la plupart, ne sont pas signées.

En parcourant les 240 pages du livre, le lecteur découvre ainsi une partie du magnifique travail des artistes de Disney reproduit en pleine page avec une qualité d’impression franchement saisissante. Débutant par « L’atelier de Geppetto », Pinocchio offre en mise en bouche quelques-unes des magnifiques études préliminaires de Gustaf Tenggren et certains décors à la gouache et à la mine de plomb de Claude Coats. La vue sur le livre utilisé dans la scène d’introduction du film est, parmi d’autres, de toute beauté. Dans le chapitre suivant, « La Fée Bleue », le celluloïd de Jiminy Cricket en équilibre sur la corde d’un violon, une image extraite de la collection privée de Steven Spielberg (rien que ça !), est elle aussi superbe. Montrant le célèbre grillon dessiné par Ward Kimball, elle révèle le décor de Coats et les détails très subtils que ce dernier a disséminés ça et là comme les reliefs sur l’instrument qui épousent la forme de petits violonistes. La partie intitulée « Sur le chemin de l’école » reste elle aussi dans les annales. Les aquarelles de Tenggren montrant les enfants courant dans les rues sont merveilleuses, tout comme les planches représentant la rencontre entre le pantin et les deux escrocs Grand-Coquin et Gédéon agrémentées d’un dessin d’animation signé John Lounsbery sorti de la collection privée d’Andreas Deja. Tenggren est encore à l’honneur dans les pages suivantes consacrées à Stromboli animé avec force par Tytla dont quelques croquis sont également publiés. Plus loin, la partie sur « L’Île enchantée » fait rêver. La gouache pleine de lumière gardée par la Walt Disney Animation Research Library et représentant les attractions et les tentes de cette fête foraine enchanteresse fait ainsi notamment son plus bel effet, plus encore lorsqu’elle est comparée, quelques pages plus loin, avec un overlay sur décor présentant cette fois la vision cauchemardesque de l’île dévastée. Une fois encore, le lecteur profite des détails imaginés par les peintres de Disney, l’image montrant l’angle de la table de billard étant comme tant d’autres œuvres, juste magique, comme celle représentant le plancher jonché de mégots de cigares, de pommes pourries, de jetons et de dés de casino… Les dessins d’animation de Pinocchio avec ses oreilles d’âne signés Milt Kahl et Frank Thomas finissent de remémorer le caractère terrifiant de la séquence. Pour finir, les fonds marins aux tons délavés de Gustaf Tenggren et une gouache pleine de vie de Cy Young montrant Monstro la baleine emportent le lecteur vers les décors de Claude Coats ainsi que les esquisses et autres croquis représentant la scène finale du film…

Agrémenté d’une bibliographie conséquente, d’un lexique pour comprendre les termes techniques propres à l’animation, et d’une courte biographie de l’équipe ayant œuvré sur le long-métrage, Pinocchio ne souffre d’aucune faiblesse. L’ouvrage, comme son prédécesseur, est riche. Les illustrations, notamment, sont reproduites sur du papier de qualité avec une impression soignée, l’odeur de l’encre rendant la lecture encore plus agréable. Et même s’il se présente cette fois dans une version tout public (39,95 euros), le tome reste un beau livre d’art. Pour s’en persuader, il n’y a qu’à retirer la jaquette pour découvrir la beauté de la couverture d’un blanc immaculé sur lequel ont été reproduits, sur le recto, un très beau dessin de Pinocchio par Frank Thomas, et sur le verso, une recherche graphique magnifique du cocher emportant les enfants vers l’Île enchantée…

De retour dans les librairies, Pinocchio de Pierre Lambert est un ouvrage incontournable pour les fans du petit pantin, pour les amateurs de l’œuvre de Disney et pour les inconditionnels d’animation. De très belle facture, le livre figure parmi les plus soignés dans son genre et aucun lecteur, c’est certain, ne boudera son plaisir en tournant les pages. Les plus assidus ne manqueront d’ailleurs pas de s’emparer d’une loupe pour admirer avec encore plus de plaisir l’œuvre des artisans de Disney magnifiquement mise en valeur…

À noter que pour les lecteurs les plus mordus et les collectionneurs les plus assidus, Huginn et Muninn propose en parallèle une édition spéciale de Pinocchio. D’une taille conséquente de 43,5 x 43,5 cm, celle-ci offre en plus quatre triptyques et une reproduction d’un celluloïd sur décor. Les illustrations sont par ailleurs imprimées sur du papier Magno Satin 250 gr. et sublimées avec un vernis brillant sérigraphique et mat acrylique. La couverture du volume est enfin recouverte d’un entoilage noir avec un marquage du titre à chaud argenté du plus bel effet. Sublime, cette version de Pinocchio est rarissime (750 exemplaires signés par l’auteur). Exclusivement vendue en ligne, il en coûtera toutefois au collectionneur la bagatelle de 400 euros, une somme justifiée par la qualité indéniable du titre.

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