Percy Jackson
Le Sort du Titan

Titre original :
Percy Jackson and the Olympians : The Titan's Curse
Éditeur :
Albin Michel (Collection Wiz)
Date de publication France :
Le 06 mai 2008
Collection :
Percy Jackson
Auteur(s) :
Rick Riordan
Autre(s) Date(s) de Publication :
Miramax Books (US) : Le 1er mai 2007
Nombre de pages :
320

Le synopsis

Percy Jackson n'attend qu'une chose, retourner à la Colonie des Sang-Mêlé. Mais alors que l'école se termine et que le temps est venu, sa mère lui annonce qu'un danger rôde et qu'il ne peut pas y retourner. Percy, dont les nuits étaient agitées de cauchemars concernant Grover, s'embarque sans hésitation à l'assaut des monstres pour secourir sa nouvelle famille...

La critique

rédigée par
Publiée le 02 février 2024

Le second tome de la série littéraire de Rick Riordan se terminait avec Percy Jackson, son héros éponyme, découvrant Thalia, fille de Zeus, jusqu'ici présumée morte à la Colonie des Sang-Mêlé. Dans Percy Jackson : Le Sort du Titan, son arrivée inquiète donc Annabeth, Percy, Chiron et Grover, lesquels sont au courant d'une prophétie selon laquelle l'un des descendants des trois roi-dieux, Zeus, Poséidon et Hadès, sauverait l'Ère des Dieux ou au contraire la détruirait. Les soupçons se portaient jusqu'alors sur Percy, mais à présent que la fille de Zeus au charisme redoutable est de retour, plus rien n'est sûr et la menace de Cronos, que Luke cherche à ressusciter, gronde.

Rick Riordan est l'un des auteurs de fantasy jeunesse et jeunes adultes les plus connus du monde occidental, ayant créé l'univers de Percy Jackson traduit dans quarante-deux langues et inspiré de la mythologie grecque. Son premier roman s'intitule pourtant Big Red Tequila et appartient à une autre série du genre policier nommée Tres Navarre. Au-delà de l'univers mythologique auquel l'immense majorité de ses romans appartiennent, il a coécrit la série The 39 Clues publiée chez Scholastic entre 2008 et 2016.

À l'image du précédent tome, l'auteur parsème le roman de références (tels le groupe Green Day ou les cartes à échanger) et insère son univers dans un calendrier annuel occidental contemporain ; ainsi, le récit débute durant les vacances de Noël. Il rompt par là même avec la temporalité habituelle en situant l'action pendant la période festive de l'hiver et non pas en été, ce qui se prête à l'humour caractéristique de l'auteur : « Le vendredi d'avant les vacances de Noël, maman m'a mis quelques affaires et quelques armes meurtrières dans un sac de voyage [...] ». La mère de Percy en profite ensuite pour raconter des histoires d'enfance embarrassantes à Annabeth et Thalia, et le récit commence avec une ébauche de quête, car Grover est en détresse. Le satyre est, en effet, parti en mission pour le dieu Pan et semble avoir disparu.

De nouveaux personnages-clés aux noms évocateurs font leur apparition : Bianca et Nico Di Angelo. La Colonie accueille perpétuellement de nouveaux demi-dieux, ce qui est évidemment une excellente occasion pour introduire de nouveaux héros. Le plus jeune de la fratrie, Nico, apporte une touche de fraîcheur par son grand enthousiasme et ses références contemporaines, évoquant les monstres comme dans un jeu de cartes type Pokémon, récitant leur puissance d'attaque et leurs attaques spéciales. Tout de suite, il est établi que les Di Angelo se protègent bec et ongles, et la première quête introduisant le récit consiste à aller les chercher. Puis tandis que les héros progressent, le lectorat découvre à travers les rêves de Percy - parant ainsi au problème du récit à la première personne et au point de vue unique - que Cronos et les monstres poursuivent leurs sombres desseins. Nico est un personnage avec lequel il est aisé de s'identifier, étant tout autant excité par ce nouveau monde que le seraient les lecteurs. Il permet de redécouvrir le monde des demi-dieux de façon légère avec sa figurine de Dionysos issue de son jeu Mythomagic.

L'auteur continue de développer son univers en introduisant des mythes grecs très connus, agrémentés d'éléments plus obscurs tels que les Drakaina de Scythie, le Sanglier d'Érymanthe ou Talos. Les Chasseresses d'Artémis, qui deviendront très importantes, font également leur apparition. Il s'agit dans l'ancienne tradition de jeunes filles vouant leur vie à une déesse spécifique, ici, en l'occurrence, en combattant pour elle. Mais d'ordinaire, il s'agissait surtout de jeunes filles ou de femmes mortelles destinées à devenir prêtresses ou oracles.
Au sujet de la représentation d'Artémis, le fait qu'elle soit dépeinte comme une jeune fille contraste peut-être un peu trop avec Apollon. Son frère jumeau est en effet représenté comme une divinité narcissique et sûre d'elle, roulant en Maserati : le stéréotype du jeune homme riche de la côte sud-américaine insupportable avec des dents blanches éblouissantes comme le soleil, dont il est d'ailleurs le dieu. Rick Riordan en profite pour étendre son univers en fournissant une explication mi-scientifique, mi-magique du soleil, afin que cela puisse correspondre avec le monde contemporain comme avec celui des dieux.

À travers Thalia émerge une thématique féministe du fait de sa forte personnalité et surtout de son intérêt pour les chasseresses qui « s'égarent » selon Artémis lorsqu'elles « commencent à s'intéresser aux garçons, [...] deviennent idiotes et obsédées par eux, [...] perdent leur confiance en elles, [...] s'oublient. » L'auteur établit ainsi un lien avec les Vestales, censées rester vierges, et les Amazones qui vivaient entre elles et faisaient vœu de célibat. Une chasseresse prénommée Zoé ressort du lot et devient un nouveau personnage à part entière qui représentera en quelque sorte les chasseresses dans leur ensemble. Par ailleurs, les héros passent pour une fois un temps considérable avec un dieu : Artémis. La fille de Zeus, quant à elle, gagne en importance de par ses connaissances et son agilité au combat. Même si le récit est à la première personne et uniquement du point de vue de Percy, Thalia semble parfois devenir le héros principal, ce qui est assez original et rappelle par exemple Le Cycle de Pendragon de Stephen Lawhead (Harper Voyager (US), 1987-1999 ; Le Livre de Poche (France), 2002-2007) qui, même en se focalisant sur différents personnages, établit clairement qu'Arthur est le héros. Une autre thématique évoquée par l'auteur est celle de la cause animale. Dans le cas du Lion de Némée tué par Héraclès lors de ses douze travaux, le lion n'est ici pas écorché par le demi-dieu une fois vaincu ; son corps disparaît et sa peau reste sur les lieux comme tribut. Concernant l'ophiotauros Bessie, sauvé par les héros, Grover insiste pour que les mots « sacrifice » et « entrailles » ne soient pas prononcés devant elle.

Les autres pensionnaires de la colonie font de brèves apparitions lorsque les héros sont au camp et contribuent eux aussi à l'histoire par des petits commentaires ou événements. Ils n'ont pas de rôles-clés mais font partie du décor et sont destinés à mettre en scène la vie de la colonie et des différents bungalows dédiés aux divinités. Clarisse et Tyson sont ainsi moins présents dans cette histoire, mais ils ne disparaissent pas pour autant. Rick Riordan parvient à faire intervenir tous ces personnages dans sa série en articulant leurs apparitions avec habileté. Il accomplit également le fantasme de beaucoup de lecteurs, faisant écho à la série culte Buffy Contre les Vampires (The WB et UPN, 1991-2003) dans laquelle les autorités scolaires peuvent parfois être en réalité des créatures mythiques.

La temporalité de Rick Riordan peut enfin paraître étrange, puisqu'il définit que les dieux ont environ quatre mille ans, et ce alors que l'ancienne religion grecque implique cinq âges distincts : l'âge d'or, l'âge d'argent, l'âge d'airain et l'âge des héros, avant l'époque actuelle qui est l'âge de fer, et cela sans même compter l'immortalité des dieux. Ces derniers ont une vie avant la création de l'Homme : il y a eu l'âge des Titans, puis la naissance du monde par Gaïa et Ouranos, suggérant avec eux la création de l'espace-temps. Et finalement, la nature primordiale des dieux fait que, par essence, leur existence ne peut pas correspondre à la naissance de la civilisation grecque : ils la précèdent. C'est bien évidemment un choix de la part de Rick Riordan qui au fond interprète les mythes grecs et les modernise ; cela ne pose pas de problème en soit, mais cette chronologie a tout de même de quoi étonner. Le contexte géographique de l'histoire est bien entendu lui aussi un choix très typique des artistes américains, mais qui a dû être nécessaire pour séduire son public originel ; il fait ainsi émigrer les dieux grecs, romains et vikings vers les États-Unis.

Percy Jackson : Le Sort du Titan offre une suite pleine de rebondissements qui donne envie de continuer la saga et développe à merveille les personnages bien connus des lecteurs, tout en introduisant de nouveaux héros attachants. Rick Riordan contente donc ses lecteurs haut la main avec ce nouveau chapitre dans l'histoire de Percy Jackson !

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