Titre original :
Little Miss Sunshine
Production :
Fox Searchlight Pictures
Big Beach
Bona Fide Productions
Deep River Productions
Third Gear
Date de sortie USA :
Le 20 janvier 2006 (Festival du Film de Sundance)
Le 26 juillet 2006 (Sortie Limitée)
Le 18 août 2006 (Sortie Nationale)
Genre :
Comédie dramatique
Réalisation :
Jonathan Dayton
Valerie Faris
Musique :
Devotchka
Mychael Danna
Durée :
101 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Dans la famille Hoover, le père, Richard, est coach de vie et ne supporte pas l'idée d'échec. La mère, Sheryl, tente de s'occuper au mieux de son foyer, bien qu'elle se sente souvent dépassée. Le fils aîné, Paul, se mure dans le silence depuis qu'il ambitionne de devenir pilote de chasse. Et la petite dernière, Olive, rêve de participer au concours de beauté pour enfants « Little Miss Sunshine ». Aussi, lorsqu'elle est enfin sélectionnée, toute la famille embarque dans un Combi hors d'âge pour un road-trip à travers les États-Unis, direction la Californie. Emmenant au passage avec eux le père de Richard, un vétéran de la Seconde Guerre mondiale consommateur d'héroïne, et le frère de Sheryl, un universitaire homosexuel, dépressif et suicidaire, spécialiste de Marcel Proust, le voyage s'annonce pour le moins folklorique !

La critique

rédigée par
Publiée le 15 septembre 2022

Il est des films qui, au premier abord, ne paient pas de mine. Dont le spectateur n'attend pas forcément grand-chose en les visionnant pour la première fois et qui, pourtant, parviennent à le cueillir et le toucher. Little Miss Sunshine est de ceux-là. Un petit film indépendant sans grande prétention qui procure une étrange sensation de bien-être. Un feel good movie qui ne dit pas son nom, ne refusant pas de traiter de sujets graves et sérieux. Et qui réussit à ravir tout aussi bien le public que la critique !

Et pourtant, rien n'est gagné d'avance lorsque le projet voit le jour, à l'entrée dans le deuxième millénaire. L'histoire germe en effet dans l'esprit du scénariste Michael Arndt. L'idée de départ ? Le voyage d'une famille américaine moyenne, dont chacun des membres compose avec son lot de difficultés personnelles et qui va se souder au cours d'un road-trip décalé. Mais à l'époque, Michael Arndt n'est encore qu'un parfait inconnu à Hollywood, où il s'est lancé en tant qu'assistant du comédien Matthew Broderick sur les tournages de différents films, parmi lesquels Inspecteur Gadget (1999). En fait, Little Miss Sunshine n'est ni plus ni moins que le tout premier scénario qu'il écrit pour le cinéma. Par la suite, son nom est crédité au générique d'autres grands succès publics, comme Toy Story 3 (2010), Hunger Games : L'Embrasement (2013), Star Wars : Le Réveil de la Force (2015) dont il écrit l'une des premières versions du scénario ou encore The Greatest Showman (2017), toujours en qualité de scénariste. La première mouture du script de Little Miss Sunshine comporte quelques différences avec la version finale, à commencer par le lieu de l'action. À l'origine, Michael Arndt envisage en fait de situer son road-movie sur l'ensemble de la côte est des États-Unis, du Maryland à la Floride, avant de finalement se replier sur un nouvel itinéraire entre les États du Nouveau-Mexique et de la Californie, contraintes budgétaires obligent.

Pensé comme un pur projet du cinéma indépendant, le film est censé être tourné à partir des propres moyens du scénariste, à savoir un caméscope et un budget minime de quelques milliers de dollars seulement. Arndt décide finalement de se tourner vers deux producteurs : Ron Verxa et Albert Berger. Ce sont eux qui dénichent le duo de réalisateurs à qui le film est alors confié : Jonathan Dayton et Valerie Faris. Là encore, c'est un joli pari car ce couple de Californiens n'est pour ainsi dire pas coutumier du grand écran. Jusqu'alors, tous deux se sont surtout illustrés à la télévision dans l'écriture de sketches et de publicités, ainsi que dans la réalisation de clips et de vidéos musicales pour différents groupes (Oasis, Red Hot Chili Peppers, R.E.M. pour ne citer qu'eux). Plus qu'emballés à la lecture du script, ils se lancent donc sur le projet en 2001, après que celui-ci a été revendu par Michael Arndt au producteur Marc Turtletaub.

Pour Little Miss Sunshine, ce n'est alors que le début d'un long parcours du combattant. Car le projet est confronté aux refus successifs de nombreux studios hollywoodiens, à l'exception de Focus Features, qui souhaite cependant en transposer l'action au Canada et apporter d'importantes modifications au scénario. Face à l'opposition de Michael Arndt, ce dernier est évincé de l'aventure, qu'il finit néanmoins par réintégrer peu de temps après, à la faveur d'une réorganisation de la production. Une production qui piétine pendant encore deux ans, jusqu'en 2004, à tel point que Focus Features finit par quitter le navire, revendant ses parts à Marc Turtletaub. Persévérant, celui-ci finance alors le film via ses propres boîtes de production.

Mais évidemment, il lui faut composer avec un budget serré, qui l'empêche de recruter de véritables stars du septième art pour garnir son affiche. Les rôles des différents membres de cette famille sont donc dispatchés entre des acteurs à la notoriété plus modeste, pour la plupart surtout habitués aux seconds rôles à l'époque. Le couple de parents est ainsi confié à Greg Kinnear et Toni Collette. Le premier, malgré quelques rôles forts, n'est pas vraiment la coqueluche d'Hollywood, il faut le bien le dire. Révélé en 1995 dans Blankman de Sydney Pollack, il apparaît ensuite dans quelques comédies romantiques, comme Vous Avez un Messa@ge aux côtés de Tom Hanks et Meg Ryan (1998), et fait également une apparition remarquée dans la série F.R.I.E.N.D.S. en 2003. Le public le retrouve également à l'affiche de La Dernière Chanson (2010). Il est surtout remarqué par le milieu en étant nommé à l'Oscar du meilleur acteur dans un second rôle dans Pour le Pire et le Meilleur, au côté de Jack Nicholson. Dans Little Miss Sunshine, il campe donc le rôle de Richard Hoover, père de famille qui se prédit un avenir de grand conférencier. Ce coach de vie s'efforce d'inculquer à ses enfants, et à l'ensemble de sa famille, des valeurs de compétition à outrance. S'il en devient plus d'une fois franchement désagréable pour ses proches, il n'en est rien pour le public qui se plaît à rire de ses travers. Un rôle qui semble taillé comme un gant pour Greg Kinnear tant il l'interprète avec justesse, évitant de tomber dans la caricature facile.

L'Australienne Toni Collette, révélée au grand public pour son rôle dans le film Muriel (1994) et à l'affiche également de Sixième Sens (1999) de M. Night Shyamalan, interprète ici Sheryl, l'épouse de Richard. Mère de famille aimante et attentionnée, mais totalement surmenée, elle n'est pas aidée par le tempérament égoïste et compétiteur de son mari. Toni Collette livre ici une très belle prestation et attire l'empathie du public sur son personnage. Un personnage dont l'amour familial rayonne bien au-delà de son conjoint et de ses enfants puisqu'elle vient également en aide à son frère, dépressif et suicidaire, en l'accueillant au sein du foyer.

Ce frère, c'est Frank, universitaire homosexuel qui se présente comme le plus grand spécialiste de Marcel Proust et dont la vie a volé en éclats après qu'il est tombé amoureux de l'un de ses étudiants. Seul et sans travail, il atterrit donc dans la famille de sa sœur après une tentative de suicide et va, à leurs côtés, retrouver progressivement le sourire. Si Robin Williams et Bill Murray ont d'abord été envisagés, c'est avec brio que Steve Carrell incarne ce personnage ultra-attachant presque malgré lui. Le pari n'était en effet pas si évident à gagner, tant Frank apparaît replié sur lui-même au commencement du film. D'autant que ce personnage est à l'opposé des rôles confiés à Steve Carrell jusqu'alors. Plus habitué en effet aux personnages très comiques, comme dans Bruce Tout-Puissant (2003), 40 Ans, Toujours Puceau (2005) ou la série The Office (2005-2011), il insuffle à Frank une grande tendresse. Le film, qui sort quelques mois après les débuts de la version US de The Office, participe grandement à construire la popularité naissante de Steve Carrell et reste l'un de ses plus grands succès. Par la suite, il poursuit une belle carrière et enchaîne les rôles dans des films comme Moi, Moche et Méchant (2010), Crazy, Stupid, Love (2011), Alexander et sa Journée Épouvantablement Terrible et Affreuse (2014) ou encore The Big Short : Le Casse du Siècle (2015).

Autre personnage fort de cette drôle de famille : Edwin, le père de Richard. Un ancien militaire bourru, récemment renvoyé de sa maison de retraite à cause de sa consommation de drogue. C'est Alan Arkin qui se voit attribuer l'incarnation de ce grand-père. Acteur à la carrière bien remplie, il est notamment à l'affiche, chez Disney et ses filiales, de films comme Edward aux Mains d'Argent (1990), Les Aventures de Rocketeer (1991), Super Noël Méga Givré (2006), Marley et Moi (2008), Les Muppets, Le Retour (2011), Un Lancer à un Million de Dollars (2014) et Dumbo (2019). Il excelle dans ce rôle de vétéran râleur et cash, qui n'en est pas moins dénué d'amour pour sa petite-fille Olive.

À sept ans, cette dernière ne poursuit qu'un rêve : participer et surtout remporter la victoire (coaching de son père oblige) au concours de beauté pour enfants « Little Miss Sunshine ». Elle peut compter pour cela sur l'entraînement rigoureux prodigué par son grand-père, avec lequel elle forme un binôme savoureux, encore plus diamétralement opposé que Laurel et Hardy ! C'est la jeune Abigail Breslin qui campe cette petite fille attachante à souhait. Âgée d'à peine dix ans à l'époque, elle a toutefois déjà été repérée pour ses rôles dans des films comme Signes (2002), Fashion Maman (2004), Un Mariage de Princesse (2004) ou Super Noël Méga Givré (2006), et sera choisie quelques années plus tard pour intégrer le casting de Bienvenue à Zombieland (2009).

Dernier visage de ce portrait de famille, celui de Paul Dano dans le rôle de Dwayne, le frère aîné d'Olive. Un adolescent qui se mure dans le silence le plus total depuis qu'il entreprend de devenir pilote de chasse : il ne s'exprime depuis qu'en écrivant sur un carnet. S'il n'est pas encore à l'époque l'acteur confirmé qu'il est aujourd'hui, Paul Dano observe un tournant dans sa carrière au moment de la sortie de Little Miss Sunshine et accède à des rôles majeurs dans des films comme There Will Be Blood (2007), Looper (2012), Twelve Years a Slave (2013) ou The Batman (2022). Il est ici largement convaincant dans le rôle de Dwayne, et le public se prend sans mal d'affection pour cet ado torturé qui ne se sent pas à sa place au sein de sa famille.

Une belle galerie de personnages donc, tous plus hauts en couleur les uns que les autres, servis par un casting impeccable, sans aucune fausse note. Chacun parvient à rayonner et dispose de sa scène forte, tout en s'intégrant parfaitement dans les interactions familiales. Et cerise sur le gâteau, les fans de Breaking Bad peuvent se réjouir en apercevant deux têtes d'affiche de la série dans de petits rôles. Ainsi, Walter White en personne passe une tête dans Little Miss Sunshine puisque Bryan Cranston (Malcolm, John Carter, Le Seul et Unique Ivan...) s'y invite le temps d'une séquence. De même, Dean Norris, inoubliable Hank Schrader de Breaking Bad (remarqué également dans Starship Troopers) est au cœur d'une scène très sympathique dans laquelle il joue un policier contrôlant la famille Hoover.

Le tour d'horizon du casting ne serait pas complet sans mentionner le cultissime Combi Volkswagen jaune, qui figure d'ailleurs sur l'affiche du film et que la famille emprunte pour traverser les États-Unis en direction de la Californie. Un véhicule qui se démarque lui aussi des autres par une panne contraignant tout ce petit monde à le pousser avant chaque démarrage, puis à devoir sauter à bord façon bobsleigh une fois lancé.

Un bon casting ne serait rien sans de bons dialogues et de ce côté-là, Little Miss Sunshine fait une fois encore très fort. Les répliques savoureuses s'enchaînent presque sans temps mort, et il ne sera pas difficile d'esquisser un sourire à maintes reprises. Que ce soit en écoutant Steve Carrell raconter les causes de sa tentative de suicide dans un crescendo sans fin ou bien face à Alan Arkin prodiguant des conseils de vie à son petit-fils à grands renforts d'héroïne et de sexe. Sans oublier une scène totalement déjantée dans un hôpital et un final musical devenu culte ! L'émotion n'est pas en reste et sert toujours à véhiculer un message positif, même lorsqu'il s'agit de démontrer qu'atteindre ses rêves n'est pas toujours possible. Les désillusions sont nombreuses pour cette famille, mais leur permettent de ressortir plus forte et plus soudée. Un rappel de l'importance de la solidarité familiale en quelque sorte. C'est donc une étrange sensation de bien-être qui ressort au visionnage de ce film. À tel point qu'il parvient sans peine à devenir un véritable « film doudou » pour certains. Un film pour se redonner le moral, oublier ses tracas, s'évader et rigoler un bon coup malgré la réalité de la vie. Bref, un parfait feel good movie en somme.

Reste à saluer une musique magnifique, œuvre du groupe Devotchka et du compositeur canadien Mychael Danna, qui se voient d'ailleurs nommés aux Grammy Awards dans la catégorie Meilleure musique de film. Leur partition à la fois mélancolique et entraînante fait sensation et c'est mérité, notamment pour le thème principal, The Winner Is. Elle aide par ailleurs Danna à se faire un nom à Hollywood. Par la suite, il signe les bandes originales de nombreux films tels que (500) Jours Ensemble (2009), L'Odyssée de Pi (2012), Le Voyage d'Arlo (2015) ou bien En Avant (2020).

Little Miss Sunshine débarque sur les écrans américains le 26 juillet 2006, après avoir été présenté dans de nombreux festivals, parmi lesquels Sundance, le festival du film de Los Angeles ou encore le Festival du Cinéma américain de Deauville. L'accueil est excellent : critiques et public sont unanimes, et les récompenses pleuvent. Grand prix du Festival du Cinéma américain de Deauville, prix du public au Festival international du film de Saint-Sébastien, César du meilleur film étranger et deux Oscars : celui du meilleur acteur dans un second rôle pour Alan Arkin et celui du meilleur scénario original pour Michael Arndt. Juste retour des choses pour un film au parcours chaotique et aux ambitions modestes. Le budget de huit millions de dollars est largement compensé par les recettes mondiales, qui dépassent les 100 millions de dollars. Un record pour un film indépendant, qui ne sera battu que par Juno.

Film rafraîchissant dont le cinéma semble manquer de plus en plus cruellement, Little Miss Sunshine est à découvrir d'urgence si ce n'est déjà fait. Il y a fort à parier que beaucoup n'auront qu'une envie ensuite : bondir dans un Combi et partir en road-trip, pour le meilleur et pour le pire !

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