Le Roi Arthur
L'affiche du film
Titre original :
King Arthur
Production :
Touchstone Pictures
Date de sortie USA :
Le 7 juillet 2004
Genre :
Aventure
Réalisation :
Antoine Fuqua
Musique :
Hans Zimmer
Durée :
126 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

En 467 après Jésus Christ, alors que les Romains, inquiets de la pression grandissante exercée par les barbares sur Rome, se retirent de l'île de Bretagne, le peuple britto-romain se retrouve seul à devoir se défendre des invasions saxonnes ravageuses. Une légion de Sarmates, menée par un chef britto-romain, Artorius Castus, décide de rester et de protéger ce peuple au nom de la Rome qu'ils ont connue et par la force de leur courage. Et si Artorius Castus n'était autre que la figure ayant inspirée le mythe du Roi Arthur ?

La critique

rédigée par
Publiée le 11 mars 2021

De Gildas à Geoffrey de Monmouth, en passant par Chrétien de Troyes et Thomas Mallory, la figure du Roi Arthur a su animer d'innombrables plumes et lui attribuer le statut universel à travers les âges du roi idéal par excellence, qui reviendra le jour où le peuple breton aura le plus besoin de lui, "le roi qui fut et qui sera".

C'est sur le tournage de son film Gladiator (2000), que le scénariste David Franzoni entend parler de la “théorie des Sarmates”, avançant qu'Arthur aurait pu être le chef militaire d'une légion de Sarmates postée par Rome au mur d’Hadrien sur l'île de Bretagne pour protéger le peuple des envahisseurs. Alors qu'il travaille sur le film de Ridley Scott (Alien, le Huitième Passager en 1979, À Armes Égales : G.I. Jane en 1997 et Seul sur Mars en 2015), l'envie le travaille et c'est lors de son voyage en Italie qu'il commence à écrire le scénario de ce qui deviendra Le Roi Arthur. Plus tard, il prend contact avec le futur producteur du film, Jerry Bruckheimer, et lui évoque son idée de scénario qui porterait sur les origines du Roi Arthur, sachant que personne ne sait réellement qui il était. Il s'agirait d'un film réaliste, dans lequel la magie ne viendrait pas en aide au roi légendaire. Le réalisateur, Antoine Fuqua, féru de mythologie, décrira le récit comme l'histoire d'un homme qui obtient le droit de devenir roi. De plus, l'opus se déroulerait au Ve siècle durant l’Âge sombre, époque à laquelle la fameuse "théorie Sarmate" se déroule, rompant ainsi d'avec le contexte arthurien habituel de la chevalerie médiévale.

Devenu l'un des plus grands producteurs indépendants d'Hollywood avec George Lucas dans les années 80, Jerry Bruckheimer travaille essentiellement avec Disney et Paramount, tandis que ses séries télévisées sont co-produites par Warner Bros. et CBS. Dans les années 70, il quitte le monde de la publicité et débute sa carrière au cinéma aux côtés de Dick Richards. Mais c'est avec le réalisateur Paul Schrader, en produisant les films American Gigolo (1980) et La Féline (1982), qu'il se fait remarquer. Il produit ensuite Flashdance (1983), Le Flic de Beverly Hills (1984) et Top Gun (1986). À partir des années 1990-2000, il se lance dans les productions à gros budget avec Armageddon (1998) et Pirates des Caraïbes : La Malédiction du Black Pearl (2003), qui lance la franchise éponyme. En 2000, il rencontre également un succès télévisuel avec Les Experts, qui donnera lieu à de nombreux spin-off.

C'est sur le tournage d'Esprits Rebelles (1995) que Jerry Bruckheimer découvre Antoine Fuqua. Ce dernier réalise alors la bande-annonce et le clip de la chanson du film de Coolio Gangsta’s Paradise, qui rencontre un franc succès, et pour lesquels il gagne le Young Generators Award et le Sinclair Tenebaum Olesiuk and Emanual Award. Impressionné par le jeune-homme, au fil des ans, Bruckheimer suit de près sa carrière et Fuqua dira du producteur, qu'il est connu pour encourager les jeunes talents. Antoine Fuqua est lui connu pour son travail dans la musique, ayant réalisé des clips pour Arrested Development, Usher, Toni Braxton, Stevie Wonder et Prince, entre autres, ainsi que des spots publicitaires. Il a également signé des long-métrages, tels que Training Day (2001), Les Larmes du Soleil (2003), Equalizer (2014) et Les Sept Mercenaires (2016).

Lorsqu’Antoine Fuqua reçoit le projet, il n'a qu'un nom en tête pour le rôle titre, c'est celui de Clive Owen qu'il avait rencontré et qui pour lui avait la présence, la puissance et la grâce du Roi Arthur - sans compter le mystère, qu'il considérait comme une caractéristique importante du personnage -. L'acteur n'avait pourtant fait que très peu d'équitation, alors qu'une grande partie des scènes devait se passer à cheval et nécessitait de pouvoir monter à la perfection, de se battre à cheval et surtout de faire la plupart des cascades soi-même. C'était également le cas de nombre des autres acteurs, qui parvinrent à faire tout ceci avec enthousiasme en un temps record, ce qui impressionna grandement le réalisateur. L'acteur britannique Clive Owen est connu pour ses films d’auteur, qui le firent accéder à sa renommée actuelle, tels que Croupier (1998), qui plut à la presse internationale, Closer, entre Adultes Consentants (2004), pièce à scandale de Patrick Marber qu'il avait interprétée sur scène en 1997, et Les Fils de l'Homme (2006). Puis, il enchaîne les grands rôles dans des films à plus large public, tels que Sin City (2005), Inside Man : L'Homme de l'Intérieur (2006), Elizabeth : L'Âge d'Or (2007), Hemingway & Gellhorn (2012) et The Knick (2014-2015).

David Franzoni souhaitait réinterpréter le personnage de Guenièvre en réécrivant son histoire et ses origines. Dans Le Roi Arthur, Guenièvre est une Picte, et dans sa culture, les droits hommes/femmes sont les mêmes, ce qui est souvent le commun des cultures celtes qui ont même eu davantage tendance à pencher vers une société matriarcale que patriarcale. Ainsi, Guenièvre est une guerrière au même titre que les hommes de sa tribu et son but est de former une alliance avec les Britto-Romains contre les Saxons. Le projet est d'ailleurs facilité par le fait qu’Artorius est proche de la culture bretonne de manière notoire sur l'île. Si la culture bretonne n'est pas la culture picte, il s'agit d'une culture autochtone et une opportunité pour les Pictes de s'allier contre l'envahisseur (tout ceci est faux d'un point de vue historique). Le spectateur assiste dès lors de manière très fluide à la transition entre la Guenièvre traditionnelle qu'il connaît, la demoiselle en détresse de l'amour courtois, et la nouvelle Guenièvre, car lorsqu'elle apparaît pour la première fois à l'écran, elle paraît frêle et en danger même s'il ne s'écoule que très peu de temps jusqu'à ce qu'elle révèle sa vraie nature. Keira Knightley collaborait déjà à cette époque avec Jerry Bruckheimer sur le tournage de la franchise Pirates des Caraïbes et il la voulait pour ce rôle. Antoine Fuqua dira d'elle qu'elle était une adolescente (dix-huit ans à l'époque) au fort caractère, qui se métamorphosait en femme dès que la caméra tournait. L'actrice commence à se faire connaître des producteurs en 1999 dans Star Wars : La Menace Fantôme, dans lequel elle joue la doublure d'Amidala. Par la suite, elle tourne dans Le Royaume des Voleurs (2001), Joue-La comme Beckham (2002), qui s'exporte à l'internationale suite au succès du premier volet de Pirates des Caraïbes, et Love Actually (2003). Elle accède ensuite au rang des actrices les plus recherchées et enchaîne les long-métrages : Orgueil et Préjugés (2005), Reviens-Moi (2007), The Duchess (2008), A Dangerous Method (2011), Anna Karénine (2012), New York Melody (2013), Colette (2018) et Casse-Noisette et les Quatre Royaumes (2018).

Le film compte également et entre autres, deux grands noms du cinéma scandinave que sont Mads Mikkelsen, dans le rôle de Tristan qui est ici accompagné d'un faucon et dépourvu d’Iseut, rompant ainsi d'avec la tradition, et Stellan Skarsgård, dans le rôle du chef des Saxons, Cerdic. L'acteur danois, Mads Mikkelsen, est l'une des plus grandes figures du cinéma de son pays d'origine, dont le talent a su convaincre le cinéma international. Depuis la moitié des années 90, il joue en effet dans la plupart des films danois à succès. C'est surtout avec Pusher (1996) qu'il s'est fait connaître, puis suivirent Lumières Dansantes (2000), Unit One (2000) et Shake it (2001). Il enchaîne ensuite les succès avec Casino Royal (2006), Quantum of Solace (2008), Coco Chanel et Igor Stravinsky (2009), La Chasse (2012), Royal Affair (2012), Hannibal (2013), Doctor Strange (2016) et Rogue One : A Star Wars Story (2016).

Stellan Skarsgård est un pilier du cinéma suédois et international depuis bien longtemps. Il a su s'imposer à Antoine Fuqua pour le rôle de Cerdic, de par sa carrure et sa personnalité imposante, son intelligence de jeu et la brutalité qu'il a su insuffler à son personnage. De son propre chef, il vint tous les jours sur les lieux de tournage afin de parfaire sa technique de combat et s'entraîner avec les autres acteurs et figurants. Sa création du personnage de Cerdic est passée par une étude très précise de son langage corporel et de ses gestes durant les combats, qui ne manqua pas d'impressionner ses collègues. C'est en 1968 que le comédien accède à la renommée alors qu'il n'est encore qu'un adolescent dans la série suédoise Bombi Bitt och Jag. Il intégre ensuite le Royal Dramatic Theatre de Stockholm, tout en jouant dans des long-métrages notables tels que Den Enfaldige Mördaren (1982), Pelle Svanslös i Amerikatt (1985) et Hip Hip Hurra! (1987). Il parvient à dépasser les frontières avec Breaking the Waves (1996), puis tourne dans Will Hunting (1997), Amistad (1997), Dancer in the Dark (2000), Dogville (2003), Pirates des Caraïbes : Le Secret du Coffre Maudit (2006), Pirates des Caraïbes : Jusqu'au Bout du Monde (2007), Anges et Démons (2009), Melancholia (2011), Thor (2011), Marvel's Avengers (2012), Thor : Le Monde des Ténèbres (2013), Cendrillon (2015), Avengers : L'Ère d'Ultron (2015) et Dune (2021).

Une composante importante du film Le Roi Arthur est sa musique, créée par nul autre que l'illustre Hans Zimmer. Le compositeur fut séduit par l'idée de traiter le personnage du Roi Arthur sans la magie et sans son aspect mythique, des données qu'il réintroduisit cependant par le biais de la musique. Selon ses dires : "dès que vous ajoutez la musique, les personnages deviennent mythologiques". Il fit interpréter sa partition par le Philharmonique de Londres, laquelle se composait d'un motif de trois notes, dont il parsema le film afin de donner un cadre structurant et fluide à l'histoire, ainsi qu’un thème pour la relation d'Artorius et Guenièvre, chanté par Moya Brennan. Pour ne citer que quelques uns de ses succès, Hans Zimmer est le compositeur de la musique de Rain Man (1988), son premier succès, Miss Daisy et son Chauffeur (1989), Le Roi Lion (1994), Gladiator (2000), Pearl Harbor (2001), Le Dernier Samurai (2003), Les Larmes du Soleil (2003), Batman Begins (2005), Inception (2010), Lone Ranger : Naissance d'un Héros (2013), Interstellar (2014), Dunkerque (2017), Le Roi Lion (2019) et Top Gun: Maverick (2021).

Le défi de l'équipe était de replacer le récit arthurien dans la période de l'Âge sombre qui pose une contrainte certaine, celle du manque d'informations la concernant - c'est ce qui lui a conféré son nom. Il est cependant notoire qu'au Ve siècle, les conditions de vie étaient bien différentes de la période médiévale et que le film n'aurait pas grand rapport avec les représentations habituelles de la légende - par exemple, il n'y avait pas de château à cette époque. Pour se figurer cette nouvelle version, il fallait donc imaginer un contexte de culture romaine, bretonne et saxonne en se basant sur les recherches archéologiques actuelles. Par ailleurs, s'il n'est fait mention que des Saxons dans le film, il faut savoir qu'à l'époque les Angles, les Jutes et les Frisons étaient tout aussi importants et que ceux-ci étaient installés sur l'île depuis déjà quelques temps. Avant leur départ, les Romains les avaient en effet embauchés comme mercenaires pour chasser les Pictes, qui leur donnaient du fil à retordre. Il est difficile de considérer de ce point de vue Le Roi Arthur comme un film historique du fait des nombreuses erreurs commises, cependant, d'une part et de toute façon, la "théorie des Sarmates" a été réfutée depuis, et d'autre part, il suffit de le considérer comme un film d'action qui se rapproche de ce qu'aurait pu être la vie du Roi Arthur selon les premières sources de la légende - Historia Brittonum (IXe siècle) et Annales Cambriae (Xe siècle) - pour y trouver un intérêt certain. L'une des dernières théories en date au sujet du Roi Arthur, qui à ce stade n'est vraiment qu'une hypothèse, serait qu'il n'aurait pas non plus vécu au Ve siècle et aurait déjà été à cette époque une figure mythique susceptible d'inspirer les écrivains. Selon cette idée, le Roi Arthur aurait vécu durant la Préhistoire (avant l'apparition des premiers écrits).

Pour parfaire la démarche réaliste du film, Antoine Fuqua décida de tourner en Irlande, appréciant le caractère sombre de sa lumière parcellaire et de son atmosphère. Bien avant son choix, une chose avait été certaine, il ne se voyait pas filmer sur le Roi Arthur ailleurs qu'en Europe. Ayant jeté son dévolu sur l'Irlande, il devait faire un choix concernant un lieu, qui de par son importance faisait office de personnage principal : le mur d'Hadrien. Ce dernier, érigé par les Romains, servait à défendre les Romains et Britto-Romains des invasions Pictes vivant au Nord. C'est d'ailleurs là que le film semble avoir commis une erreur certaine. Artorius et sa troupe défendent en effet le mur des invasions saxonnes, cependant en réalité, les Saxons ne se trouvaient pas au-delà du mur. Les Saxons et autres tribus venues du continent étaient en fait installés sur la côte est de l'île de Bretagne. La menace au Nord, c'était bel et bien les Pictes qui s'allient dans Le Roi Arthur avec Artorius et ses hommes. Si cet aspect de l'histoire est quelque peu étrange, l'intention d'Antoine Fuqua aura sans doute été de faire écho dans cette mise en scène de la bataille historique du mont Badon contre les Saxons à la "théorie des Sarmates", selon laquelle la légion d'Artorius aurait eu à protéger le Mur d'Hadrien des envahisseurs.
Du fait de l'importance du mur dans le film, Antoine Fuqua voulait absolument qu'il soit réel. Ainsi, les équipes se rendirent sur place au mur d'Hadrien pour le reproduire avec le plus d'exactitude possible et elles y passèrent pas moins de quatre mois et demi à raison de deux cent cinquante personnes. Une autre pièce maîtresse dans la construction des lieux de l'opus fut la table ronde autour de laquelle se réunissent Artorius et ses hommes. Afin de représenter au mieux cette époque et cet Arthur, son design fut grandement influencé par l'architecture romaine, tout en conservant l'aspect traditionnel.

Les acteurs louèrent Antoine Fuqua pour son écoute, car il se montrait toujours intéressé par leurs idées concernant leurs rôles. Cela a permis à chacun de s'approprier son personnage et de le rendre le plus authentique possible, ainsi, aucun des personnages ne se ressemble et tous sont très bien définis, que ce soit en termes de personnalité ou de technique de combat. Il est aisé de se souvenir de la technique d'Artorius avec son imposante épée Excalibur, de l'arc et de la technique maîtrisée de Tristan au combat rapproché, de la technique ambidextre de Lancelot avec ses deux épées, et du combat à l'arc, mais également au corps à corps, de Guenièvre, affichant une nette distinction entre les méthodes pictes et celles des Romains. Le réalisme voulu, allant de paire avec la démarche de David Franzoni de faire un film sur les origines potentielles du Roi Arthur, présente ainsi les "chevaliers" de la table ronde sous un jour nouveau.

Bien sûr, d'ores et déjà, ce ne sont pas des chevaliers étant donné que l'histoire se déroule au Ve siècle et que la chevalerie, et les qualités de noblesse qui lui sont attribuées, est une invention du XIIe siècle. Pour cette nouvelle histoire, David Franzoni compare les chevaliers de la table ronde à un groupe de motards, qui n'ont rien de propre, de noble ou de chaste, à l'exception peut-être d'Artorius, qui conserve une personnalité proche du Roi Arthur traditionnel et dont les qualités lui permettent d'acquérir le statut de roi. Ce parti pris, David Franzoni l'a choisi car il voulait montrer la réalité de la fameuse Bataille du mont Badon dans laquelle les tribus barbares du continent ont été vaincues (de manière temporaire). Si elle est souvent évoquée comme un moment de gloire qui s'apparente au sacré, selon ses dires "c'était sanglant, sale et horrible". À l'origine, Le Roi Arthur aurait dû davantage rendre compte de cet état de fait, cependant, au lieu de sortir le film avec une classification "R", Disney préféra toucher un plus grand public et choisit un "PG-13". Ainsi, les scènes de bataille les plus sanglantes ont été coupées, mais restent disponibles dans la version longue "director's cut".

À ce sujet, il est un détail de la légende qui marque le plus souvent les esprits et a inspiré la plupart des adaptations cinématographiques et télévisuelles : il s'agit bien sûr du triangle amoureux d'Arthur, Guenièvre et Lancelot. Le faux pas de la reine est pourtant rajouté à la légende tardivement par Chrétien de Troyes, qui six siècles plus tard crée Lancelot (ainsi que le Graal et Perceval). Cette nouvelle version rencontre une popularité hors pair au XIIIe siècle dans la tradition orale en langue d'oïl des trouvères, lesquels contrairement aux troubadours d'Occitanie, font la part belle à l'amour, et elle devient le symbole de l'amour courtois, qui sera l'apanage des chevaliers et de Laurent le Magnifique lui-même. Ainsi, Le Roi Arthur renoue d'autant plus avec la tradition ancienne du Roi Arthur en ne faisant que des allusions subtiles à l'attirance mutuelle de Lancelot et Guenièvre, caractéristique de l'amour courtois. Si des scènes supplémentaires portant sur ce sujet sont disponibles dans la version longue, c'était un choix délibéré de l'équipe du film de ne pas se concentrer sur cette partie de l'histoire, rendant l'opus d'autant plus original.

Autre détail de grande importance qui rompt d'avec la tradition cinématographique, mais également littéraire depuis les Annales Cambriae, est le fait que l’affrontement entre le Roi Arthur et son ennemi, ici, Cerdic, le chef des Saxons, et non pas Mordred, son némésis de toujours, est bien différent. David Franzoni renoue ainsi encore une fois avec l'histoire originale dénuée de Mordred et de l’issu de leur duel. De ce fait, ce Roi Arthur est d'autant plus réel, car il n'est pas encore "le roi qui fut et qui sera", emmené mourant sur l'île magique d'Avalon pour panser ses blessures et revenir au moment propice - il est bel et bien celui qui inspirera le mythe féérique du Roi Arthur. Cependant, même si un clair parallèle cinématographique est établi entre les personnages de Cerdic et Mordred, il est bon de préciser que la bataille mise en scène dans le film est celle du mont Badon et non pas la Bataille de Camlann, qui se passe une quinzaine d'années plus tard selon les sources, et qui traditionnellement voit périr Arthur aux mains de Mordred.
Cependant, ce dernier n'est pas complètement absent de l'œuvre cinématographique, du fait d'une petite touche ô combien pertinente de la part du réalisateur en la personne du traître britton. En effet, celui-ci correspond en tout point aux codes récents des représentations les plus iconiques de Mordred : peau pâle, yeux bleu clair, cheveux d'ébène (ou châtains) et regard perçant - ce qui d'emblée permet aux fans de la légende arthurienne d'identifier cet homme comme une menace potentielle envers Arthur. De plus, le Britton s'allie aux Saxons, trahit son peuple et met en péril la sécurité de l'île, à l'instar du légendaire fils incestueux du Roi Arthur, ce qui achève cette incroyable ressemblance qui ne réside ainsi pas seulement dans son apparence, mais dans ses actes. Étonnament, la similitude est devenue d'autant plus évidente a posteriori, du fait de la grande popularité de l'interprétation d'Asa Butterfield (Mordred jeune) et d'Alexander Vlahos (Mordred adulte) dans la série Merlin (2008-2012), qui approfondit le personnage comme jamais auparavant et correspond à cette représentation.

En plus de la musique, un autre aspect qui contribua à évoquer le fait que ces personnages réalistes allaient devenir de véritables mythes est le travail effectué par l'équipe d'effets spéciaux sur les paysages irlandais. Selon les dires de Matt Johnson, superviseur des effets spéciaux, il fallait conférer à ces endroits fantastiques le caractère épique et grandiose propre à la légende du Roi Arthur. De plus, le film fut tourné en août et l'une de ses scènes les plus mémorables, un affrontement entre la légion d'Artorius et les Saxons, se passe sur la neige. Pour la totalité des effets spéciaux employés, le maître mot fut toujours, réalisme. Cette atmosphère immersive et ésotérique fut amplifiée par le fait que Slawomir Idziak, directeur de la cinématographie, a disposé des caméras un peu partout, surtout durant la bataille : dans les boucliers, attachées aux épées, dans la forêt, sur les bâtons de bois, sur les casques ; absolument partout et sans en parler aux acteurs qui jouaient sans savoir d'où ils seraient filmés, conférant à leur jeu d'autant plus de réalisme. Durant la scène de la Bataille du mont Badon, qui renoue avec la tradition arthurienne à travers la présence de la brume opaque connue pour avoir avantagé Arthur lors de la Bataille de Camlann, les acteurs ne voyaient pas l'équipe et les caméras lorsqu'ils fonçaient dans la mêlée à l'assaut de l'ennemi.

En effet, le film a eu son lot d'improvisation et d'apports divers et variés. Clive Owen rapporte que les chevaux ont eu une immense influence car les acteurs ne parvenaient pas à complètement les contrôler et ainsi, ils se retrouvaient à jouer d'une autre manière que celle qu'ils avaient prévue. Cela donne à l'ensemble un caractère très énergique et vivant, car les acteurs sont en permanence dans l'action pure et simple. Mais le défi n'était pas seulement celui des acteurs, c'était également celui d'Antoine Fuqua, qui rapporte qu'il ne se rendait pas compte de l'envergure du film avant de s'y atteler. Durant les scènes de batailles planifiées minutieusement, il faisait très attention à ce qu'aucun accident ne survienne, car une quantité importante d'actions se déroulaient en même temps, et il était difficile de garder l'oeil sur tout. Chaque bataille était chorégraphiée avec une extrême minutie, car les lourdes épées utilisées par les acteurs en combats rapprochés auraient vite pu créer des blessures. Pour Le Roi Arthur, il fut ainsi manufacturé environ 300 épées, 750 lances, 300 haches, 10 différents prototypes d'Excalibur, et entre 2000 et 2500 costumes créés par la costumière Penny Rose qui avait travaillé sur Pirates des Caraïbes : La Malédiction du Black Pearl.

Si le film ne rencontre pas un immense succès aux États-Unis, rapportant 15 millions de dollars le premier weekend de sa sortie, et en tout près de 52 millions combinés avec les résultats du Canada, soit à peu près la moitié de son budget de 120 millions, il plaît à l'internationale. Fort de son succès au-delà des frontières étasuniennes, Le Roi Arthur se hisse ainsi à la vingtième place des films étasuniens les plus populaires de 2004, juste devant Ocean's Twelve, avec 203 millions de dollars. En France, l'opus attire dans les salles 1,5 million de spectateurs. Au Japon, où la légende du Roi Arthur était jusqu'ici assez méconnue de la population, il connaît son plus grand succès après les États-Unis et le Canada combinés, soit 16 millions de dollars, suivi du Royaume-Uni avec près de 13 millions tout comme l'Espagne et pas loin l'Allemagne et la France avec près de 11 millions chacun. En dehors de l'Union Européenne, le film connaît également un succès en Australie, au Mexique, en Russie, au Brésil, en Turquie, en Argentine, en Thaïlande, à Taïwan, en Afrique du Sud et en Nouvelle-Zélande.

Le Roi Arthur est un film résolument important pour la matière de la légende arthurienne, car il symbolise une théorie, qui un temps fut considérée, comme révélatrice des origines du roi "qui fut et qui sera". Et à ce jour, il montre mieux que tout autre film d’envergure le contexte de la légende originale du Roi Arthur avant que celle-ci ne devienne un récit médiéval. Le ton est épique, la photographie est splendide, les personnages sont mémorables et uniques, la musique est parfaite, les prestations d'acteurs sont toutes à la hauteur, et la fin, sans la raconter ici, est ce que n'importe quel fan de la légende du Roi Arthur attend depuis toujours.

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