Le Transporteur
L'affiche du film
Titre original :
The Transporter
Production :
EuropaCorp
Date de sortie USA :
11 octobre 2002
Distribution :
20th Century Fox
Genre :
Action
Réalisation :
Louis Leterrier
Corey Yuen
Musique :
Stanley Clarke
Durée :
92 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Frank Martin est LE transporteur. Il livre ainsi n’importe quoi, n’importe où, sans poser de questions et au bon prix. Pourtant, un jour, il découvre qu’il transporte une jeune fille ligotée : troublé, il va alors tenter de l’aider et devra alors autant faire face à des gangsters qu’à la Police...

La critique

Publiée le 10 décembre 2019

Le Transporteur est un film réalisé par Louis Leterrier et Corey Yuen, sorti en 2002. Les scénaristes Luc Besson (Le Grand Bleu en 1988, Le Cinquième Elément en 1997) et Robert Mark Kamen (Karate Kid en 1984, L'Arme Fatale 3 en 1987, Taken en 2008) se sont inspirés pour lui d'une série de courts-métrages produits par la marque automobile allemande BMW en 2001, The Hire.

Dans chaque épisode de cette mini-série, le spectateur suit ainsi un personnage : Le Conducteur, incarné par Clive Owen. La plupart du temps, il se voit confier une mission périlleuse au volant d'un véhicule BMW. Sauver un otage, protéger un politicien ou encore faire une course contre le diable en personne pour sauver une âme. Selon les épisodes, de nombreuses guest-stars apparaissent tel que Don Cheadle (le colonel Rhodes/War Machine du Marvel Cinematic Universe), Madonna ou encore Marilyn Manson. Les courts-métrages sont en outre réalisés soit par des jeunes cinéastes, soit par des réalisateurs connus tels que Tony Scott (Top Gun en 1986), John Woo (Chasse à l'Homme en 1993, Volte / Face en 1997) ou encore Ang Lee (Tigre et Dragon en 2000, Hulk en 2003, Le Secret de Brokeback Mountain en 2005).
Avec une base comme celle-ci, il était donc aisé pour Luc Besson d'imaginer un long-métrage d'action. Il confie alors son scénario à Louis Letterier et Corey Yuen via sa société de production EuropaCorp. Encore auréolé de beaux succès populaires comme Taxi 2 (2000) ou Le Baiser Mortel du Dragon (2001), le label se lance ici dans l’aventure américaine ; le film étant distribué aux États-Unis par 20th Century Fox. Si tout peut laisser à penser à une belle production française, l'opus reste en réalité calibré pour un public international, bien plus large. Entièrement tourné dans la langue de Shakespeare, c’est d’ailleurs un acteur britannique qui tient ici le rôle du Conducteur, rebaptisé le Transporteur. 

Jason Statham, puisque c'est lui dont il s'agit, est un ancien nageur olympique, plus précisément un plongeur. Un atout non négligeable quand il lui faudra exposer un corps sculpté par des années de pratique sportive, que ce soit pour les scènes d’action ou pour les scènes plus sexy. Après sa carrière sportive, l’acteur épouse, en effet, assez logiquement une carrière de mannequin pour des grandes marques de jeans notamment. Il est alors repéré par le réalisateur Guy Ritchie (Aladdin en 2019) pour jouer dans Arnaques, Crimes et Botanique en 1998 puis Snatch : Tu Braques ou tu Raques en 2000 deux films dans lesquels Statham occupe un rôle de loubard des mauvais quartiers de Londres.
Le casting anglo-saxon du (Le) Transporteur se voit ensuite complété par l’américain Matt Schulze, un habitué des rôles de « bad guy » caricaturaux déjà vu dans Blade en 1998 et Blade 2 en 2002 (dans deux rôles différents) puis dans Fast and Furious en 2001 ou encore le passablement mauvais Torque, la Route s'Enflamme de 2004. Le Transporteur a dès lors tout pour plaire aux fans de séries B américaines tandis que la French Touch intervient à un autre niveau avec notamment la présence de François Berléand (Les Choristes en 2004) incarnant l’inspecteur Tarconi, un flic à la Columbo qui ne manque pas de second degré. 

Mais la vraie spécialité française du début des années 2000, c’est bien l’inclusion dans des productions françaises d’une note de cinéma asiatique. Une mode que lance Luc Besson en grand fan de cinéma d’action dès 2001 en produisant et scénarisant Le Baiser Mortel du Dragon avec rien de moins que Jet Li dans le rôle-titre. Suivront la même année Wasabi et Yamakasi qui auront un cadre plus japonais. Chacun de ces films emprunte ainsi au cinéma asiatique ses codes et les intègre à des histoires et des œuvres bien françaises. 
Concernant Le Baiser Mortel du Dragon et Le Transporteur, c’est d'ailleurs précisément vers le cinéma hongkongais que Luc Besson regarde. En atteste aussi la présence au casting de Shu Qi, une actrice taïwanaise très réputée localement mais moins en occident, qu’il est possible de voir dans Jackie Chan à Hong Kong en 1999 ou dans le film à sketches New York, I Love You en 2009.
À noter que ce casting international restera gravé dans l’esprit du réalisateur français. Il déclarera plus tard à son sujet :

Jason ne parlait qu'anglais, François faisait tous les efforts du monde pour parler anglais et Shu Qi avait besoin d'un interprète pour comprendre cette langue ! Chaque instruction devait être expliquée à chacun à sa façon, le plus calmement et le plus rapidement possible. Un vrai cauchemar qui nous a valu quelques fous rires...

L'artiste crédité comme co-réalisateur est Corey Yuen, l’un des Seven Little Fortunes, une troupe d’artistes martiaux élèves de l’Académie d'étude du théâtre chinois. Dans cette troupe, se comptent ainsi des acteurs et producteurs qui ont participé à la renommée du cinéma d’action Made in China tels que Jackie Chan (Drunken Master en 1978, Police Story en 1985, Rush Hour en 1998) ou Sammo Hung (Le Flic de Shanghaï en 1998). Fort de ces informations, il est maintenant possible de comprendre que Le Transporteur est certes un film français, mais avant tout cosmopolite. Si l’adaptation du scénario et la production sont signés Luc Besson, Corey Yuen réalise lui les scènes d’action tandis que Louis Letterier, encore jeune réalisateur, n’est crédité qu'en qualité de directeur artistique dans la version américaine. Cette collaboration est toutefois vue aujourd'hui comme sa toute première réalisation, lui qui avait notamment fait ses armes en tant qu’assistant réalisateur sur Alien, la Résurrection en 1997 de Jean-Pierre Jeunet et Jeanne d’Arc en 1999 où il rencontre Luc Besson. Pour Marvel Studios, Louis Letterier réalisera L’Incroyable Hulk de 2008, l’électron libre de la première phase du MCU.

Pour ce qui est de l’histoire, il est évident qu'il ne s'agit pas ici de devenir le nouveau maître étalon du thriller : la scène d’exposition, remplissant sa mission, montre d'ailleurs assez bien ce qui attend le spectateur.
L’action se passe donc dans le Sud de la France, à Nice pour être précis. Quatre braqueurs sortent l’arme au poing d’une banque et montent dans une grosse berline noire. Au volant, Frank Martin, le Transporteur, leur fait rapidement comprendre qu’il ne démarrera pas car ils n’ont pas respecté le contrat. Le Transporteur est calme, avec un certain flegme britannique, et ne transige pas même quand le chef des braqueurs lui braque son arme sur la tempe. Il explique calmement les règles de son contrat de transport et qu’elles sont calculées au gramme près. En effet, un homme en plus à transporter, c’est du poids en plus, donc une consommation plus importante d’essence ainsi qu’une perte de vitesse ! Il ne serait dès lors plus en mesure d’assurer la mission jusqu’au bout. Pressé par la police qui arrive, le chef des braqueurs se résigne à abattre de sang-froid l’un de ces comparses et éjecter son corps de la voiture. Frank Martin accepte alors de démarrer, ce qui marque le début d’une course-poursuite avec les forces de l’ordre dans les rues de Nice.
Enfin, c’est surtout ce que le film tente de faire croire car un œil expert s’apercevra rapidement que les différents plans sur la promenade des Anglais sont quelque peu incohérents avec les rues sinueuses de Villefranche-sur-Mer, commune voisine située à presque 10 km de là... Mais il faut bien savoir jouer avec « la magie d’Hollywood » ! L'opus offre donc un beau panorama de la Côte d’Azur, le tournage prenant place à Marseille, Cannes, Nice ou encore Menton et Monaco.

Pour les scènes de poursuites, il faut reconnaître que le travail effectué est soigné. Les gros plans, courts, avec beaucoup de cut et en sus les commentaires des policiers français à chaque fois que Frank leur échappe sont dynamiques et burlesques à la fois. C’est une méthode à la Taxi qui a fait ses preuves et qui est reprise ici tant elle fonctionne toujours aussi bien. Le flegme de Statham, parfois doublé mais assurant quelques cascades, contrebalance parfaitement avec la frayeur des braqueurs, ce qui rajoute un coté comique à la scène. Une fois arrivé à bon port, les brigands demandent ainsi à Frank de prolonger le trajet mais il refuse une nouvelle fois, arguant que ce n’était pas dans le contrat ! Les petites frappes décident donc de continuer seuls et... se font rapidement rattrapés par la Police.

En fait, Frank Martin respecte quatre règles dans son travail et qui résument toute l’efficacité du Transporteur :
Règle numéro 1 : ne jamais modifier le contrat.
Règle numéro 2 : pas de nom.
Règle numéro 3 : ne jamais ouvrir le colis.
Règle numéro 4 : n'enfreindre les règles sous aucun prétexte.

Après son contrat à Nice et la visite de l’inspecteur Tarconi, Frank en conclut une routinière : la livraison d'un sac. Pas de problème particulier donc sauf que... poussé par la curiosité, Frank enfreint une de ses régles d'or : il ouvre le sac... qui contient une fille ligotée ! Et c’est bien là que l’aventure commence: une seule règle non respectée et l'effet boule de neige est garanti.

Le schéma scénaristique est donc, à l'évidence, assez classique. Il reprend un modèle qui a fait ses preuves. Le héros est au mauvais endroit au mauvais moment. Tel John McClane dans Die Hard, Frank Martin est un professionnel, ici un ancien militaire reconverti, et il va devoir utiliser ses talents pour se sortir d’une situation dangereuse. En l’occurrence, il va prendre faits et causes pour Lai Kwai, la jeune fille ligotée. Si ce n’était pas son but premier, puisqu’il voulait juste faire « son travail », il va alors rapidement devenir la cible des brigands menés par Darren Bettencourt, un vilain très, voire trop, caricatural campé par Matt Schulze.
Une fois que les mafieux découvrent que Frank a ouvert le sac, ils vont en effet d’abord tenter de l’assassiner en piégeant sa voiture, avant que le transporteur ne riposte. C’est le moment pour le spectateur de découvrir les talents de Jason Statham dans les scènes d’action. Les chorégraphies des combats sont efficaces et surtout reconnaissables. Le style de combat est clairement celui des Seven Little Fortunes : un mélange de kung fu, aidé par les objets du décor, rappelle sans hésitation les cascades de Jackie Chan dans ses heures de gloire. Cela permet, encore une fois, d’ajouter une petite touche d’humour à l’action, même si le jeu toujours sérieux de Jason Statham se veut lui, plus réaliste, tel un Jet Li. Il convient en revanche de reconnaître à l’acteur anglais sa pratique et sa maîtrise de quelques formes d’arts martiaux puisqu’il assure lui-même les combats. 

C’est simple, à partir du moment où l’action est lancée, l’histoire va se concentrer sur elle. Il y a bien quelques séquences explicatives mais le cœur du film réside dans les scènes de combat et les courses-poursuites. Après tout, c’est l’essence même du concept. Frank et Lai Kwai vont d’abord être pourchassés par les mafieux, échappant de peu à l’attaque de son domicile, puis décident ensuite d’aller directement se confronter à l’ennemi avant de finalement tomber dans un piège où l’une finira capturée et l’autre en garde à vue. 
Heureusement, Le Transporteur connaît bien sa recette et l’applique consciencieusement. Comme dans tout bon film d’action des années 80-90, il y a un comic relief. Ici c’est l’inspecteur Tarconi joué par François Berléand qui apporte une certaine fraîcheur avec ses petites manies franchouillardes. Son personnage est là pour raccrocher l’histoire à la réalité, il est spectateur de l’action jusqu’à ce qu’il se rende compte que le système judiciaire et la loi ne sont pas adéquates pour traiter ce genre de problème. Le personnage n’est donc pas vraiment nécessaire à l’histoire mais l’est à la narration. Dans ce genre de film, il est presque un passage obligatoire pour atténuer le côté sérieux qui pourrait paraître lourd. 
Toutefois, c’est bien lui qui décide d’ouvrir la cellule de Frank et de fermer les yeux pour qu’il s’évade et se fasse justice lui-même, aboutissant à un lieu commun mais pardonnable pour le dernier chapitre du film. Frank Martin va alors successivement se débarrasser de pléthores d’hommes de mains, se lancer dans plusieurs courses-poursuites en moto, voiture, camion et même en parachute ! Il démolit le méchant et libère tous les otages. Lai Kwai, de son côté, profite du désordre général pour s’émanciper de la plus absolue des manières. En définitive, il fallait s’en douter, tout est bien qui finit bien !

Mais attention toutefois, si ce résumé succinct de la dernière partie du film peut prêter à sourire, il n’enlève rien au plaisir de visionnage. Le Transporteur est certes un film d’action classique, mais il n’a pas à rougir devant d'autres superproductions américaines. Le spectateur peut penser que la fin est un petit peu expédiée mais il faut reconnaître que les enjeux n’étaient pas si importants. Objectivement, la conclusion est cohérente avec l'ensemble. Tout va très vite, l’histoire comme les personnages ne tergiversent jamais. Dans la forme comme dans le fond, encore une fois, le film utilise des méthodes éculées mais le fait bien et les respecte. Il suit son cahier des charges ; la volonté des réalisateurs étant d'ancrer leur création dans la continuité des années 90.
C’est d’ailleurs ce qui fait toute sa force : Le Transporteur ose se mettre au niveau des films d’action hongkongais auxquels il livre un vibrant hommage. Les séquences d’actions, chorégraphiées au millimètre près, regorgent de petites astuces qui rendent le tout très plaisant à suivre avec une mention spéciale à la scène de combat dans l’atelier où le héros se tartine d’huile de vidange pour empêcher que les ennemis ne l’empoignent. Une bonne trouvaille, imprégnée de second degré, qui en plus met en valeur la plastique de l’acteur. Ce sont tous ces éléments qui lui permettront d'ailleurs d’entrer au panthéon des acteurs de films d’action musclés quand il sera appelé quelques années plus tard par Sylvester Stallone pour son Expendables (2010).
Fruit de son époque également, la bande originale est un mélange de Rap et de RnB du début des années 2000. La plupart des titres n’apparaissent d’ailleurs pas dans le film et c’est donc davantage une BO accessoire que véritablement ancrée dans la réalisation. Les thèmes musicaux de Stanley Clarke (Boyz N the Hood en 1991) suivent, quant à eux, bien l’action : tantôt très techno pour les scènes d’action, tantôt classiques et discrets pour les moments de répit.

Sorti le 11 octobre 2002 aux États-Unis et le 23 octobre 2002 en France, avec son budget de 21 millions dollars et des recettes qui s’approchent des 44 millions de dollars dans le monde, Le Transporteur est un joli succès. Il faut évidemment reconnaître que le film ne s’adresse pas à tout le monde et qu’il est loin d’être intemporel. Concrètement, il reste une œuvre qui s’adressait aux adolescents des années 2000 en manque de nouvelles idoles. Cette période où justement les Stallone, Schwarzenegger et autres JCVD commençaient à se ringardiser. En ce sens, il est honnête et dégage une certaine nostalgie pour les trentenaires de 2020.
Il fait aujourd’hui partie des films français les plus rentables sur le sol américain, ce qui n’est pas une mince affaire. Les critiques américaines et françaises s’accordent globalement sur un point : il est un film d’action « moyen » mais qui se laisse regarder quand le spectateur en est conscient. Tout le monde estimait en outre à l’époque que Jason Statham était prometteur dans le genre et personne ne se s'est trompé sur ce point tant l'acteur a su ensuite exister par ailleurs. Il faut aussi noter que le film initiera une trilogie dont le succès sera croissant. Sans oublier un quatrième opus faisant office de reboot. Enfin, il est aussi un maillon essentiel dans le processus de production qui est à la base d’autres succès tel Taken en 2008 qui, lui, signera une petite révolution dans le cinéma d’action.

Le Transporteur offre un plaisir coupable, mais un plaisir quand même.

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