La Reine des Neiges II
La Forêt des Ombres

La Reine des Neiges II : La Forêt des Ombres
La couverture
Titre original :
Frozen II : Forest of Shadows
Éditeur :
Hachette Romans
Date de publication France :
Le 23 octobre 2019
Genre :
Fantasy
Auteur(s) :
Kamilla Benko
Autre(s) Date(s) de Publication :
Disney Press (US) : Le 4 octobre 2019
Nombre de pages :
244

Le synopsis

Trois années ont passé depuis son couronnement, et Elsa règne avec justesse et bienveillance sur le royaume d'Arendelle. Très vite, elle doit effectuer un grand voyage autour du monde, une tradition initiée par son défunt grand-père, le roi Runard. Malheureusement pour elle, Anna n'a pas été conviée à cette extraordinaire aventure. Tandis qu'Elsa achève ses derniers préparatifs, un étrange mal vient subitement frapper le royaume : le pelage des animaux se met en effet à blanchir et les bêtes s'endorment, pendant que les plantes sèchent ou pourrissent...
Désireuse de trouver une solution tout en prouvant sa valeur à sa sœur, Anna récite alors une formule magique trouvée dans un vieux grimoire dissimulé dans le château. La jeune fille pense ainsi mettre un terme au Fléau ; pourtant, les ténèbres qu'elle vient de libérer pourraient bien condamner Arendelle à un destin plus funeste encore...

La critique

rédigée par
Publiée le 22 novembre 2019

Depuis la sortie du premier film d'animation en 2013, la licence La Reine des Neiges est très certainement l'une des plus connues et des plus appréciées dans le monde. Les somptueux décors d'Arendelle, les musiques extraordinaires du long-métrage et l'histoire d'Anna et d'Elsa ont tour à tour émerveillé et ému les spectateurs à travers la planète. Et depuis, les aventures enneigées des deux sœurs ne cessent de fédérer un public sans cesse grandissant. Preuve de l'attachement indéfectible à ces personnages enchanteurs, ce sont chaque année de très nombreux livres centrés sur l'univers de La Reine des Neiges qui sont édités par les différentes maisons d'édition de Disney Book Group, des livres magnifiquement illustrés aux romans d'aventure en passant par les bandes dessinées. Le 4 octobre 2019, à peine un mois et demi avant la sortie du très attendu La Reine des Neiges II, c'est donc un roman tout à fait particulier qui débarque dans les librairies étasuniennes, avant d'être proposé au public français quelques jours plus tard, le 23 octobre 2019 : La Reine des Neiges II : La Forêt des Ombres. Le récit, écrit par Kamille Benko, se propose en effet de faire le lien entre les deux films des Walt Disney Animation Studios, en racontant pour cela une aventure inédite des deux sœurs, lancées dans une quête effrénée à travers tout le royaume d'Arendelle.

Kamilla Benko est une auteure américaine née dans l'état de l'Indiana. Enfant déjà, elle est une mordue de lecture, prenant un immense plaisir à raconter sans cesse ses propres histoires à qui veut les entendre. La vingtaine entamée, la jeune femme entreprend l'écriture d'une trilogie romanesque empreinte de Fantasy, un genre qu'elle apprécie tout particulièrement. Le premier tome, The Unicorn Quest, paraît aux éditions Bloomsbury Children's Books le 20 janvier 2018 et raconte l'histoire de deux sœurs qui découvrent le monde magique d'Arden, dans lequel les licornes ont disparu. Le second tome, The Unicorn Quest : Secret in the Stone, sort l'année suivante, le 19 février 2019 tandis que The Unicorn Quest : Fire in the Star, qui offre la conclusion de l'histoire de ces deux sœurs perdues dans un royaume enchanté, est, pour sa part, proposé en librairie le 18 février 2020.

Avec La Reine des Neiges II : La Forêt des Ombres, Kamilla Benko signe donc pour Disney Press un roman ayant l'ambition de lier les deux aventures sur grand écran d'Elsa et d'Anna. Pour ce faire, l'histoire, racontée à travers les yeux d'Anna, propose fréquemment des références aux aventures présentées dans La Reine des Neiges et se termine par un épilogue, décrivant une courte scène aperçue dans les bandes-annonces de La Reine des Neiges II. Prenant place trois ans après les événements dépeints dans le premier film, le roman décrit ainsi Elsa comme une reine proche de son peuple, mais qui parvient toutefois difficilement à échapper aux craintes sociales que son ancienne vie de réclusion a forgées. Entravée par une enfance passée à l'écart des autres, la jeune femme assure en réalité du mieux qu'elle le peut ses fonctions royales, traînant malgré tout une peur maladive de faillir à ses devoirs de souveraine.
Anna, de son côté, est toujours une jeune fille vive d'esprit et attachante, mais vit aussi sous le joug perpétuel d'angoisses qui l'entravent. La jeune princesse, face au départ imminent de son aînée à la découverte du monde, a en réalité le sentiment d'être abandonnée et se demande si sa sœur a véritablement confiance en elle. C'est d'ailleurs sous la forme d'un conte initiatique explorant le thème de la peur, empreint d'influences scandinaves, que Kamilla Benko a choisi de façonner son récit. Le roman s'ouvre alors sur une adresse au lecteur prenant la forme d'un dédicace : « À tous ceux qui sont assez courageux pour ressentir la peur ». La peur de décevoir, qu'il s'agisse d'un royaume entier ou d'une personne aimée, est un sentiment proprement universel, aussi le lecteur sera-t-il sans aucun doute ému et profondément touché par les obstacles qui se dressent sur le chemin d'Elsa et d'Anna dans La Reine des Neiges II : La Forêt des Ombres.

Toutefois, et si le thème des angoisses est ingénieusement exploité par l'auteure, le roman parait parfois présenter des personnages peu, voire mal développés. Pire, il semble même que, trois années après les événements présentés dans La Reine des Neiges, les deux sœurs ne partagent qu'une complicité somme toute relative. Les peurs d'Anna apparaissent ainsi par moments être complètement justifiées, puisqu'Elsa traite souvent, au fil des pages, sa sœur comme si elle était une enfant. L'auteure multiplie ainsi les scènes dans lesquelles Elsa soupire suite à une remarque ou une bêtise d'Anna, lui parle d'un ton glacial ou la réprimande sévèrement. Certes, le Fléau qui s'abat sur Arendelle dans le roman exige de la reine qu'elle assure avec le plus grand sérieux son devoir. Pour autant, peu nombreux sont les moments dans lesquels les deux sœurs partagent un véritable moment d'amour sororal, donnant par ricochet au lecteur le sentiment qu'Elsa est un personnage parfois plus antipathique que sérieux.
Fort heureusement, Anna peut compter dans son aventure sur le soutien indéfectible de Kristoff. Par bien des aspects, le jeune homme parvient d'ailleurs à se montrer touchant tout au long de sa quête aux quatre coins d'Arendelle. Olaf et Sven sont évidemment de la partie eux aussi, dans un rôle toutefois fortement réduit, le renne bénéficiant malgré cela de quelques lignes de dialogues – délivrées par Kristoff – franchement hilarantes. Le bonhomme de neige aficionado de câlins, lui, est rapidement mis à l'écart, de manière un peu décevante.

Au-delà de son thème particulièrement fédérateur, l'une des grandes forces de La Reine des Neiges II : La Forêt des Ombres réside dans la multiplicité des références qui sont faites à la mythologie d'Arendelle au fil des pages. À travers les légendes du royaume racontées dans divers poèmes épiques, le lecteur apprendra tout des nombreux faits d'armes du mythique héros Aren qui, au moyen de son épée offerte par le soleil en personne, créa le fjord d'Arendelle. En plus de ces références légendaires bien senties, Kamilla Benko s'est semble-t-il amusée à glisser une jolie référence à un autre film des Walt Disney Animation Studios dès le début de son roman. Lors de son tour du monde, il est en effet prévu qu'Elsa fasse escale dans de très nombreux royaumes, dont celui d'une princesse adorée des fans. Ce clin d'oeil ravira à coup sûr les lecteurs friands de théories en tout genre, qui aiment à lier entre eux les différents films d'animation de Disney.
Pour compléter les légendes d'Arendelle développées dans La Reine des Neiges II : La Forêt des Ombres, l'auteure s'inspire également grandement de la mythologie scandinave et parsème son récit de références au folklore nordique plus ou moins appuyées, dont les Huldres, des êtres facétieux ou le cauchemardesque Nattmara. Palpitante, l'histoire du roman ne souffre en réalité que du développement du personnage d'Elsa et d'une résolution de l'intrigue qui, si elle entre tout à fait dans les standards du genre, semble un peu trop rapide.

Le roman original, Frozen II : Forest of Shadows, peut donc sans peine se targuer d'être un joli conte d'aventure idéal pour replonger dans le royaume magique d'Arendelle : mais voilà, sa version française, elle, est proprement honteuse ! À partir du roman de 416 pages, Hachette Romans a en effet choisi d'éditer un livre qui n'en compte plus que 242 ; le texte original ainsi élagué à coups de hache, seules subsistent les scènes d'action et de dialogues, en limitant au passage au minimum syndical les descriptions et les moments d'introspection d'Anna. L'un des exemples de ces coupes malheureuses se trouve d'ailleurs dès le début du roman. Dans le second chapitre du livre original, Anna pense à la disparition de ses parents et se remémore la douloureuse solitude avec laquelle elle dut gérer son deuil, Elsa ayant désespérément gardé porte close. Toutefois, le temps faisant son œuvre, la jeune princesse parvint peu à peu à se souvenir des moments de joie partagés avec ses parents, avant d'évoquer qu'elle a pu se confier à Elsa une fois leur complicité retrouvée. Ce passage, à la fois court et poignant, vient alors renforcer l'anxiété qu'éprouve Anna à la simple idée de perdre sa sœur, comme elle a jadis perdu ses parents. La version française occulte, elle, complètement ces quelques paragraphes d'introspection (et beaucoup d'autres encore), réduisant dans le même temps à peau de chagrin la psychologie d'Anna, bien moins développée que dans le roman original.

La traduction française de La Reine des Neiges II : La Forêt des Ombres, assurée par Amélie Sarn, est toutefois de bonne facture. Naviguant bien malgré elle à travers ces innombrables matraquages du texte original, la traductrice parvient – cela en devient presque un exploit – à livrer une version fluide de l'histoire, mais dans laquelle ne demeurent fatalement qu'en grande majorité les scènes d'action. Seules deux erreurs de traduction viennent alors se glisser dans son travail particulièrement convainquant. La première se trouve dans le premier chapitre, quand le lecteur fait la connaissance d'Ada et de Tuva Diaz, un couple de femmes forgeronnes d'Arendelle. Dans la version française, Tuva change malheureusement de sexe pour devenir un homme, effaçant de fait la présence d'un couple de même sexe à Arendelle. La seconde erreur de traduction intervient, elle, quelques chapitres plus loin, lorsque le personnage d'Oaken entre en scène. N'ayant rien perdu de son charme bavarois en version originale, saluant les héroïnes de son hilarant « Hoo-hoo » et ponctuant ses phrases interrogatives de son « ja ? » si caractéristique, le personnage perd quelque peu de sa superbe en français, en adoptant un langage en tout point semblable à celui des autres personnages. Ces erreurs, certes fâcheuses, n'entachent toutefois en rien la cohérence de l'histoire que la traductrice s'est fait un devoir de respecter, malgré des contraintes semble-t-il infernales. Il est enfin à regretter que l'édition française reprenne en guise de couverture l'une des affiches promotionnelles de La Reine des Neiges II au lieu de proposer au lectorat français la somptueuse illustration de couverture de l'édition originale dessinée par Grace Lee, montrant Anna et Elsa en plein cœur de l'angoissante forêt.

La Reine des Neiges II : La Forêt des Ombres est un véritable cas d'école. D'un récit d'aventure tout à fait plaisant en version originale, le roman devient en français un pathétique concentré d'action presque indigeste qui ne laisse aucune place au développement des personnages, Anna en tête. Si Elsa n'est véritablement attachante dans aucune des deux éditions, le roman original a au moins le mérite d'emmener le lecteur dans une quête épique au royaume d'Arendelle, tout en lui laissant le temps de respirer entre deux scènes d'action majeures. Après ce massacre à la tronçonneuse, le lecteur français sortira quant à lui de cette Forêt des Ombres à bout de souffle, dépité devant le manque de respect manifeste de l'éditeur à son égard.

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