John Henry
L'écran titre
Titre original :
John Henry
Production :
Walt Disney Animation Studios
Date de sortie USA :
Le 30 octobre 2000
Série :
Genre :
Animation 2D
Réalisation :
Mark Henn
Durée :
9 minutes
Disponibilité(s) aux États-Unis :

Le synopsis

Polly, veuve de John Henry, raconte à son fils l'histoire de son père devenu un légendaire héros afro-américain du folklore outre-Atlantique.

Ou comment un homme, au péril de sa vie, défia une machine pour sauvegarder l'emploi de toute une communauté ?

La critique

rédigée par

La princesse et la grenouille n'est pas la seule production animée des studios Disney à mettre en scène un héros afro-américain. En 2000, John Henry constitue, en effet, ce qui apparait encore à l'époque, comme une audace, alors même que la lutte pour l'égalité des droits a déjà plus de quarante ans derrière elle. Le thème retenu, s'il devait être mal traité, fait, il est vrai, courir des risques certains en terme d'image à la compagnie de Mickey toute entière, susceptible de braquer contre elle l'une ou l'autre des communautés formant la nation américaine. Ce n'est pourtant pas la première fois que le studio au château enchanté s'attaque aux légendes du folklore U.S. Que cela soit en animation (Pecos Bill, Paul Bunyan, Casey Jones, Mighty Casey et même Benjamin Franklin) ou en "live" (Davy Crockett, Le renard des marais...), Walt Disney, a, en effet, lui-même initié ces productions, fruits d'une passion qu'il entretenait pour ces histoires aux relents patriotiques évidents. Le Maître décédé, il faut attendre 1995 pour voir sa signature revenir sur le terrain des légendes américaines, abordées dans un film "live", Les légendes de l'ouest. Si John Henry fait partie du long métrage, rien ne permet de dire que ce dernier a servi de déclic à Mark Henn, le réalisateur du court-métrage. Juste, est-il possible d'en souligner la forte probabilité...

Dans l'histoire la plus répandue, dès sa naissance, John Henry est un solide gaillard dont le gabarit et la force sont hors normes. Devenu à l'âge adulte un "pousseur d'acier", il participe par son travail, comme de milliers autres ouvriers, essentiellement noirs, à prolonger le chemin de fer vers l'Ouest des Etats-Unis, à travers les montagnes. Quand le patron du chantier décide de recourir à la machine pour remplacer des centaines d'hommes, John Henry défie l'inventeur et se lance dans une course effrénée contre le marteau à vapeur. Victorieux, il est malheureusement terrassé sur la ligne d'arrivée, par une crise cardiaque.
L'histoire de John Henry, symbole de la lutte des classes du XIXe siècle, illustre les conséquences du progrès technique sur la vie des hommes et notamment le déclin des labeurs traditionnels tout en participant, au delà, à la représentation mythique d'un groupe spécifique issu du melting-pot nord-américain.

Cinq ans ont été nécessaires pour réaliser John Henry. Le cartoon a été entièrement produit aux studios Walt Disney Feature Animation de Floride entre les productions de Mulan et de Lilo & Stitch, permettant ainsi d'occuper les nombreux artistes "maison". Nul ne savait à l'époque que l'entité de productions disneyennes située en Floride fermerait ses portes quelques années plus tard après la sortie de son troisième long-métrage d'animation, Frère des ours.

Mark Kenn, animateur de Mulan, s'essaie donc pour la première fois, avec John Henry, à la réalisation. Il affiche de suite sa volonté de renouer avec l'ambition des cartoons expérimentaux produits par Disney dans les années 50, à l'exemple des (Les) Instruments de Musique, en reprenant toutefois un style de dessins proche de celui des années 60, tel Les 101 dalmatiens ou Le livre de la jungle. Le trait des animateurs est ainsi bien visible, quitte à laisser apparentes, ici ou là, les lignes techniques. L'aspect global du court-métrage est certes authentique mais déroute plus d'une fois le spectateur. Au delà de la pure technique d'animation, le cartoon prend le temps de définir correctement ses personnages, rôle-titre comme secondaires, à commencer par l'épouse, Polly, particulièrement rayonnante. La bande-son, elle aussi, n'est pas en reste avec des prestations enthousiasmantes (et notamment la chanson John Henry) signées du groupe "The Sounds of Blackness". La qualité technique du court-métrage participe à l'évidence à développer un peu plus la force de sa thématique, déjà fort ambitieuse à la base. Non content de mettre en vedette un héros afro-américain, John Henry tient, en effet, également, un discours engagé (dont la portée s'inscrit certes dans un confortable "politiquement correct") et affiche un fin tragique, loin du "tout est bien qui finit bien", traditionnel chez Disney.

John Henry ne bénéficie pas à sa sortie de tout le soutien qu'il mérite. Il est, en effet, proposé, en octobre 2000, en avant-programme d'une ressortie de L'étrange Noël de Monsieur Jack dans un seul et unique cinéma de Los Angeles (El Capitan Theatre, propriété de Disney), pendant trois malheureux jours, juste le dit de pouvoir prétendre à une nomination aux Oscars. Nomination qui n'arrivera jamais tant le studio de Mickey apparu particulièrement timoré dans son soutien au court-métrage. Disney, traumatisé pas la polémique suscitée un temps par la réédition cinéma de Mélodie du sud (œuvre black-outée depuis, sur décision personnelle des présidents successifs de la Walt Disney Company, Mickael Eisner et Bob Eiger), déstabilisé par la bronca née autour du titre de leur prochain film d'animation 2D, La Princesse et la Grenouille, qui, sous la pression d'associations afro-américaines s'est vu privé de son nom originel, La Princesse Grenouille, a décidément bien du mal à faire vivre des héros noirs !

Pour la Direction de Disney de l'époque, l'activité des cartoons, alors extrêmement marginale et quantité négligeable, ne justifiait pas, il est vrai, de prendre un risque de polémique, John Henry ayant, en plus, l'inconvénient d'avoir été "fabriqué" par des blancs, argument que les associations afro-américaines ne manqueront pas de soulever pour contester sa légitimité. Le court-métrage connait cependant une nouvelle exposition à la télévision sur Disney Channel, en 2001, dans le cadre d'un mois de diffusion thématique tournant autour de l'histoire afro-américaine. En 2002, il est annoncé en avant-programme pour la sortie nationale au cinéma de Peter Pan 2 : Retour au Pays Imaginaire mais "rate" finalement le rendez-vous, sans raison officielle. Le public se console en le retrouvant, la même année, en vidéo, dans la compilation Légendes américaines, bien qu'il s'agisse ici d'une version recadrée au niveau de l'image et amputée de ses génériques de début et de fin.

Magnifique cartoon, John Henry mérite assurément une meilleure exposition que celle qui lui a été réservée depuis sa sortie.

L'équipe du film

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