Ad Astra
L'affiche du film
Titre original :
Ad Astra
Production :
New Regency Productions
Plan B Entertainment
Date de sortie USA :
Le 20 septembre 2019
Genre :
Science-fiction
IMAX
Réalisation :
James Gray
Musique :
Max Richter
Durée :
128 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Les vols spatiaux et la colonisation du système solaire font désormais partie du quotidien de l'Homme. Aussi, quand la Terre est sujette à des surtensions cosmiques inquiétantes, le brillant Major Roy McBride est envoyé dans l'espace pour enquêter. Un choix non anodin puisque sa seule piste est la découverte d'un vaisseau abandonné aux abords de Neptune, perdu depuis plusieurs décennies et dont l’équipage, déclaré mort, était dirigé par... son père.

La critique

Publiée le 29 septembre 2019

Depuis la nuit des temps, la conquête des étoiles est l’un des plus beaux rêves de l’Homme. Si Hergé avait anticipé les premiers pas de celui-ci sur la Lune à travers son héros Tintin dans le diptyque Objectif Lune et On a Marché sur la Lune quinze ans avant ceux de Neil Armstrong le 21 juillet 1969 lors de la mission Apollo 11 - évènement planétaire immortalisé dans le documentaire Premiers Pas sur la Lune - Apollo 11 (1969) de 20th Century Fox - un an avant, Stanley Kubrick proposait lui aussi sa vision du voyage spatial avec le chef-d’œuvre 2001 : L'Odyssée de l'Espace (1968) basé sur la nouvelle La Sentielle d'Arthur C. Clarke paru en 1951. Le septième art a en effet et logiquement lui aussi la tête dans les nuages. Le tant attendu Ad Astra en est le dernier exemple en date.

En dehors des sagas fantaisistes telles que Star Wars de Lucasfilm Ltd. et Alien de 20th Century Fox, ou encore certains épisodes du Marvel Cinematic Universe, les grands studios de cinéma extrapolent ou rendent hommage à l’Univers à leur façon, comme en témoignent de nombreux longs-métrages plus « réalistes » tels que : Apollo 13 (1995) et First Man - Le Premier Homme sur la Lune (2018) chez Universal, Armageddon (1998) et Mission to Mars (2000) chez Touchstone, Space Cowboys (2000), Gravity (2013) et Interstellar (2014, en collaboration avec Paramount Pictures) chez Warner Bros., Solaris (2002) et Seul sur Mars (2015) chez 20th Century Fox, ou encore Moon (2009) et Passengers (2016) chez Sony Pictures Entertainment.
En mai 2016 justement, le cinéaste James Gray - habitué à concourir ou faire partie du jury de divers festivals - profite du 69ème Festival de Cannes pour annoncer le titre de son prochain film coécrit avec Ethan Gross : Ad Astra, « Vers les étoiles » en latin. Et comme le chemin vers les astres n’est jamais simple, « Ad astra » promet des turbulences, l’expression latine (devenue une devise courtisée) « Per aspera ad astra » signifiant « Par des sentiers ardus jusqu’aux étoiles ». Un projet difficile et longtemps resté à l’étude pour le réalisateur qui fait ici ses premiers pas dans la science-fiction, produit par New Regency Pictures et Plan B Entertainment notamment, la société de production de Brad Pitt fondée en 2002 avec Brad Grey (P.-D.G. de Paramount Pictures de 2005 et 2017) et Jennifer Aniston (actrice et ex-femme qui lui revend ses parts après leur divorce), dont il devient seul propriétaire en 2006.

Né en 1969 à New York, James Gray délaisse très tôt les bancs de l’école pour le cinéma dont il se passionne très vite et apprend son histoire avant de réaliser lors de sa 24ème année Little Odessa (1994). Si ce premier essai est récompensé d’un Lion d’argent à la Mostra de Venise (festival international du film de Venise), sa seconde œuvre parue six ans plus tard nommée The Yards (2000) - avec Mark Wahlberg (Invincible) et Joaquin Phoenix (Le Village, Signes) qu’il dirigera successivement à deux et quatre reprises - est un échec financier malgré les critiques positives. Il renoue avec le succès sept ans plus tard avec La Nuit Nous Appartient (2007) et enchaîne avec Two Lovers (2008). Il signe ensuite The Immigrant (2013) et The Lost City of Z (2016).
Scénariste des six films à son actif, il en devient également producteur dès 2008. Malgré la qualité de son travail au style noir et intimiste très personnel, très apprécié par la critique (plus en Europe qu’aux États-Unis d’ailleurs), Gray n’a cependant jamais remporté une seule distinction à Cannes (avec quatre longs-métrages en compétition tout de même) ou une seule nomination aux Oscars. Peut-être Ad Astra changera-t-il la donne… Côté production, le réalisateur réitère ici sa collaboration avec Plan B Entertainment associée à The Lost City of Z, dans lequel Brad Pitt devait initialement et également tenir le rôle principal avant que l'interprète ne soit contraint d’abandonner le projet tout en restant producteur. Un acte manqué devant la caméra, mais réparé et confirmé en avril 2017 quand l’interprète du protagoniste Roy McBride est enfin annoncé.

Ad Astra met donc en scène l’un des acteurs les plus doués et emblématiques de sa génération. Né en 1963 dans l’Oklahoma, c’est pourtant une publicité pour Levi’s et son apparition dénudée dans le cultisme Thelma & Louise (1991) qui font connaître Brad Pitt. Sa carrière est de suite lancée avec Et au Milieu Coule une Rivière (1992) de Robert Redford et Entretien avec un Vampire (1994) aux côtés de Tom Cruise. Puis il obtient sa première nomination aux Golden Globes avec Légendes d’Automne (1994) et aux Oscars avec L’Armée des 12 Singes (1995), pour lequel il remporte le Golden Globe du Meilleur Acteur dans un Second Rôle. Débute ensuite sa collaboration à succès avec David Fincher pour Se7en (1995), Fight Club (1999) et L’Étrange Histoire de Benjamin Button (2008).
Élu Homme le plus sexy du monde par le magazine People en 1995 et 2000, en plus d’être officieusement Monsieur Paltrow (Iron Man entre autres) et officiellement Monsieur Aniston (Friends) puis Jolie (La Carte du Cœur, 60 Secondes Chrono, 7 Jours et une Vie, Maléfique) jusqu’en 2016, Pitt n’est cependant pas qu’un physique. Avec une filmographie des plus éclectiques - notamment la saga Ocean’s (2001, 2004, 2007), Mr. & Mrs. Smith (2005), Babel (2006), Le Stratège (2011), 12 Years a Slave (2013) - ainsi qu’Inglourious Basterds (2009) et Once Upon a Time… in Hollywood (2019) pour Quentin Tarantino, le comédien démontre depuis toujours un véritable talent… parfois oublié. Si son caméo dans Deadpool 2 (2018) ne lui rend pas justice, le rôle de Roy McBride permet très justement de rendre hommage au jeu d'acteur de Brad Pitt.

Roy - sur les traces de son père - est, en effet, l'un des meilleurs astronautes de sa génération. En paix avec la disparition de ce dernier et volontairement coupé du monde, son attention et son intelligence, rehaussées de comportements autistiques salutaires à sa profession, sont intégralement mises au service des étoiles. Après une introduction à couper le soufflet et à donner le vertige puis des premiers éléments d’enquête, Roy, que plus rien ne retient sur Terre, part donc à la recherche de réponses et de son père qu’il pensait disparu à jamais. Par delà la Lune, Mars et Neptune, se prépare ainsi un voyage vers l'inconnu et pourtant plein d'espoir, pour Roy et l'humanité. Direction le satellite terrestre colonisé pour une première correspondance, une étape naturellement avare en révélations mais qui augure déjà un périple solitaire des plus périlleux. Inspiré des travaux d’Enrico Fermi, lauréat du Prix Nobel de Physique en 1938 pour sa découverte des réactions nucléaires en chaîne, James Gray veut pour ce premier projet à grande échelle et hors des sentiers battus réaliser un film se déroulant dans l’espace, mais avec une approche des plus réalistes et différente de ce qui a déjà été proposé auparavant quant à la place de l'Homme au sein de l'univers. À cette fin, il implique la NASA et d'autres organismes dès les débuts d'Ad Astra. L’astronaute retraité Garrett Reisman aux deux missions spatiales et l’ingénieur en aéronautique Robert J. Yowell aux trente ans d’activité au sein de la NASA apportent notamment leur précieuse expertise auprès du réalisateur - non avare en questions - lors de la rédaction du scénario et du tournage.

Si Ad Astra se focalise essentiellement sur le personnage de Roy - laissant finalement mais non malheureusement peu de place à son entourage - deux mois après la confirmation de la participation de Brad Pitt, un autre grand acteur rejoint la distribution : Tommy Lee Jones campe en effet Clifford McBride, son père. Né en 1946 au Texas, sa longue filmographie - JFK (1991), la saga Men in Black (1997, 2002, 2012), Captain America - First Avenger (2011), Lincoln (2012) notamment - ainsi que son Oscar et son Golden Globe du Meilleur Acteur dans un Second Rôle pour Le Fugitif (1993) parlent d’eux-mêmes. Loin d'une interprétation traditionnelle à la présence fortement marquée, l'acteur fait ici office de fantôme du passé, à la fois véritable but et ombre pesante qui finit par hanter le protagoniste.
S’il n’a jamais côtoyé Pitt devant la caméra, Jones partage à nouveau l'affiche avec l'impressionnant Donald Sutherland (JFK, la saga Hunger Games) dans la peau du colonel Pruitt et de manière plus anecdotique Loren Dean (Apollo 13, Bienvenue à Gattaca, Ennemi d’État). Tous trois ne sont pas novices en la matière, ayant déjà exploré l’espace ensemble dans Space Cowboys. À noter également l'apparition de Jamie Kennedy (la saga Scream, Ennemi d’État). Pour sa part, Brad Pitt joue à nouveau avec Ruth Negga (Les Agents du S.H.I.E.L.D.), rencontrée sur le tournage de Twelve Years a Slave et World War Z (2013), en tant que directrice des opérations locales de Mars, pour une relation furtive mais peut-être la plus intéressante d'Ad Astra. Enfin, Liv Tyler (Armageddon, la trilogie Le Seigneur des Anneaux, L’Incroyable Hulk) incarne lors de rares et courts flashbacks l’ex-épouse délaissée de Roy.

Telles des rencontres éphémères vite effacées face à un but précis, tous délivrent une prestation à la hauteur de leur talent sans toutefois s’imposer. Un parti-pris discutable mais non moins intéressant ayant le mérite de sublimer la réflexion, la détermination et la solitude du héros, que cela soit à travers les gros plans de Roy, sa presque omniprésente voix off qui résonne, ainsi que les multiples et redondants tests psychologiques auxquels - impassible et imperturbable - l’astronaute se soumet tout du long. Si l'excursion se déroule à travers différentes stations spatiales, son voyage intérieur est encore plus grand. Sa quête n’en demeure que plus belle et plus intime. Mais son passage dans les locaux de Mars et les premières révélations de ses colons commencent à ébranler ses convictions.
Ad Astra prend en effet le temps - beaucoup de temps - pour poser son cadre, installer ses décors et faire avancer son récit jusqu'à ce que les certitudes de son protagoniste soient remises en cause et risquent de voler en éclat. Une manière peut-être d'illustrer l'isolement et l’introspection de son protagoniste ? De mettre en abyme la longueur de son voyage ? Si une partie du public peut trouver le rythme bien trop lent et poussif, l’autre ne peut qu’être ravie et subjuguée devant les images de toute beauté. Un cahier des charges somme toute normal et nécessaire face à l’œil de plus en plus affûté et intransigeant du spectateur. La comparaison avec d’autres œuvres du genre peut d’ailleurs devenir un réflexe durant la projection. Mais l’aventure sans limite, à l’image de l’espace qu’elle sublime, est totale ! À travers des décors pourtant bien terrestres… que l’Homme a déjà foulés.

Avec un budget relativement modeste estimé à 87,5 millions de dollars (en comparaison, Gravity disposait d’un budget de 100 millions de dollars, Interstellar de 165 millions et Seul sur Mars de 108 millions), Ad Astra privilégie un tournage local et en décors naturels. Les prises de vue débutent en août 2016 pour une durée de deux mois dans le comté de Los Angeles. Les froides séquences lunaires aux proies aux pirates sidéraux sont tournées dans la Vallée de la Mort et les rougeoyants plans martiens sont quant à eux capturés au sein des Dumont Dunes, deux sites impressionnants du désert des Mojaves en Californie. Pour les intérieurs et les infrastructures visibles à l’écran, une ancienne imprimerie devient ainsi une rampe de lancement. Un centre commercial abandonné et sa ligne de métro deviennent des sous-sols et des tunnels spatiaux étouffants.
Tout ceci est bien sûr complété par des aménagements et des effets visuels tout simplement parfaits afin de gommer la réalité. Ces derniers n’ont d'ailleurs pas vocation à en mettre gratuitement plein la vue au public et donner dans le grand spectacle assourdissant, malgré des tableaux somptueux et quelques petits moments d’anthologie. À regretter toutefois une mission sauvetage inintéressante et totalement dispensable qui alourdit (encore) le rythme. Les effets permettent avant tout l’immersion totale de Roy au sein de l'infini, et du spectateur devant l'écran par la même occasion. Si l'épopée visuelle est parfaite, l’expérience se révèle également sonore. Que cela soit en musique ou dans le plus pur et pesant des silences, puisque le son ne peut se propager dans l’espace.

En septembre 2019, James Gray avoue lors d’un entretien pour la National Public Radio s’être concocté une playlist des plus particulière pour préparer Ad Astra, qu’il écoutait et partageait avec l’équipe lors du tournage. Si celle-ci est composée classiquement de musiques - tels que des morceaux du joueur de sitar Ravi Shankar et du compositeur Krzysztof Penderecki, le poème symphonique Les Planètes de Gustav Holst, la suite orchestrale Peer Gynt d’Edvard Grieg et le quatrième mouvement de La Chapelle Rothko de Morton Feldman, elle intègre également des sonorités plus particulières comme celles des drones électroniques de la compositrice française Eliane Radigue, ou encore des ondes électromagnétiques de l’espace comme celles capturées aux abords de Jupiter.
« Dans l’espace personne ne vous entend crier » mais il revient au compositeur allemand Max Richter d’habiller Ad Astra. Né en 1966 à Hamelin, il étudie la musique et créé dès la fin de son cursus à l’université d’Édimbourg un groupe de pianistes. Il collabore avec plusieurs artistes dans les années 90, avant de se lancer dans la composition de bandes originales dans les années 2000. Il illustre ainsi des œuvres très éclectiques mais majoritairement européennes, malgré quelques incursions discrètes dans le paysage américain : courts et longs métrages, téléfilms et documentaires, épisodes de séries télévisées et événements artistiques. Un choix particulièrement osé pour un premier grand film hollywoodien aux allures de blockbuster. Richter signe pourtant une partition à la fois grandiose et discrète, qui sait à la fois sublimer les grands moments et s’effacer pour faire place au néant.

Si la locution initiale qui donne son titre à Ad Astra illustre bien évidemment et fort heureusement les mésaventures de Roy, la combative devise s’applique également et malheureusement à sa sortie semée d’embûches. Elle est en effet initialement prévue le 11 janvier 2019 aux États-Unis, durant la conclusion du rachat de 21st Century Fox par The Walt Disney Company (long processus qui s’est étendu de décembre 2017 à mars 2019). Une période compliquée et confuse en termes de sorties du studio. L’œuvre est une première fois reportée au 24 mai 2019, quelques jours avant le Memorial Day (le dernier lundi du mois de mai qui rend hommage aux morts au combat toutes guerres confondues des Forces armées américaines), ainsi pressentie pour être dévoilée à temps lors du 72ème Festival de Cannes.
À l’époque, en dehors des préoccupations organisationnelles du studio, le bruit court que cette sortie retardée permettrait à Ad Astra de ne pas être en concurrence directe à l’Oscar du Meilleur Film avec First Man - Le Premier Homme sur la Lune et High Life, deux autres épopées cosmiques qui ne furent finalement pas nommées ! Alors que les effets visuels sont en voie de finalisation pour être rendus fin avril - Gray exigeant à raison la perfection - et que la promotion autour du film est encore inexistante, sans compter le fait que l’adaptation live Aladdin de Disney est également prévue à la même date, l'opus est une nouvelle fois repoussé. Nouveau rebondissement : une toute première bande-annonce promettant une sortie pour octobre 2019 est dévoilée début juin, explosant les délais quand certains teasers se payent, eux, le luxe de sortir un an avant ledit film pour aguicher le public.

Ad Astra atteint finalement la Terre le 29 août 2019 avec pour première étape la Mostra de Venise durant laquelle il est projeté pour la toute première fois. Le long-métrage distribué sous le label 20th Century Fox par Walt Disney Studios Motion Pictures se met en orbite en France et au Royaume-Uni le 18 septembre 2019, avant de parcourir le reste du monde et se poser deux jours plus tard sur le sol américain. Malgré ou grâce à l’attente suscitée, il est de suite porté par des critiques dithyrambiques et unanimes de la part des professionnels, dont certains le qualifient de véritable chef-d’œuvre tout en saluant la formidable vision de James Gray ainsi que la magnifique interprétation de Brad Pitt. Les spectateurs les plus impatients sont étonnamment beaucoup moins unanimes…
Ad Astra rapporte, en effet, lors de son premier weekend d’exploitation outre-Atlantique la somme de 19,2 millions de dollars. Des chiffres honnêtes et attendus - puisque estimés entre 17 et 20 millions - mais bien loin derrière le solide trio spatial précédemment cité (les premières recettes de Gravity s’élèvent à 55,7 millions de dollars, celles d’Interstellar à 47,5 millions et celles de Seul sur Mars à 54,3 millions). Le long-métrage comptabilise péniblement 26 millions de dollars dans le reste du monde pour atteindre des recettes mondiales évaluées à 45,2 millions de dollars en deux jours. S’il prend la tête au niveau mondial devant Downton Abbey et Rambo : Last Blood (mais tous deux ne sortent qu’un peu plus tard dans le reste du monde), la première place lui est tout de même soufflée par la comédie dramatique anglaise aux États-Unis, portée par une solide communauté de fans de la série.

Le début de carrière d'Ad Astra est immédiatement comparé à celui de First Man - Le Premier Homme sur la Lune, encensé par la critique mais boudé par le public (16 millions de dollars de recettes américaines en deux jours pour 105,6 millions de recettes mondiales), a contrario de Passengers, méprisé par les professionnels mais finalement apprécié des spectateurs (14,8 millions de dollars de recettes américaines en deux jours pour 303,1 millions de recettes mondiales). L’œuvre, aussi belle soit-elle, semble cependant bien loin de toucher les étoiles et d’approcher les 630,1 millions de dollars de recettes mondiales de Seul sur Mars, les 677,4 millions d’Interstellar et bien plus encore les 723,1 millions de Gravity. Et pourtant...
S'il n'a pas le soupçon de légèreté du premier, la portée scientifique du second et le sens du spectacle du troisième, Ad Astra possède néanmoins ses propres qualités, à défaut d'être le chef-d’œuvre annoncé, parfois facile et convenu. Résolument centré sur l'humain, le film présente avant tout - à travers une histoire extraordinaire traitée de manière la plus ordinaire possible - le passionnant voyage d'un héros résigné, aux convictions solides mais remises en cause au fur et à mesure de ses découvertes. Une odyssée à la fois introspective et humaniste durant laquelle les questions de sacrifice, d'abnégation et d'héritage paternel sont traitées en toute sobriété et avec la plus grande pudeur... pour trouver leurs réponses lors de son dénouement sur Neptune.

Il reste alors, en conclusion, dans la tête du spectateur, la poignante histoire de Roy mue par sa volonté sans faille et l'interprétation subtile de Brad Pitt. Un acteur aux étoiles plein les yeux, si bon et si inspiré que James Gray en le regardant s’autorise une entorse dans sa quête de réalisme : laisser perler et couler une larme le long du visage de son acteur plutôt que la retoucher pour la faire flotter en apesanteur, malgré la remarque pleine de bon sens du comédien. Le cinéma et l’espace n’ont décidément pas de limite et défient les règles les plus élémentaires de la logique quand il s’agit d'offrir un voyage stellaire inaccessible et extraordinaire. Nonobstant, la physicienne et astronaute Tracy Caldwell Dyson qui a passé plus de 188 jours dans l'espace, déclare à ce sujet durant la production d'Ad Astra :

« Je ne peux prendre aucune photo qui vous donnerait l'impression d'être vraiment au-dessus de l'atmosphère. C'est juste quelque chose à voir de ses propres yeux. Tout ce qui va de la couleur de la Terre à la manière dont elle change en fonction de l'angle du soleil, à la façon dont le soleil apparaît au-dessous de l'horizon (...) à la forme des objets comme la lune elle-même, c'est ineffable. Lorsque vous observez la noirceur de l'espace (…) et si vous regardez assez longtemps, vous pouvez réellement sentir la profondeur entre les étoiles (...). C'est à couper le souffle et chargé d'émotions. La première fois que j'ai vu ça, tout est devenu flou. Je ne savais pas ce qui se passait. Il s'est avéré que je pleurais et je ne m'en étais pas rendu compte ! »

Ambitieux, émouvant, merveilleux et oppressant, Ad Astra ne manque certainement pas d’audace. Œuvre astrale destinée à être couronnée aux Oscars pour les uns, énième étoile filante convenue pour les autres, vide intersidéral interminable pour les plus réticents, le temps seul tracera sa propre destinée. Il serait toutefois dommage que le spectateur n'emprunte pas le palpitant chemin de Roy McBride pour une quête pleine d'espoir, en se rappelant que rien n'est impossible... « Vers l’infini et au-delà ».

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