Henry Blaise
Date de création :
Le 15 août 1946
Nom Original :
Henry Coy
Créateur(s) :
Milt Kahl
Apparition :
Cinéma
Télévision

Le portrait

rédigé par
Publié le 18 juin 2024

Le 15 août 1946, les studios Disney offrent au public un nouveau concert animé, La Boîte à Musique. Présenté comme une « Fantaisie musicale en dix actes », il rassemble dix séquences indépendantes, à commercer par la première d’entre elles, (Les) Martin et les Blaise, qui raconte l’amour compliqué entre Grace Martin et Henry Blaise.

Le récit prend place au cœur des montagnes du Midwest américain. Bâties chacune au sommet d’un promontoire rocheux, deux maisons se font face. La première appartient à la famille des Martin. La seconde, quant à elle, est la propriété des Blaise. Bien que voisins, les deux clans se livrent depuis des décennies une lutte sans merci depuis que le vieux Blaise a volé les œufs des Martin. Chaque jour, les tirs de Winchester traversent ainsi la vallée, tant et si bien que les deux familles se retrouvent bientôt presque totalement décimées…

Seul survivant de la famille des Blaise, Henry est le dernier de son clan à poursuivre la vendetta. Armé de son fusil, il arpente ainsi la forêt pieds nus à la recherche de Grace, la dernière des Martin. D’ores et déjà prêt à en découdre, le bellâtre aperçoit bientôt la jeune femme. Sur le point de tirer, il est cependant coupé dans son élan par la simple vue de la silhouette avantageuse de cette dernière. Abandonnant son arme, Henry est submergé par l’amour. Flottant littéralement dans les airs, il part immédiatement se coucher aux pieds de Grace qui, à son tour, tombe sous son charme.

Les fusils sont dès lors déposés. Henry prend même le soin de nouer les canons. À présents, les deux amants roucoulent dans la nature sous le regard de leurs ancêtres qui, du haut du ciel, ne cachent pas leur écœurement. Bientôt, arrive le jour du mariage. Dans la grande salle de l’école, la fête bat son plein et tout le monde danse avec panache. Henry et Grace sont eux-mêmes happés par l’ambiance. Se trémoussant sans retenue, il est déjà bien tard lorsque le couple rentre à la maison à bord du vieux tacot d’Henry que Grace se charge elle-même de démarrer en actionnant la manivelle.

L’amour naissant a néanmoins rapidement du plomb dans l’aile et les vieux démons familiaux ne tardent pas à ressurgir. Les querelles de ménage sont en effet légion entre Henry et Grace qui se disputent à longueur de journée. Les coups de poing pleuvent de toute part. Si Henry semble au premier abord plus costaud, Grace n'est pas en reste. Il n’est dès lors pas rare que le héros se fasse éjecter manu militari de la maison par sa femme, pour la plus grande joie des ancêtres qui, hilares, observent de leur nuage la rivalité entre les Martin et les Blaise reprendre de plus belle !

La Conception du personnage

Réalisée par Jack Kinney, le court-métrage des (Les) Martin et les Blaise s’inspire d’une histoire du Far West bien connue aux États-Unis. Surnommée The Hatfield-McCoy Feud – ou la Querelle des Hatfield et des McCoy – celle-ci débute en 1863 sur les rives de la Tug Fork, la rivière qui sépare la Virginie-Occidentale (à l’est) du Kentucky (à l’ouest). Vivant sur la rive Est, les Hatfield sont patronnés par le patriarche de la famille, William Anderson « Devil Anse » Hatfield. Établis pour leur part côté Kentucky, les McCoy sont dirigés par Randolph « Ole Ran’l » McCoy. Si les deux clans voisins ont jusqu’à présent toujours vécu dans un calme relatif, la Guerre de Sécession va rapidement créer une dissension. Les Hatfield choisissent en effet de rejoindre les rangs de l’Armée confédérée comme la majorité des McCoy, à l’exception notable d’Asa McCoy qui, de son côté, décide de soutenir les forces de l’Union au sein du 45e Régiment d’Infanterie du Kentucky.


La Famille Hatfield en 1897

À la fin du conflit, ce dernier est retrouvé mort. William Hatfield est rapidement soupçonné du meurtre. Bien qu’aucune preuve ne soit trouvée, une faide commence bientôt entre les deux familles, laquelle est encore renforcée par les jalousies et les non-dits du passé. Tout devient dès lors prétexte à s’affronter. En 1878, un accrochage concerne notamment la propriété d’un porc. L’affaire est portée devant les tribunaux qui tranchent en faveur de Floyd Hatfield. Quelques mois plus tard, Bill Staton, qui avait témoigné en faveur des Hatfield, est assassiné par Sam et Paris McCoy. La querelle continue encore et toujours de grossir lorsque Roseanna McCoy tombe amoureuse de Johnse Hatfield. Ce dernier est alors arrêté par les McCoy qui tentent de le discréditer en l’accusant de contrebande. William Hatfield organise rapidement l’assaut pour obtenir sa libération. Après avoir délaissé Roseanna, Johnse Hatfield épousera finalement la cousine de cette dernière, Nancy. En 1882, Ellison Hatfield est à son tour tué par Tolbert, Phamer et Bud McCoy, eux aussi assassinés en représailles…


La Famille McCoy

La vendetta atteint son apogée durant la soirée du Nouvel An 1888. Les Hatfield attaquent la maison des McCoy. Réveillés, ces derniers répliquent. Calvin et Alifair McCoy, mais aussi Sarah, la femme de Randolph McCoy, sont tués. D’autres victimes sont à déplorer jusqu’en 1891. Les procès se multiplient jusqu’en 1901. Les gouverneurs des États de Virginie-Occidentale et du Kentucky sont même prêts à la guerre si la situation venait à s’envenimer davantage encore… La Cour Suprême des États-Unis est elle-même impliquée. Les condamnations pleuvent. Johnse Hatfield est le dernier à être condamné à la prison à vie pour son implication dans le Massacre de la Nouvelle Année.

Les Lois de l'Hospitalité (1923)
A Feud Was Here (1938)

Défrayant la chronique à la fin du XIXe siècle, la Querelle des Hatfield et des McCoy est restée dans les mémoires aux États-Unis. Le lieu de l’affrontement est devenu un haut-lieu touristique. Chaque année, un festival est organisé en présence des descendants des deux familles. Hollywood n’a évidemment pas perdu de temps pour s’emparer de l’histoire. Dès 1923, Buster Keaton et John G. Blystone réalisent Les Lois de l’Hospitalité. Quinze ans plus tard, Tex Avery dirige A Feud Was Here, un court-métrage de la série des Merrie Melodies mettant en scène la dispute entre les Weaver et les McCoy. Walter Lantz lui emboîte le pas en 1943 avec Pass the Biscuits Mirandy!, un film de propagande produit dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale et dans lequel est montrée la dispute entre les Foy et les Barton. En 1951, Abbott et Costello tiennent le haut de l’affiche de la comédie burlesque Deux Nigauds Chez les Barbus. De l’autre côté de l’Atlantique, Morris s’inspire lui-même de l’affaire pour créer Les Rivaux de Painful Gulch, le 33e album des aventures de Lucky Luke paru en 1962. En 2012, The History Channel bat des records d’audience grâce à la minisérie à succès Hatfields & McCoys avec Kevin Costner et Bill Paxton.

Pass the Biscuits Mirandy! (1943)
Hatfields & McCoys (2012)

L’histoire des Hatfield et des McCoy est également reprise en 1936 par Ted Weems et Al Cameron qui l’adaptent sous la forme d’une chanson intitulée The Martins and the Coys. Publiée par Irving Berlin, elle sert de bande originale au court-métrage produit par les studios Disney. Le compositeur Oliver Wallace s’occupe d’arranger le titre interprété pour l’occasion par le groupe des King’s Men. Poussant la caricature à son paroxysme, le cartoon devient rapidement un classique de la comédie plusieurs fois diffusé à la télévision dans les émissions hebdomadaires de Walt Disney, notamment dans l’épisode Four Fabulous Characters programmé le 18 septembre 1957. Plébiscité pour son humour loufoque et irrévérencieux, il subit toutefois le couperet de la censure à la fin des années 1990. Montrant un usage déraisonnable des armes à feu, les studios décident en effet de le retirer du montage final de La Boîte à Musique au moment où le film est proposé en DVD en 2000. Henry Blaise, Grace Martin et leurs acolytes tombent dès lors dans l’oubli.

Dans le court-métrage de Disney, Henry Martin apparaît sous les traits d’un jeune homme à la carrure imposante. Doté d’une mâchoire très prononcée et d’une chevelure blonde hirsute, il est vêtu d’une chemise rouge et d’un pantalon marron qu’il porte durant tout le film. Au départ montré pieds nus, il gagne une paire de chaussettes blanches et des souliers au moment de son mariage. Une paire de bretelles complète le costume.

Milt Kahl
Dessin d'animation de Milt Kahl

Poussant la caricature à son paroxysme, l’animation d’Henry Blaise est notamment réalisée par Milt Kahl. Membre du groupe très fermé des Neuf Vieux Messieurs, l’artiste naît le 22 mars 1909 à San Francisco, en Californie. Débutant sa carrière modestement à l’âge de seize ans lorsqu’il est embauché comme dessinateur pour le journal The Oakland Post Inquirer puis pour le San Francisco Bulletin, il devient bientôt dessinateur d’affiches de cinéma. Il entre ensuite chez Disney en 1934. Se distinguant grâce à son caractère bien trempé de ses collègues qui redoutent ses colères mémorables, Kahl travaille comme intervalliste sur plusieurs cartoons de Mickey. Son talent lui permet rapidement de devenir animateur puis superviseur de l’animation.


Dessins d'animation de Milt Kahl

Très doué pour l’animation des humains, il collabore alors à presque tous les longs-métrages animés de Disney et donne vie à des personnages aussi fameux que Pinocchio, dont il définit l’apparence finale, Bambi, Brom Bones, Frère Lapin, Johnny Pépin de Pomme, Cendrillon, le prince Philippe et le roi Hubert, Roger Radcliff et Pongo, Merlin l’enchanteur ou bien encore Tigrou. Derrière l’animation remarquable de Shere Khan et de Madame Médusa, son ultime méchante, Milt Kahl est élevé au rang de Disney Legend en 1989, deux ans après sa mort survenue le 19 avril 1987 à l’âge de soixante-dix-huit ans.

Protagoniste typique des comédies animées des années 1940, Henry Blaise n’en reste pas moins un héros anecdotique et méconnu au cœur d’un court-métrage qui, censure oblige, est tombé dans l’oubli…

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