James Horner
Date de naissance :
Le 14 août 1953
Lieu de Naissance :
Los Angeles en Californie aux États-Unis
Date de Décès :
Le 22 juin 2015
Lieu de Décès :
Santa Barbara en Californie aux États-Unis
Nationalité :
Américaine
Profession :
Compositeur

La biographie

rédigée par Aurélien Simon
Publié le 15 septembre 2015

Le destin de James Horner était de devenir l'un des plus grands compositeurs de musique de l'Histoire, l'auteur de l'album symphonique le plus écouté au monde, du plus grand hit de la chanteuse la plus populaire de tous les temps, le compositeur des deux plus grands succès de l'Histoire du cinéma et une légende de la musique de films qui s'est autant forgée chez Roger Corman, Steven Spielberg, James Cameron, George Lucas, que bien sûr chez Disney. Mais comment cet enfant issu de l'immigration en est-il arrivé à un tel sommet ?

Cette légende a débuté en 1936 alors que, comme beaucoup d'artistes fuyant les tensions politiques en Europe, Heinrich Horner quitte sa terre natale d'Autriche-Hongrie pour suivre la troupe de théâtre de Max Reinhardt. Il est naturalisé américain en 1940 et renommé Harry Horner. Il poursuivra une belle carrière de directeur artistique à Hollywood.
Son premier fils, James Horner, voit le jour le 14 août 1953 dans une famille très mélomane et commence ainsi à apprendre le piano à l'âge précoce de 5 ans. Doué avec cet instrument, à seulement 9 ans il sait déjà qu'il veut devenir compositeur de musique symphonique. Dans les années 60, il grandit à Londres en étudiant au Royal College Music où il apprend la composition et la direction d'orchestre. Il revient en Amérique dans les années 70 pour continuer ses études musicales à l'USC Thornton School of Music puis à l'UCLA où il obtient sa maîtrise en 1976. Il commence alors à enseigner la musique à l'université et obtient un doctorat en musicologie. Mais il se rend vite compte que le public se désintéresse de la musique symphonique contemporaine et abandonne tous ses plans d'écrire de la musique pour les salles de concert désertées par le public. Par le plus beau des hasards, il lui est demandé de composer la musique d'un film d'étudiant pour l'American Film Institute et c'est le coup de foudre. Il tombe instantanément amoureux de la musique de film.

« Quand j'ai découvert  l'écriture pour le cinéma, (…) il m'est immédiatement apparu évident qu'associée aux images, la musique était mille fois plus puissante et émouvante que seule. » (James Horner)*

Cette époque voit également le retour inattendu des grandes symphonies au cinéma comme Star Wars : Un Nouvel Espoir (John Williams) en 1977 et Star Trek : Le Film (Jerry Goldsmith) en 1979. James veut pleinement participer à ce nouvel âge d'or de la musique de film symphonique qui se prépare. Il parvient à se faire connaître en composant plusieurs films d'étudiants et commence à travailler sur des films de série Z pour New World Pictures, le studio de Roger Corman qui lui donne ses premières chances au cinéma à la fin des années 70. Malgré le faible budget sur ces productions, James Horner arrive à emprunter le style de Williams et de Goldsmith, tout en laissant entendre son propre style si unique, dans le space-opera Les Mercenaires de l'Espace (1980) qui impressionnera Hollywood et lui ouvrira enfin les portes des grands studios. En 1982, aspiré dans ce qui s'appellera plus tard "le second âge d'or de la musique de film", il obtient la consécration en succédant à Jerry Goldsmith sur Star Trek II  : La Colère de Khan. Il est alors proclamé nouveau jeune prodige musical d'Hollywood vers lequel tous les regards se tournent.
Après la disparition de son fondateur, la compagnie Disney autrefois attachée aux services de collaborateurs musicaux exclusifs (Frank Churchill, George Bruns, les frères Sherman, pour ne nommer que les plus illustres), s'ouvre désormais vers de nouveaux compositeurs qui travaillent avec d'autres studios. C'est ainsi qu'en 1983, Walt Disney Pictures permet au réalisateur Jack Clayton de faire appel au compositeur français George Delerue, un collaborateur de longue date du cinéaste mais inconnu des studios Disney, pour composer la musique de l'adaptation du roman fantastique de Ray Bradbury, La Foire des Ténèbres.
Jack Clayton est absolument ravi de la partition que George Delerue a enregistrée qu'il qualifie de « belle, sensible et passionnante ». Mais ce n'est pas du tout le cas pour le studio qui, pris de panique après une diffusion test catastrophique auprès d'un public peu réceptif au film, décide d'opérer de nombreuses modifications sur le film et de trouver un remplaçant à Delerue pour écrire une toute nouvelle musique. Les exécutifs du studio appellent immédiatement Jerry Goldsmith (déjà fort de ses superbes partitions pour Disney comme Un Petit Indien et La Nuit de l'Évasion), mais le compositeur vedette est hélas trop occupé sur l'écriture de la musique de La Quatrième Dimension, le film, pour Steven Spielberg et ne peut pas se libérer dans l'urgence.
Disney pense alors à l'étoile montante du moment : James Horner. Il est déjà réputé pour ses partitions pour le cinéma fantastique et de science-fiction et pour savoir évoquer dignement le style de Jerry Goldsmith voulu par la production. De plus, il est jeune et n'a pas peur de travailler dans l'urgence malgré cinq autres films qu'il composera la même année pour d'autres studios. Le contrat est donc signé et James Horner entre avec fracas dans la maison Disney.

« J'avais très peu de marges de manœuvre. La partition de George Delerue avait été rejetée, et les consignes des producteurs étaient de faire tout sauf ce qui avait été fait. Je savais ce qu'il ne fallait pas faire, mais ça s'arrêtait là. Ce fut cependant une expérience importante. » (James Horner)*

Malgré les contraintes, James Horner parvient pourtant à composer une œuvre fascinante, tour à tour émouvante, sombre et grandiose, et à donner du sens à son œuvre, autour de thèmes qui resteront importants durant toute sa carrière : l'enfance (avec un thème pour les deux protagonistes juvéniles du film, une mélodie caressante et innocente introduite à la flûte, puis aux cordes et au cor, dès le générique de début) et la mort (avec la marche de Mr Dark, un chœur de femmes glaçant, des violons tournoyants et des flûtes aériennes ou aiguës évoquant un vent tempétueux).

Même si La Foire des Ténèbres ne fit pas recette, Disney rappela James Horner deux ans plus tard pour sauver une autre production. En 1985, le vétéran Elmer Bernstein (Les Dix Commandements, Les Sept Mercenaires) est la vedette musicale de Walt Disney Pictures, en composant la première musique originale entièrement instrumentale pour un film d'animation Disney : Taram et le Chaudron Magique. La réussite artistique de Bernstein est totale, mais les faibles résultats du film inquiètent les producteurs car Bernstein travaille sur une autre production du studio : Natty Gann. Le célèbre compositeur de westerns a beau réécrire plusieurs fois sa musique, il ne trouve pas le bon ton pour ce drame intime d'une jeune enfant à la recherche de son père et de son amitié avec un loup sauvage. Il compose une partition grandiose et généreuse, magnifiant les grands paysages américains mais faiblissant lorsqu'il s'agit de rentrer dans l'intimité des personnages et d'aborder le thème de l'enfance déchirée. James Horner parvient à combler ce manque en écrivant une musique sensible et délicate, teintée de folklore américain (guitare, harmonica), dans l'esprit du thème de l'enfance qu'il avait esquissé dans La Foire des Ténèbres, en plus chaleureux. Il met plus l'accent sur l'émotion, là où Bernstein forçait trop le trait épique de l'aventure.
James Horner renoue également avec le musicien japonais Kazu Matsui (ayant collaboré avec lui depuis 1983), le plus grand joueur de shakuhachi, une flûte japonaise au son particulièrement venteux que James Horner n'aura de cesse d'employer durant toute sa carrière de manière toujours très inventive. Cet instrument apportera à Natty Gann un exotisme distingué capable d'incarner la nature sauvage du récit sans jamais verser dans le western pompeux ou cliché.

« Le film est bien dans la tradition Disney, et la musique aussi. Le thème est accrocheur et vivant. C'est une partition qui respire la vie. » (James Horner)*

Seuls deux courts morceaux de Bernstein subsistent dans le film final, alors que la partition de James Horner colle, dans le reste de l'opus, au plus près des émotions des personnages, servant ainsi admirablement le récit. Malgré tous ces efforts, Natty Gann ne connaîtra pas plus de succès au cinéma.

Finalement, dans les années 80, James Horner ne sert chez Disney qu'à éteindre les incendies d'une compagnie en pleine crise identitaire.
Au début de l'année 1986, James Horner y revient par hasard en collaborant pour la deuxième et dernière fois avec le réalisateur Michael Dinner (dont il a déjà signé la musique de Tutti Fruti en 1985) sur Le Flic Etait Presque Parfait, une comédie policière produite par Disney (sous le label Touchstone Pictures). James Horner y dévoile un aspect musical assez rare dans sa carrière en mélangeant de l'electro beat des années 80 avec de la musique latine et du swing, et en faisant un grand usage du steel-drum, un instrument de percussion originaire des Caraïbes qu'il a souvent utilisé dans ses musiques de film urbaines des années 80, prouvant encore une fois son amour des sons exotiques. Malgré tout, sur ce film, les talents symphoniques très prometteurs du jeune compositeur sont clairement inexploités.

Bien que les deux autres partitions qu'il a déjà écrites pour Disney furent de grand succès artistiques et lui ont permis d'évoluer en tant que jeune compositeur à Hollywood, la compagnie ne se rend pas compte de la poule aux œufs d'or qu'elle a entre les mains, en ne lui confiant jamais un long métrage d'animation. Pourtant James Horner est sur le point de devenir l'un plus grands compositeurs de films d'animation que le monde ait connu, mais chez la concurrence…
Au milieu des années 80, Steven Spielberg, le golden boy d'Hollywood à qui tout réussit, est bien décidé à apporter une alternative sérieuse à l'animation Disney, en créant une branche animation à sa compagnie qui deviendra plus tard Amblimation. En 1982, il est impressionné par la qualité du film Brisby et le Secret de NIMH réalisé par Don Bluth, cet ancien animateur de Disney qui travaillait pour la compagnie depuis La Belle au Bois Dormant et qui, en désaccord avec les nouveaux dirigeants, décida de quitter le navire à la fin des années 70 pour produire ses propres films.  Au milieu des années 80, il est invité par Spielberg pour réaliser Fievel et le Nouveau Monde. La question du compositeur ne se pose alors pas : Jerry Goldsmith, compositeur de Brisby et fier collaborateur de Spielberg sur quantité de ses productions, est le premier choix évident pour écrire la musique de Fievel. Or, le très demandé Goldsmith ne pourra répondre présent une fois de plus, comme sur La Foire des Ténèbres. En 1985, Steven Spielberg, très impressionné par la musique que James Horner a composée pour Cocoon, le dernier film de Ron Howard, lui propose de remplacer Jerry Goldsmith (encore une fois !) sur Fievel et le Nouveau Monde. Le succès du film, de la partition, et de ses chansons est tellement retentissant que la version pop du duo Somewhere Out There devient un hit phénoménal qui passe sur toutes les radios, remporte maintes récompenses et pose même le modèle des singles à succès d'Alan Menken qui deviendront, à partir de La Belle et la Bête en 1991, indispensables pour clore un film d'animation Disney.
Faute d'avoir été propulsé sur un film d'animation Disney, James Horner devient donc, pendant près de 10 ans, le compositeur attitré de toutes les productions Amblimation et même d'autres studios d'animation, avec un total de sept long-métrages en dessins animés.

Devenu désormais le protégé du très influent Steven Spielberg, James Horner atterrit à la fin de l'année 1986 sur un film atypique de Francis Ford Coppola et produit par George Lucas, ce qui le reconduit encore par hasard chez Disney, et plus particulièrement à Disneyland. Non content d'être l'auteur du tube du moment, il vient aussi se frotter au roi de la pop lui-même en partageant avec Michael Jackson le contenu musical de Captain EO.
Sur ce film en relief produit par Lucasfilm Ltd. et destiné à devenir la nouvelle attraction de Disneyland, James Horner compose une épique musique intergalactique avec un grand savoir dont il a fait la démonstration sur de nombreux films depuis son premier space-opera chez Roger Corman. Pour le hall d'accueil de l'attraction, il compose une musique d'ambiance synthétique étincelante qui, par ses harmonies troublantes et transcendantes, réussit à plonger les visiteurs dans un univers étrange et fascinant, véritable portail sonore vers l'imaginaire futuriste nécessaire à une attraction de Tomorrowland (Discoveryland à Disneyland Paris). Dès que le film débute, James Horner amplifie l'ambiance futuriste incroyable qu'il a réussie à installer en faisant éclater un orchestre symphonique virtuose, puisant dans toute sa grande expérience en matière de composition de musique de SF dont il est devenu un vrai spécialiste avec ses multiples incursions dans le genre depuis 1980.

« J'adore utiliser des couleurs étincelantes, elles sont certainement très présentes dans ma musique. Ca lui donne un aspect presque magique. » (James Horner)**

Horner embarque bientôt en 1988 sur deux autres productions de Lucasfilm Ltd. et, le hasard faisant bien les choses, l'une est une seconde collaboration avec le réalisateur Ron Howard après Cocoon en 1985 et l'autre une seconde collaboration avec Don Bluth après Fievel et le Nouveau Monde en 1986. Ces deux musiques appartenant à deux univers différents, l'un fantastico-médiéval, l'autre préhistorique, tous les deux imaginaires, deviennent alors les plus abouties, les plus émouvantes et les plus aimées du public.
George Lucas étant un adepte de la technique des leitmotives comme employée sur sa trilogie Star Wars par John Williams, James Horner déploie avec Willow de nombreux thèmes associés aux personnages (Willow, Madmartigan, Elora Danan, la Reine Bavmorda, le général Kael et bien sûr un love theme pour la romance entre Madmartigan et Sorsha). Sur les bases d'une symphonie grandiose absolument classique mais merveilleusement écrite et interprétée par l'orchestre symphonique de Londres (le même que pour les Star Wars), James Horner y ajoute un chœur d'enfants (le King's College Choir de Wimbledon) pour incarner l'esprit mystique de la jeune princesse Elora Danan, et cherche à innover davantage en donnant au genre de l'heroic fantasy une voix inédite et unique.
En effet, en grand musicologue, James Horner voit dans un récit fantaisiste comme Willow l'opportunité d'utiliser des musiques ethniques très variées (amérindienne, celtique, japonaise et bulgare) pour donner des couleurs exotiques à cet univers imaginaire. Sans le savoir, il démocratise l'emploi de telles sonorités dans le genre de l'heroic fantasy (jusqu'ici cantonné à des sonorités médiévales).
Ainsi, sur ce film il invite le musicien écossais Robin Williamson à jouer de la harpe celtique et de la cornemuse, il fait de nouveau appel à Kazu Matsui et son shakuhachi, qu'il emploie de manière encore plus intensive que dans Natty Gann, et il fait la rencontre de joueurs de flûtes amérindiennes qu'il a remarqués en écoutant la musique de The Mission de Ennio Morricone, les musiciens d'Incantation (un groupe de musique du monde composé de Tony Hinnigan et Mike Taylor) qui deviennent dès lors des partenaires à vie de James Horner.

« La partition de James Horner représente la quintessence de ce que la musique de film peut être. Elle est fascinante, riche et émotionnelle. D'une beauté envahissante, le magnifique thème d'Elora Danan possède une noblesse et une dignité presque spirituelle. Le thème de Willow lui-même, incarnant toute l'innocence et la compassion de ce personnage, est aussi très mystique. Il nous aide à comprendre sa place dans ce monde de magiciens et d'enchanteresses. » (Ron Howard)

Le Petit Dinosaure et la Vallée des Merveilles, co-produit par Amblin et Lucasfilm Ltd., réitère le succès insolent de Fievel sorti deux ans auparavant. Dans la foulée de Willow, James Horner embarque la même équipe : l'orchestre symphonique de Londres se prête parfaitement à la grandeur des profondes et troublantes mélodies prokoviennes et le chœur d'enfants de Wimbledon parle de l'innocence des jeunes protagonistes sauriens qui animent cette nouvelle aventure. Le thème principal, soutenant la solidarité entre ces personnages d'espèces différentes et obligés de s'unir pour affronter ensemble la fin de leur monde, est d'une beauté absolument touchante. Dans sa forme symphonique, ce thème transperce le cœur et l'âme par son gigantisme émotionnel (son impact sur le public est tel que ce thème est toujours fréquemment joué en ouverture et fermeture du Festival de Cannes), dans sa forme populaire, If We Hold On Together chantée par Diana Ross, il universalise son propos au-delà des salles de cinéma en un message de fraternité essentiel, mis en paroles par Will Jennings qui allait devenir neuf ans plus tard le parolier oscarisé de My Heart Will Go On, le plus grand hit de James Horner.
Epuisé par un calendrier serré (entre Willow et d'autres productions de 1988), James Horner travaille jour et nuit pour livrer une partition purement orchestrale léchée jusqu'à outrance. Avec l'orchestrateur Greig McRitchie (qui a participé à tous ses précédents films pour Disney et Lucasfilm Ltd.), il développe des orchestrations d'une richesse inouïe et d'une maturité étonnante pour un film d'animation destiné à des enfants qui, ayant bien grandi depuis, remercient James Horner pour ce véritable don du cœur.

« James est un compositeur accompli et sensible et ce que je retiens, c'est qu'il travaille sans relâche pour fournir le meilleur score possible. Sur Le Petit Dinosaure, il était épuisé mais toujours prêt à travailler la nuit, si nécessaire, pour tirer le meilleur de l'orchestre et de la chorale. » (Don Bluth)**

Pour parfaire ce triple succès avec George Lucas, James Horner compose une musique ultrasonique pour le nouveau logo du label qualité THX. L'orchestre s'emballe dans un déchaînement orchestral dans la pure continuité de Captain EO et le son prend une ampleur frissonnante qui fait trembler les salles certifiées THX.

C'est une fois de plus une jolie coïncidence si le compositeur se retrouve sur deux nouvelles productions Disney majeures en prises de vue réelles.
Joe Johnston, créateur chevronné d'effets spéciaux chez ILM depuis Star Wars : Un Nouvel Espoir, débute sa carrière de cinéaste sur les chapeaux de roue, avec deux films à l'ambition démesurée. Pour atteindre la démesure musicale nécessaire à de telles productions, il fait appel à son ami James Horner, qu'il a rencontré à ses tout débuts sur les plateaux de tournage et avec qui il a lié des liens proches avec le temps.

Sur le premier film, Chérie, J'ai Rétréci les Gosses, en 1989, James Horner crée un mélange très hétéroclite de diverses influences musicales. Il convoque de nouveau ses amis instrumentistes ethniques Kazu Matsui et le groupe Incantation pour donner à un simple jardin de banlieue des airs de jungle amazonienne. Il rend également un savoureux hommage à Carl Stalling (compositeur des premiers cartoons musicaux de Disney dans les années 30), nécessaire pour suivre le rythme cartoonesque du film clairement décidé dès le générique animé d'ouverture du film. Il fait également appel à une couleur plus inattendue dans une comédie Disney, en invitant la musique de l'italien Nino Rota, ce qui lui vaudra d'ailleurs d'être poursuivi par les héritiers du compositeur fétiche du cinéaste Frederico Fellini, ne comprenant pas la démarche purement "citationnelle" de James Horner et cherchant à rentabiliser leur héritage. La porte étant ouverte, la famille de Raymond Scott, auteur du morceau Powerhouse, démocratisé par Carl Stalling dans de nombreux cartoons écrits pour la Warner Bros (ce qui n'avait jamais dérangé personne alors) et dont l'air est repris dans l'ouverture du film, en profite pour attaquer Disney et le compositeur pour l'utilisation de leur héritage, chacun essayant de se faire un peu d'argent en faisant mine de ne pas comprendre le principe de l'hommage culturel et de la citation.

« S'inspirer d'un style, d'un auteur est une forme de création, et heureusement sinon il n'y aurait pas de musiciens au XXème siècle. Rendre sien ce qui ne l'est pas de prime abord est vraiment un acte créatif. Il faut comprendre l'auteur original, comprendre sa démarche, sa sensibilité en même temps que sa technique. »

« Je suis musicologue, docteur en musique. J'ai donc écouté, étudié et disséqué énormément de musique. J'aime aussi la métaphore, le jeu de la citation et celui du cycle. » (James Horner)*

Se livrant pleinement à ce "jeu du cycle", le thème du générique de Chérie, J'ai Rétréci les Gosses sera d'ailleurs largement repris dans le court-métrage d'animation de Roger Rabbit Bobo Bidon (réalisé par Rob Minkoff, réalisateur du Roi Lion), qui passera en première partie du film et également brillamment mis en musique par James Horner dans le genre du cartoon, pourtant très difficile à écrire et à conduire et qui n'a jamais été et ne sera plus jamais abordé dans sa carrière.

James Horner a toujours été un passionné d'aviation et il aimait piloter lui-même son propre avion au-dessus des vastes étendues de la Californie. Là-haut il se sentait en harmonie avec le monde, un oiseau libre et pétri de musique. C'est donc avec un grand bonheur qu'il accepta d'écrire la musique du prochain film de son ami Joe Johnston, Les Aventures de Rocketeer, un film se déroulant pendant la seconde guerre mondiale et qui met en scène un superhéros aviateur. 

« Un des meilleurs moments de ma carrière fut de travailler avec James sur Rocketeer. Il était très enthousiaste à l'idée d'écrire une musique pour un film qui abordait une de ses grandes passions, l'aviation. Après avoir vu un montage préliminaire du film, James m'a invité à son studio pour me présenter une idée du thème principal. Il s'est assis au piano et a simplement joué d'une seule main cette éloquente et belle mélodie. Avec seulement quelques notes, il a saisi l'essence de cette histoire et a rendu musicale cette romance, cette aventure d'un autre temps. Après l'enregistrement, je lui ai demandé un autographe sur la partition du générique de début. C'est toujours aujourd'hui un de mes biens les plus précieux et sa musique pour Rocketeer demeure ma préférée de tous les temps.» (Joe Johnston)**

Ce sentiment de plénitude que James Horner ressentait en planant dans les airs, il a parfaitement su le retranscrire avec son thème principal : la mélodie est lente et majestueuse, elle suspend son auditeur au-dessus d'un vide apaisant. Il revisitera d'ailleurs ce thème des années plus tard dans une composition pour les spectacles aériens des acrobates de l'air The Horsemen.

« J'ai toujours adoré voler, je suis dingue d'aviation depuis tout petit. Je collectionne les magazines à ce sujet et j'assiste à des meetings aériens partout en Europe. Rocketeer est merveilleux parce qu'il évoque la liberté que l'on peut ressentir lorsque nous volons. » (James Horner)**

Evitant la facilité du jazz, le reste de la partition est clairement influencée par la musique de serials des années 30-40 avec ses innombrables moments épiques d'action impeccablement minutée et son love theme absolument renversant de beauté, l'un des plus beaux qu'il aura écrit durant toute sa carrière. Malgré un temps très court pour écrire la musique (2 semaines et demie) à cause d'incessants changements dans le montage du film, Les Aventures de Rocketeer demeure une des partitions les plus impressionnantes de James Horner, par le flot incessant de mélodies planantes et d'action vertigineuse dont elle regorge, mais surtout grâce à cette grisante sensation de voler qu'il parvient à transmettre par le langage de la musique.  Pour l'anecdote, la musique de Rocketeer a d'ailleurs été diffusée pendant des années dans la file d'attente de Space Mountain : de la Terre à la Lune

En 1993, James Horner débute l'année avec Swing Kids, un film produit par Hollywood Pictures sur de jeunes adultes de l'Allemagne nazie qui écoutent une musique alors interdite dans leur pays : du Swing. De nombreux morceaux légendaires de cette époque dominent la bande originale tandis que James Horner n'a que peu de place pour écrire le reste de la musique, une courte partition à l'impact dramatique et à la sensibilité pourtant indéniable dans laquelle l'influence du Romantisme de Brahms (compositeur allemand du 19ème siècle) se fait sentir.

De par sa relation privilégiée avec Steven Spielberg, James Horner est le seul compositeur des films Amblimation, mais aussi le compositeur préféré des productions live de Amblin. Il embarque donc la même année pour un voyage musical en Afrique avec Kalahari, co-produit par Walt Disney Pictures, un récit tragique sur le thème du braconnage et de la survie. Au-delà des percussions typiquement africaines, il utilise une nouvelle fois le shakuhachi, la flûte exotique de son ami Kazu Matsui. Même s'il s'agit d'une flûte japonaise et que le récit se déroule en Afrique, James Horner privilégiait toujours la couleur instrumentale avant l'authenticité régionale. Il déploie pour ce film un thème principal majestueux aux envolées absolument poignantes et des morceaux d'action impressionnants comme ceux du marais et de la tempête de sable. Kalahari est finalement une musique d'aventures à la fois dépaysante (les sonorités ethniques étant encore une fois la marque de fabrique de son auteur), grandiose et profondément dramatique.
C'est également la seule fois dans sa carrière où il peut travailler sur le même film à la fois pour Disney et Steven Spielberg, un studio qui lui a donné ses premières chances et un producteur qui l'a propulsé au sommet.

« Jamais je ne refuserai un film de Steven Spielberg, du simple fait que je le connais depuis longtemps et qu'il me le demande personnellement. » (James Horner)*

Toujours en 1993, David Kirschner qui a travaillé avec James Horner sur plusieurs films d'animation qu'il avait écrits, fait appel à lui une nouvelle fois pour la musique de Hocus Pocus - Les Trois Sorcières. Déjà avant le tournage, James Horner écrit un thème intitulé The Garden of Magic, car il sera chanté par le personnage de Sarah Jessica Parker. Or, 1993 s'avère être l'année la plus chargée de toute sa carrière avec, au total, dis bandes originales écrites pour le cinéma. Hocus Pocus - Les Trois Sorcières est de trop et un conflit d'emploi du temps le contraint  à abandonner le film seulement deux semaines avant l'enregistrement de l'orchestre et de laisser la place au nouveau jeune talent montant du moment, John Debney, qui parviendra tout de même à incorporer à sa partition le thème de James Horner pour plus de cohérence.

En 1996, James Horner est nommé aux oscars pour deux œuvres en même temps : Braveheart (sa deuxième collaboration avec Mel Gibson, qui brille cette année là avec Pocahontas, une Légende Indienne dans le rôle de John Smith) et Apollo 13 (sa troisième collaboration avec Ron Howard qui fait suite à Willow). James Horner est à deux doigts de la consécration ultime mais l'oscar lui échappe de peu. Ron Howard a du mal à garder son compositeur fétiche, très demandé, et il s'empresse de lui demander de composer la musique de La Rançon, son nouveau thriller avec Mel Gibson et produit par Disney via son label Touchstone. L'occasion pour James Horner de travailler sur le même film que les deux hommes qui ont permis ses deux nominations aux oscars est trop belle. Hélas, il est déjà très impliqué sur une foule de films et il a le regret de décliner l'invitation de ses deux chers collaborateurs.
Howard Shore, ayant récemment remplacé Danny Elfman sur Ed Wood de Tim Burton (aussi produit par le label Touchstone) est choisi pour finalement écrire la musique de La Rançon. Sa musique est enregistrée mais elle est jugée trop pesante et finit donc rejetée. James Horner parvient à se libérer pour composer et enregistrer encore une fois en urgence une nouvelle partition pour le film, en seulement deux semaines avant le mixage.
James s'attelle donc à composer une musique de suspense toute en finesse, qui agit dans l'ombre du film sans jamais écraser les images, même dans les superbes moments d'action dont il a le secret.

« C'est une musique angoissante. Dans le film, cela lui donne une impulsion, la rend plus dangereuse... Comme si on entendait le tic-tac d'une horloge. Ca donne un certain rythme. Ca fait battre le cœur un peu plus vite, comme si le temps était compté et ça accélère la séquence. Dans le film, vous ne percevez pas vraiment la musique, mais vous êtes en quelque sorte manipulé émotionnellement par cette musique. » (James Horner)*

Même si James Horner est déjà depuis de nombreuses années, un compositeur incontournable et très demandé à Hollywood, personne n'est conscient de ce qui est alors sur le point d'arriver. A la fin de l'année 1997, à son propre étonnement, James Horner devient une véritable star mondiale. Il vient de composer la musique symphonique la plus vendue de tous les temps (avec environ 40 millions de disques), et remporte enfin pour l'unique fois de sa vie, non pas un mais deux oscars pour ce qui demeurera le plus grand succès de toute sa carrière : Titanic.

En 1998, alors que sa chanson My Heart Will Go On est chantée par Céline Dion sur toutes les radios, le tout Hollywood veut James Horner sur son prochain film. Steven Spielberg et Disney, loin de leur alliance de 1993 sur Kalahari, se disputent plus que jamais le maestro. Spielberg parvient à l'obtenir sur Deep Impact et Le Masque de Zorro, tandis que Disney se bat pour le récupérer sur Mon Ami Joe.
Joe Roth, depuis peu nouveau patron des studios Disney, avait travaillé avec James Horner de 1984 à 1988 et avait notamment produit Le Flic Etait Presque Parfait en 1986. Autant dire qu'après le succès de Titanic, il veut récupérer son collaborateur depuis longtemps perdu de vue. Voulant clairement profiter de l'effet Titanic, Roth a obtenu l'acteur Bill Paxton et compte faire de James Horner un argument majeur de promotion de sa nouvelle super production Mon Ami Joe, un remake d'un film de 1949 vaguement inspiré de King Kong.
Comme sur Kalahari, qui possède des thèmes semblables (l'Afrique, la perte d'un parent et le braconnage), James Horner invite une nouvelle fois son grand ami japonais Kazu Matsui et son imparable shakuhachi, mais cette fois il peut aller encore beaucoup plus loin dans l'exotisme, avec également les flûtes des Andes de Tony Hinnigan du groupe Incantation (encore auréolé de son immense participation à Titanic avec ses solos à la flûte irlandaise), un chœur africain massif et les percussions tribales de Michael Fisher qui sont les véritables stars musicales de cette œuvre percutante ! Plus que jamais, cette partition respire la passion que James entretient depuis le début de sa carrière pour la musique du monde, en rassemblant ici trois continents, trois influences musicales (africaine, amérindienne et asiatique). Il y voit l'opportunité de réunir toutes les cultures musicales autour d'un profond hymne à la nature.
Pour aider James dans sa lourde tâche d'enregistrer dans l'urgence une composition aussi dantesque, J.A.C Redford (compositeur d'Oliver & Compagnie et qui a dirigé l'orchestre de La Petite Sirène) est appelé en renfort pour écrire toutes les orchestrations que James n'a pas le temps d'écrire lui-même. Avec Redford, c'est le début d'une longue collaboration qui durera tout le reste de sa vie sur près de 20 films. Enfin, pour apporter de la douceur à un flot d'action percutante et décoiffante (le finale homérique parvient à garder toute son intensité durant près de 24 minutes), il compose un thème principal d'une tendresse exquise et une chanson en Swahili (Windsong) dont le chœur est dirigé par Lebo M. (Le Roi Lion) et dont les paroles sont confiées au parolier de Titanic et Le Petit Dinosaure, Will Jennings.
Le résultat final est vraiment saisissant et Mon Ami Joe demeurera avec Les Aventures de Rocketeer la musique la plus éclatante et la plus personnelle que James ait composée pour un film produit par Disney. C'est sur cette apothéose musicale (et pourtant un échec au box-office) que se termine bientôt la participation de James Horner aux productions Disney car c'est le dernier film Walt Disney Pictures qu'il mettra en musique.

L'année suivante, en 1999, Chris Colombus confie naturellement la musique de L'Homme Bicentenaire (film de science-fiction tiré d'une nouvelle de Isaac Asimov et co-produit par Touchstone) à John Williams, son partenaire musical de longue date. Mais, John Williams étant pris sur d'autres projets en cette fin d'année 1999, le second choix se porte sur James Horner. Passée l'ouverture virevoltante et vertigineuse (The Machine Age), James Horner traite ce film sur l'humanité et l'amour avec sobriété, sensibilité et classicisme, en empruntant l'impressionnisme musical français d'un Claude Debussy.

« J'ai avant tout cherché à nuancer les timbres pour les rendre plus subtils, en travaillant les pauses et les respirations de l'orchestration. (...) Chris Colombus voulait un axe Romantique sans être sentimental. Je voulais un axe plus impressionniste. (...) Claude Debussy n'est-il pas un grand Romantique ? » (James Horner)*

Encore sous le charme de sa muse Céline Dion, il décide de lui offrir une seconde chanson pour clore ce film, Then You Look at Me, une fois de plus avec des paroles écrites par Will Jennings. Le trio gagnant de My Heart Will Go On est de nouveau réuni une dernière fois, à l'occasion d'une chanson à l'ampleur symphonique et harmonique étourdissante d'émotion.

« Tout ce que fait James est magnifique. Sa musique est tellement émouvante. C'est un honneur  à chaque fois de recevoir ce cadeau. Le plus difficile reste l'enregistrement car James s'investit tellement dans son œuvre que vous vous devez de travailler encore plus pour être à son niveau de perfection. » (Céline Dion)*

«Céline Dion est une telle source d'inspiration que tout le mérite lui revient. » (James Horner)*

Dans les années 2000 et 2010, James Horner prend ses distances avec Disney et s'intéresse à des projets plus inattendus. Il renoue notamment des liens forts avec le réalisateur français Jean-Jacques Annaud, pour lequel il écrit certaines de ses plus belles pages pendant cette période (Stalingrad, Or Noir et Le Dernier Loup).

« J'ai travaillé avec lui pendant trente ans. (...) Je lui faisais toujours confiance parce que nous étions des amis. Je me souviens que je lui disais "James, on se connaît tellement bien que c'est maintenant ton film." (...) Il était si timide, si modeste, si humble. Quand nous enregistrions, James faisait toujours répéter l'orchestre et venait me dire dans la cabine "Alors, tu en penses quoi ?" Et je lui disais "James, tout ce que j'ai à dire c'est que j'aime ta musique et que je t'aime toi". C'est une relation très rare. » (Jean-Jacques Annaud)

Sa participation en 2001 et 2002 à deux productions indépendantes Miramax est le parfait exemple de la tangente prise par James Horner sur la seconde moitié de sa carrière : mettre sa sensibilité au service d'histoires réalistes et graves.
Iris est une partition tout en retenue, soutenant la dramatique histoire d'une Kate Winslet victime de la maladie d'Alzheimer et mettant en avant les solos virtuoses du violoniste Joshua Bell. Frères du Désert est, au contraire, une grande fresque musicale épique aux teintes éminemment orientales, avec des percussions et des flûtes ethniques, un Sarangi (une vièle à archet d'origine indienne) et la voix solo dure et hypnotisante du pakistanais Rahat Nusrat Fateh Ali Khan. C'est, dans la filmographie Disney de James Horner, la première fois qu'il utilise une voix solo, une habitude qu'il avait prise depuis le début des années 90 dans de nombreuses oeuvres (il a utilisé durant toute sa carrière une vingtaine de vocalistes différents), bien avant que cette pratique ne se généralise chez les autres compositeurs (après l'immense succès de la voix solo de Sissel dans Titanic) et devienne aujourd'hui très commune.

Trois années s'écouleront avant que James Horner redevienne intéressé par un projet produit par Disney (sous le label Touchstone) : Flight Plan en 2005. Attiré par le sujet de l'aviation et la relation entre une mère et sa fille, il accepte de travailler sur ce film avec Jodie Foster. Il y revisite par la même occasion le thème du kidnapping qu'il avait déjà traité dix ans auparavant dans La Rançon avec une approche musicale du thriller dans la même continuité : du piano agité, des percussions frappantes, des cordes tournoyantes. Il parvient même ici à incorporer sa touche ethnique, en employant son fidèle Tony Hinnigan et sa flûte de Pan, employée pour rythmer le suspense comme dans le morceau palpitant The Search.

L'année suivante en 2006, il poussera encore bien plus loin son amour des flûtes des Andes avec sa dernière composition pour Mel Gibson et sa dernière composition pour Touchstone, dans le film Apocalypto, le récit de la chute de l'empire Maya. Cette partition est l'une des plus abstraites de James Horner. Les synthétiseurs pesants côtoient les sons organiques et ethniques des flûtes de Tony Hinnigan et les voix solo de Rahat Nusrat Fateh Ali Khan (déjà entendu dans Frères du Désert) et Terry Edwards, en un mélange très atmosphérique.

« J'essaie toujours d'utiliser des couleurs et des artistes que je pense aller merveilleusement bien ensemble. Ces combinaisons réunissent des éléments qui paraissent d'abord ordinaires, pour en faire quelque chose qui n'a jamais été fait auparavant. » (James Horner)**

En 2008, il compose la délicate et bouleversante musique d'une production Miramax délocalisée en Angleterre : Le Garçon au Pyjama Rayé, le récit de l'amitié entre un enfant allemand et un enfant juif détenu dans un camp de concentration. Allier le thème de l'enfance avec une tragédie aussi dure que celle de la Shoah était un défi sur mesure pour la subtilité de James Horner. Il articule l'ensemble de son écriture autour de son piano, qu'il interprète lui-même, comme lors de beaucoup de ses enregistrements.

« La seule scène que j'ai faite de manière sombre à la fin du film était cette longue, longue séquence. C'est très intense. Le reste a été fait comme à la manière d'une berceuse de Brahms avec l'idée de décrire la période, la famille et le garçon, sans être totalement narratif. C'était mélancolique, doux-amer. Le but n'était pas de raconter le film en musique. Il s'agissait plutôt de réflexions sur cette période, et c'était vraiment la mission que je m'étais fixée. » (James Horner)**

Très intelligemment, il fait évoluer son thème "brahmsien" de Swing Kids, écrit 15 ans auparavant, qui se déroulait également en Allemagne et qui mettait en scène une jeunesse insouciante dans le décor de cette terrible époque de répression nazie. Encore une fois, James amplifie le sens de sa musique par son fameux jeu du cycle, en faisant un profond écho à cette ancienne partition de son oeuvre

« Je ne maquille pas le motif, je lui donne une autre vie dans un contexte semblable. Ce qu'il ne faut pas faire, c'est prendre un motif et le recoller quelque part simplement par facilité. Toute citation doit avoir un sens thématique ou émotionnel. » (James Horner)*

En 2009, James Horner compose pour James Cameron la musique du plus grand succès au cinéma de tous les temps, Avatar, assurément sa composition la plus riche et travaillée et l'aboutissement de sa carrière.

Trois ans après ce dernier fulgurant succès, il revient pour la toute dernière fois de sa vie sur une production d'une filiale de Disney, Marvel en l'occurrence, avec The Amazing Spider-Man en 2012. C'est seulement la deuxième fois dans sa longue carrière que James Horner compose la musique d'un film de superhéros et il est manifestement toujours dans son élément sur cet exercice. Il retrouve toute la grâce (un love theme comme toujours très sensible) et l'héroïsme (un thème principal mémorable et accrocheur) dont il avait su faire preuve 20 ans auparavant sur Les Aventures de Rocketeer, dont il cite brièvement dans Becoming Spider-Man le grand accelerando final pour créer un pont thématique entre les deux films. Mais The Amazing Spider-Man est aussi nourri des évolutions qui ont fait grandir sa musique au fur et à mesure de ses nouvelles expériences. Ainsi, y sont directement héritées d'Avatar les voix solo du jeune soprano Luca Franglen et de la vocaliste au timbre suave Lisbeth Scott, également vocaliste sur une dizaine de films Lucasfilm Ltd., Marvel et Disney dont le premier Spider-Man (la boucle est bouclée), Atlantide, l'Empire Perdu, Star Wars : La Revanche des Sith ou encore Indiana Jones et Le Royaume du Crâne de Cristal). De manière encore plus étonnante, James convoque une troisième voix, celle du chanteur tunisien Dhafer Youssef qui avait été choisi en 2011 par James Horner pour être la voix orientale de Or Noir de Jean-Jacques Annaud et qui apporte à l'univers de l'homme araignée un souffle de mystère terriblement envoûtant.

« Ma musique constitue un pont entre l'Occident et l'Orient. La mélancolie et la tristesse qui s'en dégagent proviennent de cette identité. James Horner partage avec moi ce même lien. (...) Au niveau musical, nous nous sommes très bien entendus, comme si nous étions de la même famille. Je fus étonné de voir devant moi un grand maître, qui semble ne vivre que pour la musique et qui laisse son ego de côté. » (Dhafer Youssef)**

Le 22 juin 2015, la passion de James Horner pour l'aviation aura raison de lui ; il décolle pour son dernier voyage et rejoint le ciel au volant de son avion, lors d'un accident fatal, laissant sa famille, ses amis, collaborateurs et ses nombreux admirateurs orphelins et désemparés. La nouvelle est d'autant plus tragique que le compositeur, âgé seulement de 61 ans, avait de nombreux projets musicaux, notamment pour Disney l'écriture de la musique des attractions Avatar prévues dans le Disney's Animal Kingdom en Floride.

« Je sais que c'est dangereux, mais j'en ai besoin. J'ai besoin de m'échapper de de ce monde d'Hollywood. J'ai besoin de me rapprocher du ciel. Si quelque chose devait arriver, ce serait le destin. » (James Horner, propos rapportés par Jean-Jacques Annaud)

Dans les années 80, Disney a été un tremplin indéniable pour la carrière débutante de James Horner, attiré par des éléments chers à la compagnie (l'enfance, la fantaisie et le dessin animé), même s'il a aussi pu exprimer ses rêves en musique avec Amblin et Lucasfilm Ltd., à la fois concurrents et partenaires de Disney. Dans les années 2000, son réalisme l'emporte sur le rêve, il grandit en même temps que ses auditeurs des années 80 et 90 et s'intéresse à un cinéma plus pragmatique et plus intimiste, même si son âme d'enfant ne l'a jamais quitté et refait souvent surface jusqu'à la fin de sa carrière.

Toute sa vie, James Horner a toujours cherché à faire reconnaître une musique d'orchestre et une musique du monde boudées par le grand public. Il est celui qui y a le mieux réussi dans toute l'Histoire, car sa musique a été écoutée par des milliards de spectateurs (ayant musicalisé les plus grands succès de l'Histoire du cinéma) et ses albums se sont vendus par dizaines de millions (plus qu'aucun autre compositeur de musique symphonique). Son accomplissement est aussi impressionnant que l'humilité avec laquelle il a pourtant réussi à entretenir sa passion durant une vie entièrement dévouée à tenter de traduire des émotions en musique.

Au-delà de son incommensurable talent musical, pour tous ceux qui l'ont connu, James Horner était surtout un homme doté d'un coeur immense, d'une gentillesse et d'une douceur qui se reflètent parfaitement dans ses plus belles musiques. Même ceux qui ne l'ont jamais rencontré ont pu comprendre, en écoutant sa musique, qu'il possédait une sensibilité hors du commun, car il savait par les notes s'envoler droit vers le cœur son auditeur. Il voulait raconter des histoires en musique et il les a racontées avec son cœur et son âme. Il nous a offert son don, dans chaque note qu'il a écrite. Comme Antoine de Saint-Exupéry, l'homme s'est éteint en plein vol mais l'artiste volera éternellement.

Discographie de James Horner

Etrangement, Walt Disney Records n'a jamais édité un seul CD de la musique de James Horner, malgré sa participation à sept long-métrages labellisés Disney.
Dans les années 80, dans toute la filmographie de James Horner pour Disney et ses filiales, seules les productions Lucasfilm Ltd. sont proposées sur CD avec les éditions en 1988 de Willow (chez Virgin Records) et du (Le) Petit Dinosaure et la Vallée des Merveilles (chez MCA), une édition épuisée et rare depuis que le label MCA a été fermé.
Dans les années 90 et 2000, Hollywood Records se charge de l'édition de tous les CD de James Horner que Disney veut bien éditer : Les Aventures de Rocketeer en 1991, Swing Kids en 1993, La Rançon en 1996, Mon Ami Joe en 1998 (le CD qui s'est le mieux vendu dans toute cette discographie, profitant de l'effet Titanic et devenant rapidement disque d'or), Flight Plan en 2005, Apocalypto en 2006 et Le Garçon en Pyjama Rayé en 2008 (une édition dématérialisée en mp3 et une édition promotionnelle sur CD pour les Oscars qui n'a jamais été commercialisée et qui est donc très rare).
Pour les co-productions avec Columbia Pictures et une avec la BBC, c'est le label Sony Classical qui édite L'Homme Bicentenaire en 1999, Iris et Frères du Désert en 2002 et The Amazing Spider-Man en 2012.

Intrada Records permet une édition en CD de Kalahari en 1993 qu'ils rééditeront dans une version complète 21 ans plus tard, en 2014.
En 2009, Intrada améliore son partenariat avec Disney et obtient ainsi la possibilité d'éditer, coup sur coup la même année, les 3 productions Disney restées totalement inédites sur disque depuis les années 80 et restaurées par le mixeur fidèle de James Horner, Simon Rhodes. La Foire des Ténèbres est enfin édité (à 3000 exemplaires) après 26 ans, à partir des masters numériques de 1983 stockés sur bandes magnétiques 3M et après avoir découvert qu'il ne restait qu'une seule machine capable de lire ces bandes chez Disney Imagineering. Natty Gann n'a pas autant de chance car les masters furent perdus. Le CD devient possible lorsque James Horner fournit une copie personnelle de ce master à Intrada, malgré quelques morceaux manquants qui furent retrouvés sur des sources de piètre qualité et proposés en guise de bonus à la fin du CD limité à 2500 exemplaires. Chérie, J'ai Rétréci les Gosses peut enfin voir le jour sur CD (3000 exemplaires) depuis le master numérique de 1988 et ce malgré les problèmes de droits qui ont interdit son existence en 1989. Ces trois éditions étant limitées, elles sont évidemment difficile à trouver aujourd'hui car épuisées depuis longtemps.

Au jour de l'écriture de cet article, un seul long métrage Disney n'a jamais connu d'édition (Le Flic Etait Presque Parfait) et deux court-métrages demeurent également inédits (Captain EO et Bobo Bidon). 

Note personnelle du rédacteur :

Remerciements particuliers à Didier Leprêtre et Jean-baptiste Martin. "Happy Hornering" et que William Wallace et James Horner nous protègent. ;)
Merci James pour le cadeau que tu m'as fait peu avant de disparaître. Je ne l'oublierai jamais. Tu es très loin là-bas, mais mon coeur continuera d'aimer ta musique.

* propos recueillis par Didier Leprêtre pour la revue Dreams to Dream...s
** citations issues du site http://jameshorner-filmmusic.com/fr/ administré par Jean-baptiste Martin

La filmographie

▼ Aller en bas de la liste ▼
001
Compositeur • Science-fiction • Paramount Pictures
1982
Cinéma
1982
Cinéma
002
La Foire des Ténèbres
Compositeur • Fantastique
1983
Cinéma
1983
Cinéma
003
Compositeur • Science-fiction • Paramount Pictures
1984
Cinéma
1984
Cinéma
004
Cocoon
Compositeur • Science-fiction
1985
Cinéma
1985
Cinéma
005
Natty Gann
Compositeur • Aventure
1985
Cinéma
1985
Cinéma
006
Compositeur • Fantastique • Universal Pictures
1985 • 1987
Télévision
1985 • 1987
Télévision
007
Le Flic Était Presque Parfait
Compositeur • Comédie
1986
Cinéma
1986
Cinéma
008
Aliens, le Retour
Compositeur • Science-fiction
1986
Cinéma
1986
Cinéma
009
Compositeur • Science-fiction • Universal Pictures
1987
Cinéma
1987
Cinéma
010
Willow
Compositeur • Fantastique
1988
Cinéma
1988
Cinéma
011
Compositeur • Animation 2D • Universal Pictures
1988
Cinéma
1988
Cinéma
012
Compositeur • Science-fiction
1988
Cinéma
1988
Cinéma
013
Compositeur • Comédie dramatique • Universal Pictures
1989
Cinéma
1989
Cinéma
014
Bobo Bidon
Compositeur • Animation 2D
1989
Cinéma
1989
Cinéma
015
Chérie, J'ai Rétréci les Gosses
Compositeur • Comédie
1989
Cinéma
1989
Cinéma
016
Les Aventures de Rocketeer
Compositeur • Aventure
1991
Cinéma
1991
Cinéma
017
Compositeur • Drame
1993
Cinéma
1993
Cinéma
018
Kalahari
Compositeur • Aventure
1993
Cinéma
1993
Cinéma
019
Hocus Pocus - Les Trois Sorcières
Compositeur • Comédie
1993
Cinéma
1993
Cinéma
020
Compositeur • Drame • Warner Bros.
1993
Cinéma
1993
Cinéma
021
Compositeur • Fantastique • Universal Pictures
1995
Cinéma
1995
Cinéma
022
Compositeur • Fantastique • TriStar Pictures
1995
Cinéma
1995
Cinéma
023
La Rançon
Compositeur • Action
1996
Cinéma
1996
Cinéma
024
Titanic
Compositeur • Drame • 3-D
1997
Cinéma
1997
Cinéma
025
Compositeur • Science-fiction • Paramount Pictures
1998
Cinéma
1998
Cinéma
026
Mon Ami Joe
Compositeur • Aventure
1998
Cinéma
1998
Cinéma
027
Compositeur • Patinage • "Live"
1999
Télévision
1999
Télévision
028
L'Homme Bicentenaire
Compositeur • Science-fiction
1999
Cinéma
1999
Cinéma
029
Compositeur • Aventure • Warner Bros.
2000
Cinéma
2000
Cinéma
030
Compositeur • Drame
2002
Cinéma
2002
Cinéma
031
Compositeur • Aventure
2002
Cinéma
2002
Cinéma
032
Compositeur • Drame • Royaume-Uni
2004
Cinéma
2004
Cinéma
033
Compositeur • Thriller
2005
Cinéma
2005
Cinéma
034
Apocalypto
Compositeur • Aventure
2006
Cinéma
2006
Cinéma
035
Compositeur • Fantastique • Paramount Pictures
2008
Cinéma
2008
Cinéma
036
Compositeur • Drame
2008
Cinéma
2008
Cinéma
037
Compositeur • Science-fiction • IMAX • 3-D
2009
Cinéma
2009
Cinéma
038
The Amazing Spider-Man
Compositeur • Fantastique • Columbia Pictures • IMAX • 3-D
2012
Cinéma
2012
Cinéma
▲ Retour en haut de la liste ▲

Poursuivre la visite

1989 • 2024

Le Forum et les Réseaux Sociaux

www.chroniquedisney.fr
Chronique Disney est un site de fans, non officiel, sans lien avec The Walt Disney Company, ni publicité,
utilisant des visuels appartenant à The Walt Disney Company ou des tiers par simple tolérance éditoriale, jamais commerciale.