Percy Jackson
La Bataille du Labyrinthe

Titre original :
Percy Jackson and the Olympians : The Battle of the Labyrinth
Éditeur :
Albin Michel (Collection Wiz)
Date de publication France :
Le 03 février 2010
Collection :
Percy Jackson
Auteur(s) :
Rick Riordan
Autre(s) Date(s) de Publication :
Hyperion Books for Children (US) : Le 6 mai 2008
Nombre de pages :
384

Le synopsis

L'armée de Cronos s'apprête à mener l'assaut en empruntant le Labyrinthe de Dédale, mettant ainsi la Colonie des Sang-Mêlé en danger. Il tient à Percy Jackson et à ses amis de leur venir en aide et de contrecarrer l'avancée du roi des Titans...

La critique

rédigée par
Publiée le 01 mars 2024

Le précédent tome de la série écrite par Rick Riordan se terminait sur une grande révélation, celle du lien de parenté entre Nico Di Angelo et un certain dieu, tout en laissant beaucoup de points d'interrogation au lecteur. Dans Percy Jackson : La Bataille du Labyrinthe, la découverte du père de Nico remet à nouveau en question l'issue de prophétie que les héros pensaient désigner soit Thalia, soit Percy, comme clef de voûte. Et puisque Bianca, la sœur de Nico, vient de mourir, sa colère en fait le candidat idéal pour être celui qui sauvera ou détruira l'Ère des Dieux : le mystère reste donc entier. Nico est d'ailleurs introuvable et ses amis ont décidé de garder le secret de sa parenté pour le protéger. Thalia a, quant à elle, rejoint les rangs des Chasseresses d'Artémis après avoir donné un premier et ultime baiser d'amitié à Percy, se retirant ainsi de son rôle éventuel dans la prophétie en tant que fille de l'un des trois seigneurs dieux. Elle se retire également de la liste des potentielles futures petites amies de Percy, même s'il en est d'autres à commencer par Annabeth qui semble être l'élue de son cœur. Le Titan Cronos, père de Zeus, continue de gagner en influence et agrandit ses rangs afin de remporter la guerre contre les dieux. De leur côté, les pensionnaires de la Colonie des Sang-Mêlé se préparent à une invasion de l'armée de Luke dans le courant de l'été.

Rick Riordan est l'un des auteurs de fantasy jeunesse et jeunes adultes les plus connus du monde occidental, ayant créé l'univers de Percy Jackson traduit dans quarante-deux langues et inspiré de la mythologie grecque. Son premier roman s'intitule pourtant Big Red Tequila et appartient à une autre série du genre policier nommée Tres Navarre. Au-delà de l'univers mythologique auquel l'immense majorité de ses romans appartiennent, il a coécrit la série The 39 Clues publiée chez Scholastic entre 2008 et 2016.

Comme tous les romans de la série, ce tome commence par une bataille présentée avec humour, ce qui dénote de la personnalité dynamique et optimiste du héros éponyme, ainsi que des combats réguliers qu'il doit mener. Le lecteur retrouve aussi, à l'aube des vacances scolaires, la mère de Percy dans le monde réel, laquelle fait d'ailleurs souvent une apparition en début de récit. Six mois se sont écoulés depuis le précédent volume et Percy découvre l'école du nouveau petit ami de sa mère, Paul, qu'il intégrera en classe de troisième.

Le personnage de Rachel Elizabeth Dare découvert auparavant prend ici toute son importance, allongeant ainsi la liste des personnages secondaires majeurs de la saga. Elle étudie dans la nouvelle école de Percy et a ce pouvoir particulier qui lui permet de voir au travers de la Brume et de repérer les créatures mythologiques. Ici, Rick Riordan continue de jouer avec l'imagination fertile de beaucoup de lecteurs : après le principal diabolique, ce sont des pom-pom girls qui sont des monstres déguisés et qui s'empressent de proférer les habituelles menaces à l'encontre des Sang-Mêlé et de la colonie. 

Clarisse et Grover sont de leur côté plus présents que dans le précédent tome et jouent un rôle prépondérant dans le déroulé des événements. Après avoir travaillé pour son père Poséidon, Tyson est de retour à la colonie. Le sort de Zoë et Bianca quant à elles fait écho à celui de Cedric Diggory dans la série Harry Potter de J.K. Rowling (Bloomsbury (UK) ,1997-2007 ; Gallimard Jeunesse (France), 1998-2007) ; ici, comme chez le jeune sorcier, les déboires encourus par les héros deviennent de plus en plus sérieux et dangereux. Cependant, même si des héros meurent, il n'en reste que les implications sont moins dramatiques, car l'histoire se déroule dans le monde des dieux, la vie après la mort y est garantie et il est même parfois possible de revoir les personnes décédées.

Rick Riordan continue d'introduire dans sa série des références à la mythologie grecque, et si le précédent ouvrage était focalisé sur les mythes d'Héraclès et de Persée se rendant au jardin des Hespérides, ici le titre est indicatif du plus célèbre des labyrinthes : celui de Dédale, père d'Icare, qui renfermera le Minotaure. Comme Héraclès, les héros devront aussi nettoyer des écuries sortant de l'ordinaire avant de rencontrer sur leur chemin des individus légendaires moins connus : les Empousai - les servantes d'Hécate, Campé la femme-dragon et Briaré l'Hécatonchires ou Être-aux-Cent-Mains. Il s'agit-là d'un ajout très original de Rick Riordan du fait que cette espèce mythologique n'est que très rarement évoquée par rapport aux Cyclopes par exemple ou aux Parques, en raison de leur nom complexe et de la difficulté à se les représenter. Mais puisqu'elles ont fait partie de la première guerre des Titans, il y a une certaine logique à les voir incluses, la trame de la série s'inspirant grandement de cette guerre. La seconde guerre des Titans que les héros doivent affronter résulte ensuite de la vengeance de Chronos et de ses consorts, enfermés au Tartare suite à leur défaite.

L'auteur introduit également de nouveaux dieux, comme Janus : « Dieu des Portes, des Débuts, des Fins, des Choix », un dieu plus mineur que ceux rencontrés dans la saga et qui n'était pas présent au Mont Olympe lors de la visite de Percy, Thalia et Annabeth. Consécutivement, le lectorat fait la rencontre d'Héra, la reine des dieux et pour laquelle Rick Riordan a décidé de mettre en avant son attribut de déesse de la maternité, lequel est plus rarement mis en lumière que celui de déesse du mariage ou de sa qualité de reine et femme de Zeus. Quelques années plus tard dans Ce Monde Qui Est le Mien de Jen Calonita (Disney•Hyperion (US) et Hachette Heroes (France), 2021) de la collection des Twisted Tales, il est plaisant de découvrir une Héra bienveillante, dans la droite lignée du long-métrage d'animation Hercule (1997). C'était elle qui initiait le point de départ du roman : la quête de Mégara pour devenir une déesse et rester avec Hercule au Mont Olympe.

De plus amples références au monde contemporain dans le livre font sourire : un conseiller conjugal pour Zeus et Héra, le jeu de pierre, feuille, ciseaux, une décoration avec un ruban bleu épinglé sur la poitrine indiquant que « ce monstre a été classé exemplaire » comme dans les concours animaliers et l'introduction de l'énigme de la Sphinge à la manière d'un jeu télévisé : « Bienvenue, joyeux participants ! » Ce dernier élément change d'ailleurs des interprétations habituelles beaucoup plus sombres des interactions avec le Sphinx, comme par exemple dans la sublime pièce de théâtre La Machine Infernale de Jean Cocteau (Grasset, 1932). De même, Héphaïstos travaillant sur une Corolla est très représentatif de l'interprétation des dieux de Rick Riordan qui les rend plus humains que les Hommes eux-mêmes. Ce choix d'interprétation fait d'ailleurs écho au roman American Gods de Neil Gaiman (William Morrow (UK), 2001 ; Au Diable Vauvert (France), 2002), dans lequel les dieux sont contemporanéisés, humanisés et dénués de réels pouvoirs. Dans la version de Rick Riordan, ils conservent cependant tout leur prestige et leur dignité ; l'auteur offre une continuité à leur existence dans le monde contemporain et non une dystopie dans laquelle ils sont en voie d'extinction comme chez Gaiman.

Le personnage de Nico Di Angelo est l'une des plus grandes réussites de Riordan. Le décès de sa sœur lui fait perdre son innocence, et d'un adolescent enfantin fan de cartes à échanger, il devient un demi-dieu vengeur aux pouvoirs impressionnants du fait de sa parenté. L'auteur introduit une dimension réellement tragique à l'histoire et dépourvue de légèreté qui a des ramifications profondes. Étant le fils du dieu des Enfers, il a potentiellement un accès direct à sa sœur décédée et à l'instar des grands héros de la mythologie grecque, pour paraphraser le philosophe Celse, il est peu de faits plus extraordinaires que d'aller aux Enfers pour secourir quelqu'un et d'en revenir, le plus célèbre étant le triste Orphée. Ainsi, d'une certaine façon, Nico Di Angelo devient le Sang-Mêlé le plus puissant de tous.

De temps à autre, l'humour devient noir via les pensées des chevaux aux dents acérées des écuries de Géryon, assorties d'insultes à l'encontre de Percy, ou encore de Dédale que l'auteur transforme en meurtrier aigri, détruit par la mort de son fils Icare. Le registre du personnage en comparaison avec les autres est bien plus adulte et il n'y a rien de léger dans ce qu'il vit et la manière dont cela est décrit. Ce genre de personnage amorce donc un glissement vers la suite qui verra les héros se confronter à Cronos.

L'auteur met aussi l'emphase sur la virginité des déesses Artémis, Athéna et Hestia qui fait écho à la manière dont les femmes étaient perçues dans la Grèce Antique. Si la position de la femme dans la Grèce Antique a évolué vers de plus en plus de droits et libertés à mesure que le temps a passé, ce n'était pas le cas à l'origine. Ceci est bien exposé dans la pièce de théâtre Médée d'Euripide (431 av. J.-C), dans laquelle la répudiation de Médée par Jason, le fait qu'elle soit une femme et considérée comme une « barbare », car elle n'est pas Athénienne, lui garantit à elle et ses enfants de se retrouver à la rue et de mourir de faim. C'est un personnage féminin intéressant, car c'est le seul criminel de la tragédie grecque qui vit une fin heureuse, entre autres car elle est la petite-fille du dieu Hélios ; en Grèce Antique et sans cette parenté, c'était une mort certaine qui l'attendait. Médée en l'occurrence est une princesse et une reine, mais c'est aussi une femme mariée et une mère. Dans l'Antiquité gréco-romaine, les femmes qui renonçaient à une vie maritale et empruntaient certains choix de vie, principalement des carrières de prêtresses, d'oracles et d'intellectuelles, étaient très respectées et avaient presque les mêmes droits que les hommes. Dans la littérature grecque d'ailleurs, les époques sont référencées par le nom de la prêtresse principale contemporaine et parmi les neuf lyriques grecs considérés comme les plus accomplis figure Sappho, et c'est d'ailleurs d'elle que viendraient les mots « saphisme» et « lesbienne », car elle-même était homosexuelle et habitait sur l'île de Lesbos. De même façon, les déesses vierges ont une aura particulière dans la mythologie grecque. Sortir du rôle imposé par la société semblait offrir aux femmes une liberté et un respect autrement inaccessible que les Chasseresses d'Artémis dans la série Percy Jackson arborent et perpétuent dans le monde contemporain.

Si le langage familier est très typique de Rick Riordan et qu'il fonctionne bien, dans le cas de certains personnages tels que Cronos, le Général, et même les dieux de manière globale, il aurait peut-être mieux valu se cantonner à un langage standard voire châtié, et ce afin de leur conférer un aspect solennel et de les rendre plus effrayants. À ce sujet, dans la version française, il est quelque peu décevant que le passé simple soit totalement omis, même dans des cas où l'utilisation du passé composé sonne faux. Le niveau de discours est d'ailleurs souvent bien plus haut dans les écrits originaux des romans jeune adultes que dans les traductions françaises.

Quatrième roman de la série, Percy Jackson : La Bataille du Labyrinthe continue d'étoffer l'univers du jeune demi-dieu et annonce avec brio l'affrontement final auquel les héros se préparent depuis longtemps. Les lecteurs apprécieront sans nul doute la suite des aventures de Percy et de ses amis et la direction prise par l'auteur dans ce nouveau roman !

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