Toy Story 3
L'affiche du film
Titre original :
Toy Story 3
Production :
Pixar Animation Studios
Date de sortie USA :
Le 18 juin 2010
Genre :
Animation 3D
IMAX
3-D
Réalisation :
Lee Unkrich
Musique :
Randy Newman
Durée :
100 minutes
Disponibilité(s) en France :
Autre(s) disponibilité(s) aux États-Unis :

Le synopsis

Tandis qu'Andy se prépare à partir pour l'université, sa mère le tanne pour qu'il mette de l'ordre dans ses affaires. L'anxiété monte alors chez ses jouets : mais quel sort a-t-il prévu pour eux ?

La critique

rédigée par

Toy Story 3, onzième film estampillé Pixar, est seulement la deuxième suite jamais produite par le studio. Onze ans séparent ainsi le troisième opus de l'épisode précédent et quatre de plus, s'il s'agit de remonter au tout premier. Cette politique de suites fait d'ailleurs couler beaucoup d'encre. Nombreux, en effet, sont ceux qui craignent de voir le studio au catalogue jusqu'ici exemplaire, perdre de sa superbe, englué dans des œuvres, simples redites dépourvues d'imagination. Il faut dire que le plan de route a de quoi effrayer le plus téméraire des amateurs d'animation 3D : Toy Story 3 pour 2010, Cars 2 pour 2011 et Monstres & Cie 2 pour 2012 ! Les équipes de Luxo Junior auraient-elles décidé de s'endormir sur leurs lauriers, imitant en cela le pire du secteur, DreamWorks ? La réponse est aussi heureuse que claire : non ! Car, il est incontestable que Woody et ses amis vivent dans Toy Story 3 une aventure de haute tenue qui clôt la saga toute entière de la plus belle des manières.

La mise en chantier de Toy Story 3 n'a pourtant pas été un long fleuve tranquille. Au contraire, ce film, plus que tout autre, a été le catalyseur de tous les désaccords apparus entre Steve Jobs, alors propriétaire de Pixar, et Michael Eisner, PDG lui de la Walt Disney Company. Les faits remontent à 2001. Les deux studios envisagent d'abord logiquement de faire un troisième opus pour Toy Story ; le deuxième, sorti en 1999, ayant dépassé toutes les espérances, autant artistiques que commerciales. Mais, bien vite, ils se déchirent sur le montage juridique de l'exploitation de l'œuvre. Liés par un contrat de distribution prévoyant cinq films partagés peu ou prou à 50/50 (1001 Pattes est le premier et Monstres & Cie le second), Pixar estime, en effet, pour sa part, que ce troisième opus est partie intégrante du quota négocié tandis que Disney refuse de le voir comptabilisé de la sorte, sous l'argument que Toy Story préexistant à l'accord, rend, de fait, ses suites indépendantes de cette négociation. Chacun campe sur ses positions jusqu'au point de rupture…
Et tant pis si les premiers films nés de l'accord précédemment signé ont rapporté, à eux-seuls, plus de 2,5 milliards de dollars. Pixar se sent lésé et supporte de plus en plus mal l'idée de partager le butin à hauteur de la moitié avec Disney. Il est, en effet, le responsable de la création et de la production et confie simplement à son partenaire, le marketing et la distribution. Ce dernier dispose, en plus, des droits d'exploitation sur les histoires, des personnages ; l'accord lui laissant même la primauté de décision sur d'éventuelles suites. Ainsi, Pixar a les mains liées ; s'il décide de changer de distributeur, il perd non seulement le droit d'exploiter ses anciens personnages mais ne peut pas, en outre, empêcher la réalisation de suites menées par d'autres !
Le Monde de Nemo sort dans un climat de guerre froide entre les deux partenaires qui n'est rien à comparer avec celui qui domine lors de la présentation des (Les) Indestructibles.
Dès 2004, les deux studios tentent de trouver un nouvel accord pour poursuivre leur partenariat que tout le monde loue pour être une machine à fabriquer des pépites artistiques et commerciales. Pixar entend redéfinir sa place face à l'ogre Disney : il souhaite désormais financer seul ses productions (il a un trésor de guerre pour cela !) et voir son allié de toujours confiner au simple rôle de distributeur, rétribué en tant que tel, perdant au passage tout droit sur les œuvres, leurs personnages ou leurs destinées... Disney refuse tout de go le strapontin qui lui est proposé. Pixar se braque. Le divorce est consommé, les deux tourtereaux annoncent à la mi-2004 l'échec de leurs négociations ; Pixar se mettant alors en quête d'un nouveau partenaire. Steve Jobs et Michael Eisner ne se prennent même plus au téléphone : la rupture semble irrémédiable. En coulisse, les manœuvres continuent pourtant. Le patron d'Apple, toujours aux manettes, annonce qu'il souhaite désormais voir les longs-métrages Pixar sortir en été, une saison qu'il juge plus profitable. C'est la plus grosse période pour le box-office américain et une sortie en juillet-aout permet une vente en vidéo, idéale, à Noël ! Cars - Quatre Roues, le dernier film de l'accord avec Disney, est le premier à se voir appliquer ce nouveau calendrier. Il est ainsi décalé à juin 2006, un recul qui est autant un gain de temps précieux. Car il s'agit pour le patron pixarien de jouer la montre : Hollywood bruisse, en effet, de rumeurs. Michael Eisner ne serait plus en odeur de sainteté à la tête de la Walt Disney Company…

Parallèlement, Disney fait mine d'organiser la riposte et de reprendre la main. Le 16 juin 2005, la compagnie annonce ainsi l'ouverture d'un nouveau studio d'animation : Circle 7 Animation. Situé à Glendale, dans d'anciens locaux d'ABC, à proximité de DreamWorks Animation et de Walt Disney Imagineering, il se destine à produire uniquement des suites des films Pixar comme Toy Story, Monstres & Cie et Le Monde de Nemo. Toy Story 3 et Monstres & Cie 2 sont donc rapidement mis en chantier. Durant l'été, est même présenté le pitch de Toy Story 3. Il consiste à voir Buzz rappelé dans son usine de Taiwan pour y être révisé suite à un vice de fabrication ; Woody et ses amis partant alors à sa rescousse… Le constat est affligeant tant l'imagination semble absente : il ne s'agit là, en effet, rien de plus qu'un Toy Story 2 « inversé » !
Circle 7 Animation était-il une vraie structure ou un simple coup de bluff destiné à démontrer la capacité de Disney à se passer de Pixar ? Les animateurs recrutés jurent que le studio était bien réel et parfaitement viable. Les analystes du secteur en sont eux moins convaincus... La question ne sera jamais tranchée, car Roy Disney gronde en coulisse. Il sort du bois à la première occasion et mène intensivement une action de lobbying dénommée "Save Disney". Il déstabilise ainsi la Direction de l'époque et contraint, en 2005, Michael Eisner à précipiter son départ en obtenant un vote de défiance lors de l'Assemblée Générale des Actionnaires de la firme toute entière. Bob Iger, alors numéro 2, le remplace en qualité de PDG. Sa première décision consiste bien vite à renouer avec Pixar dont il organise le rachat dès 2006. Il place également John Lasseter à la tête de la division Animation de la nouvelle entité Disney-Pixar. Circle 7 Animation est fermé dans la foulée et tous ses projets stoppés. Pixar entend, en effet, revenir seul aux commandes des éventuelles suites de ses films ! Il n'y a toutefois pas long à attendre pour voir Lee Unkrich prendre la tête du projet Toy Story 3

Diplômé de l'école de cinéma de l' USC (University of Southern California) en 1991, Lee Unkrich entame sa carrière dans le cinéma et la télévision en prises de vue réelles, travaillant notamment sur la série Les Dessous de Palm Beach. Arrivé en 1994 chez Pixar, il devient monteur sur Toy Story en 1995, puis sur 1001 Pattes en 1998, pour lequel il assure également certaines voix additionnelles.
Co-réalisateur, monteur et à nouveau voix additionnelles sur Toy Story 2 en 1999, Lee Unkrich co-signe Monstres & Cie en 2001. Deux ans plus tard, il co-réalise avec Andrew Stanton, Le Monde de Nemo, certifié plus grand succès de l'histoire de l'animation quelques semaines seulement après sa sortie. L'année 2010 représente un tournant important dans sa carrière, puisqu'il est nommé, seul, à la tête de la réalisation de Toy Story 3, le troisième volet des aventures des célèbres jouets animés.

Woody et ses amis revenus dans le giron de Pixar, tous ceux qui étaient à l'origine de leurs deux premières aventures (John Lasseter, Andrew Stanton, Pete Docter...) se réunissent afin de trouver la meilleure façon d'aborder la suite. Il est, en effet, impératif pour Lee Unkrich que le film soit à la hauteur de ses prédécesseurs. Il a pour doux rêve de faire aussi bien que Le Seigneur des Anneaux : Le Retour du Roi, un épisode meilleur que son opus de référence ! Il y emprunte d'ailleurs la dynamique de son projet : il s'agit désormais, pour lui, de réaliser la troisième partie d'une seule et même histoire. Et c'est ce qu'il va s'employer à faire : Toy Story 3 sera partie prenante de la saga Toy Story tout entière. Le troisième volet doit clore en beauté l'histoire.
Dans cet esprit, les onze ans qui séparent l'opus 2 et 3 sont utilisés comme un atout. La vie s'est écoulée ! Les humains comme les jouets ne sont donc plus tout à fait les mêmes. Le temps est passé par là et avec lui l'enfance. Tout le monde est désormais à la croisée des chemins. La question reste de savoir lequel emprunter ? Le film est ainsi d'une richesse émotive incroyable, bien plus sans doute que l'histoire d'amour de WALL•E ou le défilement de la vie de Carl Fredricksen dans Là-Haut. Le spectateur s'étonne même, au plus fort de l'émotion, à essuyer quelques larmes pour ces jouets qui, somme toute, l'ont accompagné toutes ces années. L'amour est omniprésent dans Toy Story 3 ! Pourtant, le film ne se réduit pas à ce seul registre. Il explore bien d'autres genres. Le scénario, de facture classique, est, en effet, construit comme du papier millimétré. Il allie action, humour et suspense de façon magistrale. Le spectateur est happé par l'histoire et ne décroche jamais. Le récit est foisonnant d'idées, à grands coups de plans malicieux et de clins d'œil savoureux. Le Buzz espagnol entraine ainsi l'hilarité, l'apparition du personnage de Totoro d'Hayao Miyazaki le respect, le plan d'évasion l'anxiété, etc… Tout dans Toy Story 3 est utile à l'action et fonctionne à merveille.

La plus grande idée des créateurs a sans doute été de trouver l'environnement idéal pour faire évoluer la joyeuse troupe. Il se devait d'être crédible et cohérent, notamment par rapport aux premiers opus qui ont chacun leur domaine attitré. En outre, il s'agissait également d'acter le bon technologique extraordinaire, réalisé dans le secteur de l'animation 3D depuis onze voire quinze ans. Après tout, Toy Story n'est-il pas le premier film d'animation 3D ? Pionnier de son genre, il a évidemment vieilli, moins d'ailleurs au niveau des personnages jouets que des décors, des humains et des éclairages. Toy Story 3 s'approprie le grand âge de son film de référence et de sa suite. Il en conserve indéniablement le charme et le souci de cohérence, et fait évoluer le reste de façon imperceptible. Le plus bel effort est assurément celui réalisé sur les personnages humains. Ils sont tout bonnement incroyables. Andy n'a plus rien à voir avec le jeune garçon un peu pantin du premier film. Ici, il est un adolescent totalement crédible et parfaitement animé.
Les décors connaissent le même sort que les humains. Splendides, ils jouissent d'un rendu incroyable : la crèche de Sunnyside atteint en particulier le sommet du réalisme et de la minutie dans les détails. Elle semble tout simplement réelle.
Techniquement irréprochable, Toy Story 3 déballe de véritables morceaux de bravoures : l'introduction est par exemple à couper le souffle tout comme les trente dernières minutes sont d'une rare intensité. Filmé en 3-dimensions, le long-métrage captive littéralement ses spectateurs avec des scènes qui délivrent des images d'une qualité exceptionnelle, notamment en profondeur de champ, sans jamais tomber dans les affres de la 3-dimensions intempestive. D'ailleurs, le récit comme la réalisation sont tellement prenants que le port des lunettes spéciales s'en trouve le plus souvent oublié !

Si Toy Story 3 affiche une belle ambition technique et scénaristique, la bande-son se contente, en revanche, de faire de la figuration. Côté musique, Randy Newman revient, en effet, à la partition, sans volonté de renouveau. La bande originale demeure ainsi efficace mais contrairement aux atouts intrinsèques de l'opus oublie toutes notions de nouveautés. Quelques extraits de chansons dépourvues de réelles convictions agrémentent donc, de ci de là, le long-métrage, sans jamais disposer de temps pour s'imposer. Il n'y a donc aucun moment chanté comme cela a été le cas pour Toy Story avec le retour à la réalité de Buzz ou Toy Story 2 avec la chanson de Jessie. Tout juste, Toy Story 3 offre-t-il une nouvelle fenêtre de diffusion (en deux langues !) à Je Suis ton Meilleur Ami. ; la nouveauté We Belong Together restant elle confinée au générique de fin…

Bénéficiant à plein du progrès technique et de la volonté de ses auteurs à respecter l'identité de la saga toute entière, Toy Story 3 met un point d'honneur à bichonner son plus fort atout : sa galerie de personnages.
Tous les vedettes mythiques sont là ou presque. Elles n'ont pas pris une ride et conservent toutes leurs identités propres. Woody, Jessie, Mr & Mme Patate, Zig Zag, Bayonne, Rex, Pile Poil... sont ainsi de retour, plus en forme que jamais. Sans oublier bien évidemment Buzz qui livre, comme à son habitude, un florilège de postures plus drôles les unes que les autres : il redevient par exemple, un temps, le ranger-militaro spatial du premier opus ou va jusqu'à s'abandonner dans une inédite version hispanophone…
A côté de la bande habituelle, apparait une ribambelle de nouveaux copains. Difficile de tous les citer tellement ils sont nombreux. Cinq retiennent pourtant l'attention. Apparue en caméo dans Toy Story 2, Barbie devient un personnage à part entière dans Toy Story 3. Intégrant la troupe de Woody, elle amène la touche de fraicheur et de « blonditude » qui manquait. Parfaitement doublée en français par une Frédérique Bel très en forme, elle réserve aux spectateurs moqueurs bien des surprises…
A côté d'elle - et pour cause – se trouve celui qui refuse d'être catalogué comme son simple accessoire (et encore moins comme un jouet de fille !) : Ken. Il est l'autre révélation du film ! Bogosse, superficiel et pas aussi sûr de lui qu'il le prétend, il crève littéralement l'écran. Dandy à souhait, fashion victime au sens propre comme au sens figuré, faux macho, il est tellement bourré de complexes qu'il en est irrésistible. Benoît Magimel s'en donne d'ailleurs à cœur joie quand il s'agit de lui offrir une voix faussement sophistiquée...
Lotso est le vieil ours en peluche qui dirige les jouets de la crèche de Sunnyside. Tout doux avec son odeur de fraise, il dispose des atouts idéaux pour faire fondre les spectateurs de tendresse... C'est également le cas de deux autres jouets, mais pour d'autres raisons, bien plus légères. Labrosse est ainsi un adorable petit hérisson qui s'imagine tout le temps être un grand comédien devant l'Eternel tandis que Bouton d'or est elle une magnifique petite licorne toute blanche, au pelage tout doux qui arbore une voix grave et un accent marseillais…

Toy Story 3 est une excellente surprise tant il clôt, de la plus belle des manières, la saga éponyme, sans rien renier de son passé. Réussi de bout en bout, le film démontre, en effet, la capacité de Pixar de se renouveler même dans l'exercice périlleux que constitue l'élaboration d'une suite. Oubliées les craintes de la supposée première panne d'originalité créative des équipes du studio de Luxo Junior : à force d'intelligence dans le propos, de comique subtil et foncièrement efficace, d'action palpitante et haletante, d'émotion à fleur de peau et de personnages toujours terriblement attachants, Toy Story 3 est le résumé parfait du savoir-faire Pixar ! Une véritable pépite.

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