Titre original :
Maleficent
Production :
Walt Disney Pictures
Date de sortie USA :
Le 30 mai 2014
Genre :
Fantastique
IMAX
3-D
Réalisation :
Robert Stromberg
Musique :
James Newton Howard
Durée :
98 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Belle jeune fée au cœur pur et à la vie idyllique au sein d'une paisible forêt dans un royaume où règnent le bonheur et l'harmonie, Maléfique se voit un jour trahie par une personne qu'elle tenait en haute estime : l'affront déclenche alors en elle une souffrance d'une intensité telle qu'elle transforme peu à peu son cœur de tendresse en cœur de pierre...

La critique

rédigée par
Publiée le 25 mai 2014

Maléfique est une excellente surprise ! Il faut dire que dans la folie qui s'est emparée d'Hollywood pour les adaptations en prises de vues réelles des contes animées qui pullulent ces dernières années au cinéma (le label Disney en ayant d'ailleurs un certain nombre à son actif), le projet ne semblait pas des plus palpitant, ni original. Qui plus est, avec le conte de La Belle au Bois Dormant qui est vu et archi revu et conserve peu de place à l'imagination. La seule lueur d'espoir résidait alors dans l'idée de raconter l'histoire du point de vue de la méchante… Bingo ! Dès les premiers instants du long-métrage, toutes les craintes des spectateurs ont de quoi voler en éclats. La musique, les visuels, les personnages, les acteurs... Tout est magnifique dans Maléfique. A condition, bien-sûr, d'en accepter le postulat de départ. Car il s'agit là bien moins d'adapter linéairement le conte de La Belle au Bois Dormant selon un nouveau point de vue que de carrément le réinventer. Le spectateur découvre alors une œuvre nouvelle qui tord l'histoire classique en la narrant à l'envers. Maléfique révèle alors toute son envergure de géniale hérésie !

Le label Disney a commencé à adapter ses films d'animation en prises de vues réelles dans le milieu des années 90. Le premier d'entre eux est Le Livre de la Jungle - Le Film en 1994 suivi par Les 101 Dalmatiens en 1996. Les deux films ont aussitôt droit à des suites : le premier avec une préquelle sortie directement en vidéo en 1998, The Jungle Book : Mowgli's Story tandis que le second conserve les honneurs des salles obscures en 2000 avec 102 Dalmatiens. Mais c'est véritablement en 2010 que Disney relance le genre en grandes pompes avec son adaptation d'Alice au Pays des Merveilles par Tim Burton. En rapportant plus d'un milliard de dollars au box office mondial, le film est incontestablement un immense succès et amorce une mode qui s'empare de tout Hollywood où de nombreux studios se mettent à adapter des contes en prises de vues réelles sur grand écran. Disney fait de même, lui, avec la littérature enfantine en proposant une préquelle au (Le) Magicien d'Oz avec Le Monde Fantastique d'Oz en 2013. Le film est également un succès. Le label continue donc sur son chemin en sortant en 2014 La Belle au Bois Dormant avec Maléfique, en 2015, Cendrillon et un nouveau remake du (Le) Livre de la Jungle. 2016 offrira elle une suite à Alice au Pays des Merveilles tandis qu'il est même envisagé une suite au (Le) Monde Fantastique d'Oz...

Maléfique s'appuie d'abord sur une histoire universellement connue mais aussi - et surtout - sur l'adaptation animée produite par Walt Disney lui-même en 1959 : La Belle au Bois Dormant. Le Maître de l'Animation choisit d'en retenir la version de l'auteur français, Charles Perrault. Issu du milieu aisé de la bourgeoisie d'offices, ce dernier est le benjamin d'une famille de quatre frères. Après des études de droit et une première œuvre burlesque, Les Murs de Troie, il entre en 1654 en qualité de commis chez son frère aîné Pierre, receveur général. Ses poèmes, notamment les Odes au Roi, le font vite remarquer. Nommé commis auprès de Colbert, conseiller de Louis XIV, il devient ensuite Premier commis des bâtiments du Roi en 1665. Elu en 1671 à l'Académie française, il en est le bibliothécaire trois ans plus tard. Son œuvre la plus célèbre reste aujourd'hui ses contes (Cendrillon, La Belle au Bois Dormant...) nourris de l'imaginaire médiéval légendaire, chevaleresque et courtois. Charles Perrault reprend dans une prose faussement naïve des histoires transmises par la tradition orale, encore considérées aujourd'hui comme une influence majeure de l'inconscient collectif.

Ainsi, le personnage de Maléfique fut créé spécifiquement pour le long-métrage animé de Disney. La sorcière Maléfique est assurément le personnage le plus marquant du casting. Animée comme Aurore par Marc Davis, elle détient, en elle, toute l'étendue du talent de son créateur. Dans le club très fermé des Disney's Vilains, elle est, à l'évidence, l'un des membres les plus charismatiques. Son aspect est, déjà, à lui seul très inquiétant. Drapée dans une longue robe noire reprenant les codes et couleurs vestimentaires d'une faucheuse d'âme, elle arbore fièrement des cornes de diable, revendiquant, par la même, son appartenance aux forces du Mal. Elle est d'autant plus effrayante que son apparence macabre contraste avec la beauté de son visage, d'une finesse absolue. Sa prestance, toujours digne limite rigide, en rajoute d'ailleurs dans sa capacité à impressionner son audience. Mais l'apparence n'est pas le seul trait de sa méchanceté. Sa personnalité est, en effet, à l'avenant, voire pire encore. Maléfique est ainsi odieuse par caprice et prétexte. Elle cherche, il est vrai, à faire payer aux autres l'affront de ne pas avoir été invitée au baptême de la jeune princesse. Dès lors, sa vengeance ne prend qu'une seule justification : la méchanceté gratuite. Le point culminant du personnage est sans aucun doute sa transformation finale en dragon. Sa mutation affiche une crédibilité graphique exemplaire tant le féroce animal est l'extrapolation ultime des traits du personnage humain initial. A cet instant précis, son caractère terrifiant est magnifié et finit de convaincre l'auditoire de la noirceur de ce Disney's Vilain abouti. Son combat contre le prince Philippe, symbolisant comme rarement la lutte du bien contre la mal, reste aujourd'hui encore un grand moment du cinéma d'animation tout entier, dont la puissance a marqué l'inconscient de générations de spectateurs à travers le monde.

Le projet de Maléfique est donc lancé à la suite du succès d'Alice au Pays des Merveilles de Tim Burton. Si le nom d'Angelina Jolie circule tout de suite pour incarner la méchante, c'est encore Tim Burton qui est pressenti pour reformer le duo avec la scénariste Linda Woolverton avec laquelle il avait travaillé sur l'adaptation du livre de Lewis Caroll. Mais un problème de calendrier et une volonté de ne pas donner l'impression de se répéter poussent le réalisateur de Frankenweenie à se retirer du projet. Finalement, et de façon étonnante, la réalisation revient à Robert Stromberg, un artiste certes accompli mais qui va faire ici ses premiers pas derrière la caméra...

Robert Stromberg est ainsi un chef décorateur réputé qui fait avec Maléfique ses débuts de réalisateur. Il entame sa carrière au milieu des années 1980 et se spécialise bien vite dans le matte painting chez Illusion Arts. A ses débuts, il collabore notamment à Kalahari, l'aventure africaine de Mikael Salomon chez Disney, ou Une Nuit en Enfer, le thriller vampirique de Robert Rodriguez chez Dimension Films. Tandis que le matte painting évolue vers le numérique, il crée sa propre société en 1998, Digital Backlot, qui s'impose rapidement dans l'univers de la conception des effets visuels. Robert Stromberg a ainsi été superviseur des effets visuels sur des projets tels que Pirates des Caraïbes : Jusqu'au Bout du Monde. Il collabore également avec le réalisateur Peter Weir en 2003 sur Master and commander : De l'Autre Côté du Monde, ce qui lui vaut d'être nommé aux Oscars, aux BAFTA Awards et aux VES (Visual Effects Society) Awards. En 2005, il fait la connaissance de James Cameron : les deux hommes entament alors une collaboration qui donne naissance au monde de Pandora dans Avatar. Avec Rick Carter, Robert Stromberg est, en effet, co-créateur des décors de ce film épique et fantastique, remportant pour lui le premier de ses deux Oscars ainsi que l'Art Directors Guild Award, le BAFTA Award et le Saturn Award. Un an plus tard, en 2011, il gagne sa deuxième statuette, pour les décors d'Alice au Pays des Merveilles de Tim Burton, ainsi qu'une nomination au Critics Choice Award de la Broadcast Film Critics Association et des citations au BAFTA Award ou au Saturn Award. Son film le plus récent, en qualité de chef décorateur, est ainsi Le Monde Fantastique d'Oz, réalisé par Sam Raimi.

Maléfique réussit un sacré tour de force : il arrive, en effet, à proposer quelque chose de neuf avec une histoire vue, revue et archi connue. Le conte est, il est vrai, si populaire que la première pensée qui vient au spectateur quand il entend parler du film, c'est l'ennui. Quel intérêt y-a-t-il à raconter une histoire déjà si bien restituée au cinéma par le passé au point d'en être devenue une œuvre intemporelle ? L'idée de retenir le point de vue de la méchante pour sa narration remonte alors, un peu, l'attention à la condition évidente qu'elle ne serve pas de prétexte à raconter la même chose. Il s'agit donc de connaitre le passé de la sorcière et d'apprendre les raisons de sa méchanceté. Si le film répond à ses questions primordiales, il ne s'en contente fort heureusement pas et en explore de nouvelles : la recette magique pour ne pas tomber dans les affres de la redite linéaire ! D'ailleurs, il prend ici le risque de déstabiliser ceux des spectateurs qui s'attendent à une relecture conforme du conte version Disney. Certes, tous les éléments emblématiques du dessin animé sont là et bien là (la malédiction, la chaumière, les trois fées, le baiser du prince, le dragon, les ronces, la belle endormie et la quenouille), mais le récit conté s'éloigne très fortement du film dont il s'inspire et du conte sur lequel tous les deux se reposent. De façon habile, il narre une autre histoire comme si elle se passait dans un monde parallèle. Est-ce une hérésie ? Surement... Surtout qu'au final les personnages n'ont plus grand chose à voir pour la plupart avec ce qui est attendu d'eux. Est-ce génial ? Clairement ! Car Maléfique propose une relecture inédite d'une histoire mille et une fois contée. Avec son montage efficace tenant sur un peu plus d'une heure et demi, le film ne se perd jamais dans des digressions inutiles tout en prenant le temps nécessaire pour parfaitement installer ses personnages. Le public se prend alors vraiment d'affection pour eux et leurs interactions fonctionnement à merveille. Le seul petit regret à peut-être formuler concerne l'une des scènes finales que le spectateur voit venir à des kilomètres. A utiliser, ces dernières années chez les scénaristes, toujours le même rebondissement, il perd évidemment la puissance de l'inédit...

Maléfique est aussi une superbe réussite pour l'ambiance qu'il fait ressortir. Alors qu'Alice au Pays des Merveilles se voulait un film de Fantasy pur jus avec une envie presque obligatoire de le rendre épique imposant une bataille finale aussi inutile que grotesque et que Le Monde Fantastique d'Oz a, lui, été bien plus avisé en privilégiant le voyage aux combats, Maléfique, invite pour sa part le spectateur à la rêverie. Le film prend son temps au point d'apparaitre parfois contemplatif un peu à la façon d'une narration cinématographique japonaise. Il est également magique avec sa panoplie de créatures aussi adorables les unes que les autres. Enfin, il est tout sauf manichéen. Mis à part Aurore, qui est la pureté à l'état brut, chaque personnage révèle, il est vrai, un côté sombre, mauvais ou tout du moins impur. Ce parti pris courageux donne encore plus de profondeurs aux intervenants dépeints et permet ainsi au spectateur de s'attacher directement à eux. L'opus vire alors au conte de fée moderne à la fois apaisant et merveilleux. S'il sait être épique, ce n'est pas dans la longueur et la violence de ses batailles mais bien dans la portée de son histoire et de ses personnages.

Les personnages, justement, sont, à l'évidence et sans doute logiquement, la grande force de Maléfique.
Angelina Jolie porte le film sur ses épaules ! Elle est tout simplement fabuleuse. Elle retranscrit à la perfection toute la froideur et la méchanceté du personnage de Disney tout en lui apportant une sincérité et une fragilité bienvenues. Elle passe ainsi par une panoplie d'émotions rendant le spectateur accro à cette méchante hors norme. Et c'est là surement la plus belle réussite du film : parvenir à faire aimer une méchante ! La prestation d'Angelina Jolie inscrit Maléfique dans une toute autre dimension qui fait, qu'à aucun moment, le spectateur n'a l'impression de voir un simple remake de La Belle au Bois Dormant. Pour autant, l'actrice - c'est là l'étendue de son talent - n'écrase jamais les autres personnages : son rayonnement profite à tous.
Ceux gravitent autour d'elle sont en effet tout aussi réussis. Leurs interactions apportent ainsi beaucoup de spontanéité, de fraicheur et de crédibilité à l'ensemble.
Aurore, jouée par la jeune Elle Fanning, est, dans ce contexte, la pureté personnifiée. D'une grande beauté, d'une naïveté touchante et d'une douceur absolue, elle sait aussi porter la candeur sans tomber dans le côté potiche que peut avoir le personnage dans la version animée. Ici, malgré sa bienveillance à tout crin, elle n'est pas exempt de personnalité ce qui la rend attachante à souhait.
Sam Riley est Diaval le corbeau que Maléfique s'amuse à transformer en tout, y compris en humain. Ses interactions avec la méchante sont tout simplement savoureuses. Le spectateur comprend tout de suite l'attirance du personnage vers sa maîtresse. D'abord reconnaissant pour lui avoir sauvé la vie, il se transforme en serviteur dévoué puis en ange gardien afin de la protéger physiquement mais aussi émotionnellement. Un personnage superbement écrit et terriblement bien incarné.
Sharlto Copley est, quant à lui, le roi Stéphane, un père dévasté par la perte de sa fille qui lui fait à oublier tous ses repères. C'est un personnage éminemment complexe que le chagrin tourmente et déstabilise et dont le comédien qui le porte sait restituer toute l'épaisseur.
Il sera également noté les trois bonnes fées, Hortense (Imelda Staunton), Capucine (Juno Temple) et Florette (Lesley Manville), dont le caractère est à peu près similaire au film d'animation mais dont le rôle est un peu différent ; peut-être une raison au changement de leur nom. Enfin, le Prince Philipe interprété de façon convaincante par Brenton Thwaites sait convaincre autant par son courage que sa beauté. Il est décidément impossible pour les spectateurs de ne pas tomber sous le charme des personnages de Maléfique, et ce - bel exploit - jamais pour les mêmes raisons...

Toute l'ambiance de Maléfique doit bien évidemment beaucoup à ses effets spéciaux, de toute beauté. Les paysages, les décors, les créatures enchanteresses : tout est ici superbe et restitue parfaitement le côté bucolique et féérique, marque de fabrique du conte. La seule véritable anicroche à ce bilan somme toute idyllique vient alors de l'apparence des trois fées franchement ridicules. Les costumes sont eux magnifiques en particulier la garde-robe de Maléfique qu'Angelina Jolie porte avec la prestance et noblesse qui la caractérise : à faire pâlir d'envie ! Et que dire de la musique de James Newton Howard si ce n'est qu'elle est inspirée et remarquablement écrite : dès les première notes, elle envoute le spectateur dans cet univers merveilleux qui ne le quittera plus jamais.

Géniale hérésie, Maléfique est un superbe film, frais et divertissant dans son excellente idée de proposer une relecture totalement différente du conte de La Belle au Bois Dormant, version Disney. Paradoxe sublime, il happe le spectateur dans un récit qu'il n'attendait pas, tout en lui conservant une curieuse impression d'être en terrain connu.

A noter:
Maléfique a été nommé pour l'Oscar 2015 des Meilleurs Costumes.

L'équipe du film

1975 • ....

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