Plongée dans le Monde des Dauphins

Titre original :
Diving with Dolphins
Production :
Disneynature
Date de mise en ligne USA :
Le 3 avril 2020 (Disney+)
Genre :
Documentaire
Réalisation :
Keith Scholey
Musique :
Barnaby Taylor
Durée :
79 minutes
Disponibilité(s) aux États-Unis :

Le synopsis

Les réalisateurs de Blue proposent aux spectateurs de découvrir l'envers du décors de la réalisation du film en les suivant dans leur périple autour des océans du globe. Du surf sur les vagues sud-africaines aux danses avec les baleines à bosses à Hawaï, les cinéastes prennent ainsi tous les risques pour montrer une nouvelle facette des mystères de l'océan...

La critique

rédigée par
Publiée le 10 mai 2020

Plongée dans le Monde des Dauphins est dans la lignée de La Reine de la Montagne et Nés en Chine : Histoires d'un Tournage, un film sur un film. Il propose ainsi d'explorer les coulisses du tournage de Blue en revenant sur l'incroyable aventure humaine des cinéastes tout en rendant hommage à la beauté de la nature.

En 2008, The Walt Disney Company renoue avec le genre du documentaire animalier que le papa de Mickey lui-même avait décidé de populariser quelques 60 ans auparavant. Passionné de flore et de faune, Walt Disney peut, en effet, être considéré comme le pionnier du documentaire animalier grand public. Dès 1948, il met ainsi en chantier la collection des True-Life Adventures dont les courts et longs-métrages seront multi-oscarisés. Cette série, inaugurée avec le mini documentaire L'Ile aux Phoques, constitue d'ailleurs la première véritable incursion de la compagnie au château enchanté dans la production de films "live". Elle comporte un total de sept courts-métrages dont La Vallée des Castors (1950) ou La Terre, Cette Inconnue (1951) avant de s'ouvrir, en 1953 avec Le Désert Vivant, au format des longs-métrages. Ce dernier devient, à partir de cette date, la norme de production des True-Life Adventures et concerne, au final, six œuvres dont La Grande Prairie (1954) ou Le Grand Désert Blanc (1958). Au total, en comptant les courts et longs-métrages, la série aura gagné en tout pas moins de huit Oscars !

La renaissance de la production de documentaires axés sur la nature et les animaux sauvages au sein du catalogue Disney est due à l'initiative du français Jean-François Camilleri. Alors manager de la filiale hexagonale de Walt Disney Studios Motion Pictures, il a, en effet, en 2005, la brillante idée d'accorder sa confiance à un jeune réalisateur tricolore, Luc Jacquet, en acceptant de produire son premier film, La Marche de l'Empereur. Le pari est osé. Proposer sur grand écran et à destination du grand public un long-métrage documentaire animalier sur la vie des manchots empereurs vivant en Antarctique apparaît, il est vrai, à l'époque comme un rêve doux-dingue, caprice d'un producteur en mal de respectabilité auprès de l'intelligentsia hexagonale, sacrifiant pour une fois la recherche du seul profit commercial sur l'autel de l'expérimentation cinématographique. L'avenir prouvera le parfait contraire. Seul contre tous, Jean-François Camilleri démontre l'incroyable potentiel du genre, confirmant son rang dans le milieu du cinéma français de producteur hexagonal à part entière, véritable découvreur de talents. La réussite commerciale de La Marche de l'Empereur est, en effet, loin d'être un succès d'estime. En France, le film taquine allègrement les deux millions d'entrées ! Le résultat est tel que l'intérêt de proposer le documentaire à l'export apparaît vite évident. Comble de l'ironie, le marché américain lui ouvre rapidement ses portes, mais sans Disney. La maison mère de la filiale française menée par Jean-François Camilleri fait, en effet, la fine bouche et refuse cette histoire de manchots incongrue. Warner Bros., elle, sent le joli coup venir et accepte de distribuer le film sur le sol américain. Il devient vite à l’époque le plus gros succès pour un long-métrage français en Amérique du Nord. Il remporte même l'Oscar du Meilleur Documentaire, véritable pied de nez à la France qui lui a refusé le moindre César. Devant l'ironie de l'histoire, Jean-François Camilleri ne prend pas ombrage et pardonne à sa tutelle son erreur d'appréciation. Il la comprend même tant son pari était osé... Il entend d'ailleurs l'aider à la réparer et à l'amener à occuper enfin le terrain du documentaire grand public, à destination des salles obscures. Il crée pour cela, une société de production spécifique, Disney Nature Productions, qui présente ainsi un premier long-métrage en 2007, Le Premier Cri, film ethnologique sur la naissance à travers le monde, beaucoup moins abordable qu'un simple documentaire animalier. Il continue ensuite de faire confiance à Luc Jacquet et distribue son deuxième long-métrage, Le Renard et l'Enfant, un docu-fiction axé sur l'amitié entre une petite fille et une renarde. L'œuvre très personnelle séduit à nouveau le public français.

Patiemment, le patron alors remuant de la filiale française convainc sa maison-mère d'investir le marché. Elle accepte finalement de créer un nouveau label de films à l'instar de Disney, Touchstone Pictures ou Hollywood Pictures. Disneynature est ainsi présenté mondialement en avril 2008. Basé en France, il est logiquement dirigé par Jean-François Camilleri et poursuit deux objectifs : distribuer des productions "maison" à l'international et productions étrangères aux États-Unis. Les premiers chantiers sont déjà sur les rails. Le programme est alléchant. Les Ailes Pourpres, Le Mystère des Flamants sort ainsi en décembre 2008, suivi par Pollen et Félins en 2011, Chimpanzés en 2012, Grizzly en 2014, Au Royaume des Singes en 2015, Nés en Chine en 2016, L'Empereur en 2017, Blue en 2018 et Penguins en 2019. Par ailleurs, le film britannique Un Jour sur Terre est distribué aux États-Unis en 2009 sous label Disneynature, ainsi que le film français Océans en 2010. Enfin, en 2016, il propose son premier film directement en sortie digitale, Grandir, suivi un an plus tard par La Reine de la Montagne et Nés en Chine : Histoires d'un Tournage.

Mais voilà, malgré la qualité de ses films, Disneynature voit irrémédiablement les résultats au box office diminuer de sortie en sortie ; le tout dernier, Penguins, atteignant à peine sept millions de dollars. Son échec financier semblait ainsi entériner un avenir bien sombre pour le label Disneynature né en France. Déjà, le public s'était visiblement lassé des documentaires animaliers au cinéma. Ensuite, le rachat d'une partie de 21st Century Fox par The Walt Disney Company, acté en mars 2019, faisait rentrer dans le giron de Disney la très forte et iconique marque National Geographic. Il paraissait alors évident que Disney n'avait aucun intérêt à garder deux labels de documentaires, surtout quand l'un des deux est largement moins connu que l'autre. Le départ de The Walt Disney Company de Jean-François Camilleri, créateur du label à l'iceberg, en mars 2019 semblait d'ailleurs valider ce constat. La mort de Disneynature ne serait sans doute jamais officielle mais le label aurait pu s'éteindre en catimini comme d'autres anciens studios Disney à l'image de Touchstone ou Hollywood Pictures ; ses sorties au cinéma n'étant désormais plus rentables pour le label malgré ses faibles coûts de production. Coup de théâtre, le salut vient en 2020 après le lancement de la plateforme Disney+ !

L'ouverture historique le 12 novembre 2019 de Disney+, une plateforme de service de vidéo à la demande par abonnement créée par The Walt Disney Company, est en effet un tournant aussi stratégique qu'historique pour le studio aux grandes oreilles. Actant le nouveau comportement des (télé)spectateurs qui délaissent la télévision linéaire pour un nouveau type de consommation de flux audiovisuels, Disney+ a alors deux objectifs. D'une part, elle remplacera à terme les sorties en vidéo des films cinéma sur support physique dont le grand public s'est détourné, préférant en majorité l'achat en digitalisé. D'autre part, elle permettra à Disney de revenir sur des genres de films qu'il avait déserté en salles faute de succès ou d'appétit suffisant des spectateurs. Les films à petit budget, qui étaient proposés il y a encore quelques années sur grand écran, sont donc désormais réorientés pour une sortie directement sur la plateforme. Le choix est compréhensible car le public préfère malheureusement se déplacer en salles de plus en plus pour des franchises qu'il connaît bien. Les studios Disney se contentent alors de lancer au cinéma uniquement des films à gros budgets, certes aux risques plus importants mais aux retours sur investissement conséquents. Disney+ est donc l'écrin idéal pour accueillir les films Disneynature, ce qui paradoxalement leur donnera plus de visibilité ; les familles hésitant à dépenser le prix d'une place de cinéma pour un "simple" documentaire. Ainsi le 3 avril 2020, ce sont pas moins de quatre films originaux du label qui se voient proposés sur la plateforme ; Éléphants et les documentaires making-of comme le fut La Reine de la Montagne : Plongée dans le Monde des Dauphins, Les Manchots : Une Vie à Risque, Sur la Route des Éléphants. Sont également ajoutés Penguins, qui n'avait pas eu droit à une édition vidéo, ainsi que Blue, qui était sorti au cinéma uniquement en France (et qui donc doit patienter pour intégrer le catalogue de Disney+ dans l'hexagone compte tenu de l'effet de la constestable règle de la chronologie des médias).

Plongée dans le Monde des Dauphins est réalisé par Keith Scholey.
Né en 1957 en Tanzanie, Keith Scholey obtient son doctorat en zoologie à l’Université de Bristol puis entre en 1983 au département d'histoire naturelle de la BBC. Il commence en tant que chercheur sur l'émission The Natural World puis devient producteur sur Wildlife on One ou sur Big Cat Diary. En 1998, il prend la tête du département, à la suite d'Alastair Fothergill. Quatre ans plus tard, il est promu en devenant responsable des départements des Sciences, Arts, Business, Histoire, Religion et Histoire Naturelle de la chaîne puis en 2006, se voit chargé de toutes les productions BBC basées sur des faits réels. Il démissionne en 2008 pour suivre Alastair Fothergill dans l'aventure Disneynature afin de se concentrer sur la production et la réalisation de documentaires. Keith Scholey réalise ainsi quatre longs-métrages : trois pour les salles obscures, Félins en 2011, Grizzly en 2014 et Blue en 2018, et un pour la plateforme Disney+, Plongée dans le Monde des Dauphins.

Plongée dans le Monde des Dauphins a l'immense privilège d'être narré en anglais par Céline Cousteau, la petite fille de l'explorateur océanographique français Jacques-Yves Cousteau, commandant de la Calypso, son célèbre navire d'exploration. La narratrice explique ainsi comment les cinéastes de Blue ont pu obtenir les images sensationnelles du film. Le long-métrage débute alors au large de la Mer Rouge où le cinématographe Roger Horrocks va essayer de filmer les dauphins. Il est aidé ici par la biologiste de la vie sous-marine, Angela Ziltener. Le but est d'apprendre à connaître le groupe de cétacés, de se faire accepter d'eux afin qu'ils tolèrent que le cinéaste reste à proximité et consentent à se faire filmer. Le spectateur se rend compte alors, en même temps que le cameraman, que ces mammifères marins sont non seulement très sociables mais en plus incroyablement intelligents ; chaque membre ayant une personnalité qui lui est propre. Les interactions entre chaque individu sont à la fois nombreuses et très tactiles. Plus étonnante encore est leur capacité à être discipliné. Pour l'illustrer, le film montre l'existence d'un type de coraux qui a la vertu de soigner et de désinfecter la peau des dauphins. Ceux-ci font alors la queue, les uns à la suite des autres, pour venir se frotter chacun à leur tour sur ces récifs médicinaux.

Toujours autour des dauphins, l'équipe de Blue a voulu montrer deux autres aspects extraordinaires de l'espèce. La première est leur incroyable passion pour les sports extrêmes, notamment quand ils surfent. Pour révéler ce fait improbable, Roger Horrocks est parti sur les côtes sauvage de l'Afrique du Sud qui forment un spot de surf prisé des dauphins. Il va se faire aider là de son collègue cinéaste Jamie McPherson ainsi que de Paris Basson, un surfer professionnel, qui l'emmène en jet ski juste devant les vagues pour décrocher l'angle de vue optimal. Plongée dans le Monde des Dauphins montre ainsi la formidable patience qu'il faut aux équipes pour pouvoir ramener des images sensationnelles mais aussi les dangers encourus tellement les vagues et le courant sont particulièrement forts. Dans un autre coin de la planète, dans les eaux des Bahamas cette fois-ci, le cinéaste Paul Atkins a pour mission de montrer comment les dauphins se nourrissent. Mais le lieu le plus impressionnant, qui est assurément le clou de spectacle du film Blue, se situe dans les mangroves du Sud de la Floride, dans les vasières, où le cinéaste Jamie McPherson va filmer la technique de chasse unique et spectaculaire du filet de boue. Les cétacés chassent ainsi en groupe de façon aussi coordonnée qu'intelligente. Et pour proposer des images à la fois immersives et époustouflantes, le cinéaste va non seulement tourner sur l'eau avec une caméra multi-directionnelle mais aussi de haut à bord d'un hélicoptère.

L'autre espère particulièrement mise en avant dans Blue est la baleine à bosse. Comme le montre Plongée dans le Monde des Dauphins, Disneynature fait pour elle appel au cinéaste Didier Noirot qui part à Hawaï pour rapporter des images incroyables. Il s'agit en effet de l'endroit idéal tellement les eaux de l'archipel sont cristallines, parfaites donc pour filmer, mais aussi car l'espèce y est particulièrement présente, notamment les femelles qui viennent y donner naissance à leur petit et commencer leur éducation. Le cinéaste va alors essayer, patiemment, de prendre des images d'une mère et de son baleineau mais l'exercice s'avère délicat car tous deux doivent avoir confiance et ne pas se sentir menacés. Un autre moment de pur bonheur est le chant d'une baleine, séquence vraiment fascinante. Surtout qu'au moment où Didier Noirot plonge pour immortaliser la séquence, deux autres baleines viennent rejoindre la première et se mettent à réaliser un ballet aquatique de toute beauté. Enfin, dernière scène impressionnante sur ces cétacés, et sûrement l'un des combats d'animaux les plus incroyables de la planète : la course de vingt-cinq mâles qui se disputent les faveurs d'une femelle. Le moment est intense et le tournage s'est avéré aussi délicat que complexe.

Au delà des dauphins et des baleines à bosse, de nombreuses autres espèces sont montrées dans BluePlongée dans le Monde des Dauphins offre ainsi quelques autres secrets de tournage, à commencer par celui du cinéaste Doug Anderson qui a pour mission de filmer les récifs coralliens et d'y mettre en avant sa beauté et ses détails. Parmi les habitants incongrus vivant près des coraux, le film présente les poissons-perroquets à bosse qui sont indispensables à la chaîne alimentaire, nettoyant les algues qui recouvrent les coraux et permettant leur recolonisation en nettoyant les sols autour d'eux. Plus tard, l'équipe part pour Sipadan, une île malaisienne, où elle filme le fameux cimetière de tortues dans une caverne profonde et sombre. Là encore, les images sont impressionnantes et les cadreurs aquatiques doivent se montrer particulièrement précautionneux afin de ne pas soulever le sable qui boucherait la vue de la sortie et pourrait transformer la grotte en piège mortel. Enfin, la dernière espèce montrée dans le film est le requin gris des récifs. Le cinéaste Denis Lagrange plonge pour lui dans les eaux de la Polynésie française pour récupérer des images de chasse du requin en pleine nuit, avec tous les dangers que cela comporte. Non pas que le requin vise l'homme, mais dans le noir et avec beaucoup d'agitation, un accident peut vite arriver.

Plongée dans le Monde des Dauphins est un complément idéal de Blue. Le long-métrage est en effet une jolie découverte des secrets de fabrication du film de Disneynature, et constitue bien plus qu'un making-of. Il s'agit aussi d'un formidable témoin de la beauté des océans que l'homme se doit absolument de préserver... avant qu'il ne soit trop tard.

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