Alice Davis
Date de naissance :
Le 26 mars 1929
Lieu de Naissance :
Escalon, en Californie, aux États-Unis
Date de Décès :
Le 04 novembre 2022
Lieu de Décès :
Aux États-Unis
Nationalité :
Américaine
Profession :
Costumière
Imagineer

La biographie

rédigée par Karl Derisson
Publié le 10 novembre 2022

Au début des années 1960, Walt Disney décide d’impliquer ses studios dans l’organisation de l’Exposition universelle de New York. Quatre spectacles sont alors conçus pour l’événement dont l’inauguration est prévue en avril 1964. Tous les employés des WED Enterprises (aujourd'hui Walt Disney Imagineering) sont aussi mis sur le coup. Les délais étant très courts et le travail à faire immense, Disney décide en outre de recruter de nouveaux talents parmi lesquels la pétillante Alice Davis.

Alice Estes Davis naît le 26 mars 1929 à Escalon, à environ cent-cinquante kilomètres à l’est de San Francisco. Rapidement, sa famille quitte le nord de la Californie pour s’installer dans la banlieue de Los Angeles. Sur la route qui la mène chaque jour à l’école, Alice Davis passe alors devant l’Institut Chouinard, l’école d’art fondée en 1921 par Nelbert Chouinard qui se situe à seulement deux pâtés de maisons de chez elle. Véritable ruche où des centaines d’artistes de talent ont étudié, l’établissement inspire immédiatement une grande fascination pour l’adolescente qui, de temps en temps, s’autorise à pousser les portes pour aller admirer les œuvres exposées dans le hall. Nourrissant dès lors une véritable passion pour le dessin dont elle veut un jour faire son métier, Alice Davis poursuit ses études sur les bancs de la Long Beach Polytechnic où elle suit les cours d’art de Miss Warner. Diplômé à l’été 1947, elle obtient alors une bourse lui permettant de payer les frais d’inscription de l’Institut Chouinard. Heureuse, Alice Davis voit cependant son rêve s’écrouler bien vite. Ses parents ne peuvent en effet la conduire chaque jour à l’école. La nouvelle résidence familiale achetée à Long Beach est par ailleurs située trop loin pour lui permettre d’y aller à pied... Effondrée, Alice Davis ne peut retenir ses larmes. Sa maman l’oblige alors à persévérer et à déposer un portfolio auprès des services de la Long Beach Art Association afin d’obtenir une aide financière supplémentaire. Ne se faisant guère d’illusion, Davis accepte de faire la démarche. Elle n’y croit pas beaucoup. Mais contre toute attente, elle est reçue !


Nelbert Chouinard

En mesure de s’installer à quelques rues de l’Institut Chouinard, Alice Davis rayonne à nouveau de bonheur. Avec d’autres jeunes, elle est reçue par Nelbert Chouinard qui l’aide à prendre ses marques. Mais sa joie est une fois encore de courte durée. Toutes les places pour cette année et la suivante sont en effet déjà prises par de jeunes artistes revenus du front. Si Alice veut assister aux cours de l’Institut, elle devra donc attendre deux années supplémentaires. Expliquant son désarroi, elle attire l’attention de Nelbert Chouinard qui accepte de faire un geste. Après avoir consulté ses directeurs, elle informe Alice Davis qu’elle pourra bel et bien commencer la semaine prochaine. Toutefois, les sections arts étant déjà pleines, la jeune femme devra se contenter de la section couture et costumes. C’est la seule spécialité de l’école où il reste de la place. Bien que ce ne soit pas du tout ce qu’elle envisageait de faire, Alice Davis accepte... Et avec acharnement, elle ne tarde pas à y faire ses preuves. Son travail est de qualité. Son sérieux et son assiduité sont reconnus. Pour la récompenser, Nelbert Chouinard accepte de la laisser suivre deux autres cursus : le dessin et l’animation. C’est ainsi qu’Alice participe aux cours du soir dispensés par les plus grands dessinateurs et animateurs de la région. La plupart travaillent à l’époque pour les studios Disney qui aident au financement de l’Institut. Chaque jeudi soir, Alice assiste en particulier aux lectures données par l’animateur Marc Davis.


Marc Davis

Possédant une belle fibre artistique et un talent certain pour la confection, Alice Davis débute sa carrière quelques années plus tard au sein de la société Beverly Vogue & Lingerie House. Il s’agit de l’une des plus prestigieuses maisons de lingerie de Los Angeles. La jeune femme est comblée. Très vite remarquée par ses supérieures, elle est promue au poste de conceptrice en chef au bout de seulement deux ans. Alice Davis travaille ensuite durant deux saisons pour Davis Pleating Company avant d’intégrer les rangs de la Textile Corporation of America. En seulement quelques années, l'artiste est parvenue à se faire un nom dans le milieu de la mode. Reconnue pour son talent et sa parfaite maîtrise des tissus, elle est un jour recontactée par Marc Davis. L’animateur travaille à l’époque sur le personnage d’Aurore, l’héroïne de La Belle au Bois Dormant. Pour l’aider, il peut compter sur le concours de la comédienne Helene Stanley engagée comme modèle pour la princesse. Maîtrisant parfaitement l’anatomie humaine, Davis souhaite toutefois parfaire sa technique et insuffler davantage de réalisme à ses dessins, notamment en ce qui concerne l’animation des vêtements portés par le personnage. Il a dès lors besoin de voir comment bouge le tissu lorsque Stanley exécute ses pas de danse. Marc Davis demande donc à Alice de confectionner le costume champêtre de la princesse en s’inspirant des concept arts qu'il a lui-même dessinés au début de la production.


Helene Stanley

Cette première expérience chez Disney est particulièrement plaisante pour Alice Davis. Elle reste cependant tout à fait informelle. Aucun contrat n’est en effet signé et il n’est en aucun cas question pour elle d’être engagée par les studios. Malgré tout, cela lui a donné l’occasion de travailler dans le domaine du dessin et de l’animation, ses premières passions. Surtout, cela lui a permis de renouer le lien avec son ancien professeur, Marc Davis, avec qui elle sympathise. À la demande d’Alice, il participe un soir au pot de départ d’un ami sur le point de s’installer au Mexique pour y étudier la sculpture. Venu seul, l’animateur en profite pour discuter longuement avec son ancienne élève et en apprendre plus sur elle. Tous les deux se trouvent alors des points communs. Malgré leur différence d’âge et leurs treize ans d’écart, ils commencent à sortir ensemble de plus en plus régulièrement. Tombés amoureux, ils se marient en juin 1956.


Marc et Alice Davis

Cultivant une belle passion pour l’art, Alice et Marc s’installent ensemble dans une maison qu’ils transforment bientôt en un véritable musée. Les œuvres d’art, les toiles, les sculptures et les objets ethniques s’entassent en effet partout. Amateur de bonne chair et de bon vin, le couple apprécie en outre de sortir dîner dans les meilleurs restaurants de Los Angeles. Accoudés au bar du Tam O’Shanter en attendant d’avoir une table, Alice et Marc Davis ont un soir de 1957 la surprise de croiser Walt Disney. Accompagné par sa femme Lillian, le papa de Mickey tient à faire la connaissance de celle que son animateur a épousée dix mois plus tôt. Partageant un verre, il la questionne notamment sur son travail et ses passions. La discussion dure ainsi pendant une bonne trentaine de minutes. « Vous savez, Alice », lance alors Walt avant de laisser ses amis dîner tranquillement, « Je suis sûr que nous serons amenés à nous revoir. Il est même fort probable qu’un jour, vous travailliez pour moi ! ».


Le Clown et l'Enfant

Ne manquant pas à sa parole, Walt Disney contacte en effet Alice Davis quelques semaines après leur rencontre afin qu'elle travaille sur certains épisodes de son émission de télévision. Davis collabore également avec Gertrude Casey et Chuck Keehne pour créer les costumes du film Le Clown et l’Enfant avec Kevin Corcoran. Une fois encore, aucun contrat n’est promis. C’est une expérience ponctuelle. Mais Alice Davis savoure néanmoins l’instant. Walt Disney lui-même est conquis par son travail et sa personnalité.

Lorsque Disney se met à la recherche de talents et de bras supplémentaires pour augmenter ses équipes au moment de concevoir les spectacles prévus pour l’Exposition de New York, il pense alors immédiatement à Alice Davis. Quatre attractions sont en effet en cours de fabrication : le Ford’s Magic Skyway et sa plongée au cœur d’un monde préhistorique, Progressland et son exposé sur l’électricité à travers les époques conçu pour General Electric, l’Audio-Animatronic d’Abraham Lincoln sponsorisé par l’État de l’Illinois et Children of the World, une promenade en barque à la rencontre des enfants du monde entier financée par Pepsi en faveur de l’UNICEF. Si les trois premières attractions sont bien avancées et pour certaines sur le point d’être achevées, la croisière Children of the World est quant à elle encore à l’état d’ébauche. Le partenariat avec Pepsi et l’UNICEF n’a en effet été signé qu’au début de l’année 1963. Il ne reste donc qu’un an aux équipes des WED Enterprises pour la fabriquer.

Walt Disney augmente donc ses effectifs. Il contacte en particulier l’illustratrice Mary Blair qui, quinze ans plus tôt, avait fait des merveilles en tant que directrice artistique de Cendrillon, Alice au Pays des Merveilles et Peter Pan. Disney décroche aussi son téléphone pour appeler Alice Davis à qui il confie la création des costumes qui serviront à habiller chacune des poupées. Première costumière engagée à plein temps par WED, l’artiste est alors ravie de travailler avec Mary Blair dont elle admire l’œuvre. Toutes les deux passent alors des heures à discuter des couleurs et des formes. Davis apprécie en outre de collaborer avec Disney qui lui demande de produire le meilleur sans se soucier des coûts. Chargées des costumes, Alice Davis commence par potasser les anciens numéros de la revue National Geographic conservés dans la bibliothèque des studios. Elle visite de nombreux musées et passe également beaucoup de temps au téléphone avec les consulats et les ambassades installées à Los Angeles.


Mary Blair et Alice Davis

Au final, Alice Davis dessine et conçoit cent-cinquante costumes créés chacun en deux exemplaires afin de faire face à de possibles accidents et surtout à l’inévitable usure des textiles provoquée par les mouvements perpétuels des automates. Heureux d’arpenter les ateliers de WED et de discuter avec ses employés, c’est un spectacle haut en couleur que Walt Disney découvre donc à la fin de l’automne 1963. Rebaptisée it’s a small world, un nom emprunté au titre de la chanson composée par les frères Sherman, l’attraction est ensuite envoyée à New York afin d’y être assemblée. Lors d’une visite de contrôle, Walt est cependant perplexe au moment de découvrir la scène parisienne avec ses danseuses de cancan. Il ne comprend en effet pas pourquoi Alice Davis a rajouté des sous-vêtements longs sous les robes de chacune des poupées. Alice Davis aurait alors pu lui expliquer qu’il s’agissait de cacher autant que faire ce peu les articulations en métal des automates et d’éviter que les spectateurs voient de la fausse peau en caoutchouc pendre négligemment. Mais la costumière préfère botter en touche. « Walt, vous m’avez demandé de créer un spectacle pour toute la famille, vous ne vous souvenez pas ? », ironise-t-elle. Disney éclate de rire.


it's a small world

Après la fermeture de l’Exposition universelle, Alice Davis et son mari Marc reprennent le travail engagé sur l’attraction Pirates of the Caribbean. « Après avoir fabriqué de mignons petits bébés, voilà que je me retrouve à habiller de sales vauriens », plaisante alors la costumière chargée de concevoir des dizaines de tenues de pirates. Une nouvelle difficulté est néanmoins présente. Chaque automate est en effet boulonné à ses accessoires ou à des éléments de décors. L’un est assis à califourchon sur un canon. Un autre est appuyé sur un tonneau. Un autre est vautré dans la boue au milieu des cochons. Impossible, dès lors, de leur enfiler le moindre vêtement. Alice Davis trouve donc une parade en fabriquant des costumes en différents morceaux ensuite assemblés grâce à des boutons et des bandes de velcro.

Achevé après la mort de Walt Disney survenue le 15 décembre 1966, le travail sur Pirates of the Caribbean fait partie de travaux les plus épanouissants et amusants de la carrière d’Alice Davis. Cependant, une certaine tension plane dans les ateliers. Quelques employés sont en effet jaloux de leur collègue. Ils estiment que son mariage avec Marc Davis lui confère certains passe-droits. Ils imaginent qu’elle a le droit de tout faire sans jamais rendre de compte à personne. Ils se méfient par ailleurs du fait que Marc et elle sont des amis très proches de Roy et Edna Disney. Ce qu’ils ignorent, c’est qu’Alice Davis ne dispose en réalité d’aucune liberté. Surtout, elle est payée moins qu’eux et ne bénéficie d’aucun salaire pendant ses congés ou lorsqu'elle est malade.


Pirates of the Caribbean

Agacés par le fait qu’Alice Davis leur demande de fabriquer chaque costume en deux exemplaires, un travail qu’ils estiment faussement inutile, certains employés décident de se plaindre auprès de la direction. D’autres vont directement voir Marc Davis. Pour calmer le jeu et éviter d'autres querelles, il demande bientôt à sa femme de se retirer. Le divorce du couple est dans la balance. Alice consent dès lors à démissionner. Avant cela, elle entend malgré tout terminer les travaux engagés. Elle participe ainsi à la création des costumes de l’attraction Flight to the Moon. Elle reprend aussi certains vêtements du spectacle Progressland rapatrié à Disneyland et rebaptisé pour l’occasion Walt Disney’s Carousel of Progress.


Marc et Alice Davis

Après son départ, Alice Davis continue malgré tout de soutenir son mari Marc jusqu’à sa retraite en 1978. Au cours des années suivantes, tous les deux participent alors à diverses conventions de fans, aux panels et expositions organisés au sein du Walt Disney Family Museum de San Francisco et à de nombreuses œuvres de bienfaisance, en particulier les soirées caritatives organisées par l’Institut CalArts pour lequel ils servent en tant que consultants. L’âge avançant, ils acceptent aussi de témoigner dans divers reportages et autres émissions afin de perpétuer auprès des nouvelles générations la mémoire de Walt et le souvenir de leur travail au sein des studios Disney.

Le 17 septembre 2004, The Walt Disney Company décide de récompenser Alice Davis en lui remettant un Disney Legends Award pour l’ensemble de sa carrière. Cinq ans plus tard, le 10 mai 2012, Disneyland honore à son tour l’artiste en lui dédiant une fenêtre sur Main Street, U.S.A.. Portant la mention « Small World Costuming, Co. – Alice Davis – Seamstress to the Stars”, elle est installée sur la façade du Main Street Cinema juste à côté de celle de son cher Marc décédé le 12 janvier 2000.

Couronnée par un June Foray Award remis en 2014 pour son engagement en faveur de l’art de l’animation, Alice Davis est décédée le 4 novembre 2022. Elle avait quatre-vingt-treize ans.

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